Temps fort : TENDANCES POUR 2011 – POLITIQUE : OFFENSIVE EN DEHORS, PRUDENCE EN DEDANS

Quelles sont les tendances politiques qui se dessinent en Chine à l’aube de cette année nouvelle ? Quelles priorités le pouvoir va-t-il suivre en 2011 ? Le Vent de la Chine en décrypte pour vous les plus évidentes.

Idéologie : on peut s’étonner qu’elle reste active en ce pays ayant lâché la voie marxiste: c’est qu’elle est la griffe de Hu Jintao, «gardien du temple», et la seule légitimation du régime pour se faire entendre des 80millions de membres le long de la chaîne de pouvoir, sur l’empire immense.

Face à la 纪律检查, Commission centrale de discipline du PCC, Hu Jintao vient de réitérer le vieux slogan «issu du peuple, pour le peuple». Ceci cache une priorité centrale du XII. Plan : verser toujours plus du PIB aux pauvres. Ce qui, pour réussir, devra inverser une tendance de 20 ans, drainant le meilleur du produit social vers les riches et les cadres – souvent le même milieu. C’est la guerre à la corruption, ainsi résumée par Hu: «combattre strictement l’acte, punir durement les acteurs». Comme pour joindre l’acte à la parole, deux cadres de Yizhou (Shanxi) sont exclus du Parti et encourent des ans de prison pour avoir détourné des millions de fonds publics.

Autre volet du même projet, Li Changchun, chef de la propagande annonce une campagne d’ «éducation du peuple» sur les objectifs du Plan: le pouvoir central veut s’assurer le soutien de la base, dont il aura besoin contre les nantis arc-boutés sur la défense de leurs privilèges.

A noter au passage la statue massive de Confucius qui vient d’être érigée place Tian An Men face au portrait de Mao Zedong : les deux «divinités» sont désormais en concurrence : juste revanche pour Confucius, que Mao jetait hier à la vindicte populaire, dans un même sac avec Lin Biao. C’est une discrète promesse de laïciser le pays et de diluer l’ombre écrasante du Timonier—1er pas vers la séparation du Parti et de l’Etat…

Tibet, Xinjiang. Pensant sans doute à leur promotion de 2012, les leaders de ces territoires «autonomes» réaffirment leur devoir sacré d’éradiquer le séparatisme et hurlent au Xinjiang contre le «terrorisme», au Tibet contre «la clique du Dalai Lama». Cette rigidité en politique est « compensée » par la poursuite du lourd effort du pays pour financer le rattrapage de ces régions excentrées et arriérées. Au Toit du Monde, le chemin de fer est prolongé vers le Népal, entre autres investissements qui ont renforcé de 12% le PIB tibétain en 2010, dépassant la moyenne nationale). Au Xinjiang, une réforme de la taxe des hydrocarbures a plus que doublé le revenu public local, à 2MM¥.

Tension sociale. Cet autoritarisme reflète aussi la tension qui monte à travers le pays, due au déséquilibre entre une mutation rapide et profonde de toutes les structures sociale, et la sclérose d’un cadre politique anachronique. Ceci cause trois types de réactions, toutes déstabilisantes, et qui vont se multiplier en 2011:

[1] les actions légalistes de corps de métiers tels médecins, musiciens, sportifs, ONG pour exercer leur propre gestion. Ou les actions « citoyennes » comme celle du professeur pékinois Yang Zhizhu, opposé au planning familial ;

[2] les centaines d’émeutes quotidiennes. Parmi les plus récentes figurent celle contre un îlot touristique artificiel à Hainan (le 17/01, par milliers, des pêcheurs brûlent des voitures la police pour défendre leur zone de pêche); celle contre l’empoisonnement au plomb de 200 enfants à Huaining, Anhui (le 10/01, les parents protestent contre l’étouffement de l’affaire pour blanchir les cadres laxistes et corrompus); et celle contre la fermeture d’une usine d’uniformes en faillite à Wuhan,Hubei (le 19/01, 1500 ouvriers licenciés, très mal indemnisés, protestaient)…

[3] les abus de pouvoir, tels ces trois juges de Pingdingshan (Henan) condamnant à perpétuité un camionneur pour avoir roulé sous plaques militaires et fraudé 3,7M¥ de péages. Mais il y avait erreur d’identité (son frère et non lui était le coupable), et même en Chine, le verdict apparaît exagéré : les juges ont été « suspendus »

En diplomatie, la Chine renforce sa présence et influence sur la région-avec pour effet des débuts d’alliances chez ses voisins. Suite aux agressions contre Séoul par Pyongyang, non condamnées par Pékin, les ministres de la défense du Japon et de la Corée du Sud (historiquement plutôt divisés) se voyaient à Séoul (9/01) pour coopérer. Le 16/01, à Lombok (Indonésie), les ministres des affaires étrangères de l’ASEAN (Association des Nations d’Asie du Sud-Est) se rassemblaient pour unifier leurs positions sur les «disputes maritimes » (c’est à dire le partage de la mer de Chine) avec la Chine.

Le 12/01, le petit Tadjikistan annonçait avoir «réglé ses conflits territoriaux avec la Chine»… au prix de la session à son géant voisin de 1000km² de désert, confisqués à la Chine 150 ans plus tôt par la Russie tsariste.

Face à l’Inde enfin, le dialogue semble un peu plus équilibré : le pays étant de taille à se défendre, et —Pékin considérant justement cette relation comme stratégique pour l’avenir. L’Inde accuse certes les troupes chinoises d’incursions dans la zone frontalière de l’Arunachal (revendiquée par Pékin). Par contre, la Chine vient de recommencer à émettre des visas à ses ressortissants : un geste conciliant, même si le visa est émis sur feuille volante. Auparavant elle les laissait entrer sans visa, estimant implicitement qu’ils seraient en fait de nationalité chinoise : une prétention évidemment inacceptable à Delhi…

NB: tout ceci exprime l’apprentissage de Pékin à sa nouvelle condition de puissance, en apprenant de ses erreurs !

 

 

 

 

 

 

 

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