A la loupe : Yahoo ! – Alibaba et ses 40 voleurs

En 2005, Yahoo! payait 1MM$ pour 43% d’Alibaba, la galerie en ligne de Jack Ma : deal cher, mais rentable, qui propulse Yahoo! 1er actionnaire de la plus grande galerie virtuelle sur terre, 100 millions de clients, 80.000 boutiques, d’une valeur de 10milliards$.

Depuis des années, J. Ma veut racheter sa liberté—ne serait-ce qu’en raison de la croissance bien plus faible de Yahoo!, handicap à sa propre progression vertigineuse. Une guéguerre dure depuis 2009 à ce sujet, avec la PDG, américaine, Carol Bartz.

Or, voilà que le 11 mai, Yahoo! révèle avoir appris un changement de structure financière chez sa filiale chinoise, depuis 7 mois à son insu. Alipay, branche de paiement en ligne d’Alibaba a été exfiltré, «racheté» 46M$ par une firme qui se trouve être propriété privée de Jack Ma.

La nouvelle fit l’effet d’une bombe, semblant un «coup d’Etat» hors contrat et hors loi, non sans analogie avec celui de Wahaha contre Danone, sa maison mère d’alors. Sous l’angle comptable, Alipay est inquantifiable. Encaissant quotidiennement des dizaines de millions de $ de transactions, presque sans commission, son service est «sans valeur» ajoutée directe, mais par contre d’une valeur immense si l’on s’en tient au volume d’affaires dégagé, et au marché potentiel de 457millions d’internautes. Sa valeur a été estimée à 5milliards$ par le Bureau d’analyse Gabelli.

Jack Ma répondait que la scission d’Alipay n’avait rien de plus légal, ayant été décidée en 2009 en Conseil d’Administration devant un homme de Yahoo!, pour lui permettre d’obtenir sa licence, légalement problématique en présence d’intérêts étrangers à bord. De toute manière, Yahoo! aurait été «partiellement compensé» et les palabres «resteraient ouvertes ».

On aboutit donc à une double mise en échec : Alibaba-le-nabab ne parvenant pas à recouvrer sa liberté, Yahoo-le-pauvre s’estimant dépossédé. On en est là.

Deux jours plus tard (16/05), nouveau coup de théâtre : les groupes publient un communiqué commun lapidaire, signifiant qu’ils tentent d’aplanir leur différend.

En clair, le temps d’un week-end aura suffi pour leur faire réaliser les dégâts qu’un conflit pourrait causer à chacun. A peine la fuite annoncée, la cotation de Yahoo! En bourse de New York (NYSE) fondait de 14% – ses actionnaires sachant que les trois-quarts de sa richesse sont dus à sa position dans Alibaba. Yahoo ne s’est jamais remis de l’échec de son rachat par Microsoft en 2009 et ne peut se permettre une guerre ouverte laminant plus encore son image. Mais Alibaba aussi a fort à perdre d’un procès intenté par Yahoo! ou pire, par l’un ou l’autre des fonds-actionnaires : une amende, des dommages immenses, voire l’exclusion du marché américain…

Le Ministère du commerce lui-même pourrait être discrète partie prenante. De janvier à avril, l’investissement américain en Chine a reculé de 28%, et le nombre d’établissements de firmes américaines de 3,85%. A ceci, plusieurs raisons fort raisonnables sont avancées, tel le déclin de l’activité manufacturière outre Pacifique, ou la hausse des coûts de fonctionnement en Chine. Mais d’autres raisons apparaissent, également plausibles : telle l’inquiétude de voir des groupes locaux rudoyer leurs partenaires étrangers avec des règles créées à la demande, hors concertation, contrat et cadre légal. Un comportement que Pékin ne peut tolérer indéfiniment…

 

 

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