Einstein, on le sait peu, était bernois, en 1905, quand il développa E = mc², la théorie de la relativité, et shanghaïen, en 1921, quand il reçut son prix Nobel de Physique.
Quoi de plus normal que le Musée d’histoire de Berne, après avoir mené son expo rétrospective à Pékin et Hong Kong, lui ménage une halte dans la métropole du Yangtzé, pour le 60ème anniversaire des relations ?
Hélas, il n’en sera rien. Berne a jeté l’éponge, suite à l’insistance du Musée local des Sciences et Technologies de «compléter» l’expo par un hommage à un autre maître, Confucius. Côté suisse, délicatement, on invoque des raisons techniques (pas le temps d’adapter l’Expo Einstein à celle du Moraliste). Côté chinois, on « ne comprend pas» la rupture soudaine, perte de face.
Prenant du recul, les experts des deux bords accusent le grand écart entre les visions respectives de l’histoire. La Chine croyait flatter l’Ouest, en associant Confucius à Einstein. Mais à l’historien occidental, le rapport entre le physicien et le conseiller du prince est obscur, autant que celui entre physique et morale.
D’autre part le censeur socialiste est sincèrement gêné par les références au nazisme, et «en son âme et conscience», voulait épargner au peuple des scènes peu «harmonieuses»: substituer des images de sagesse confucéenne à celles d’Holocauste, n’était-ce pas là une idée chic et épatante, en plus fusionnelle du meilleur des cultures d’Orient et d’Occident ? Malheureusement, aux yeux de la démocratie occidentale, le rappel des leçons de l’histoire est un devoir non négociable
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