A la loupe : Bien visibles à l’ANP : les grandes fortunes

Au Plenum de l’ANP (Assemblée Nat’le Populaire), un chiffre eut un long écho dans les travées, parmi les 2987 édiles : les 70 plus riches d’entre eux combinaient une fortune de 75MM$ – ils étaient donc tous quasi-milliardaires en USD… Les 38 les plus nantis dépassaient même le 1er nabab du Congrès américain (un « pauvre », avec seulement 485M$). Selon R. Hoogewerf, l’expert traqueur de tycoons, la Chine compte cette année 189 milliardaires en USD – et plus certainement 400, en comptant les fortunes cachées.

Ces fortunes tournent sur leur grande roue. Certaines disparaissent. D’autres gonflent de 50% sur une année —tel celle de Zong Qinghou, l’actuel n°1, magnat de Wahaha (n°3 des eaux et du lait) qui passe à 12MM$. Toujours dans la brume quant à l’origine de leur fortune, ces businessmen sont le levain de la croissance chinoise. Leur interaction avec le Parti est visible au grand jour -ils en sont souvent membres. Ils marquent l’éclatante réussite du Parti, dans son projet d’interpénétrer et coopérer avec cette haute bourgeoisie nouvelle: pour partager le pouvoir économique, tout en conservant le monopole du politique.

Pour le commerce de luxe, ils sont la nouvelle manne. De 15 ans plus jeunes que la fortune mondiale moyenne, ils dépensent plus. En bons confucéens, ils font plus d’achats «petits cadeaux», pour leurs familles et (petites) ami(es).

Fait surprenant, ces milliardaires sont aussi des «elles», plus présentes dans ce microcosme que sur l’arène politique, peut-être le dernier club « macho » chinois. 29% des PDG privés sont des femmes, telle Yang Mianmian, Présidente de Haier, citée par Fortune Magazine parmi les 20 femmes les plus influentes au monde.

Grâce à eux, dit McKinsey, le luxe en Chine augmente ses ventes de 18%/an, pour des groupes tels Ferragamo ou Louis Vuitton, devant dépasser le Japon en 2015 avec 27MM$. On voit parfois chez ces riches comme un mal à assumer leur fortune. Ainsi Gan Lianfang, au salaire pourtant minus de 3000²/mois, supplia, lors du Plenum, le fisc de le taxer plus, pour éradiquer la pauvreté en Chine.

Zong Qinghou ne le suit pas du tout. La solution, pour lui, est ailleurs: « les pauvres n’ont qu’à travailler plus ». Fidèle à son principe, Zong a d’ailleurs refusé, par «manque de temps», d’assister à un gala de charité, organisé en septembre à Pékin, par Bill Gates et Warren Buffett. Par contre, durant le Plenum, il ne s’est pas privé d’attirer les projecteurs sur ses prochaines emplettes, source de sa fortune future : un groupe nippon du yaourt, des mines, des supermarchés à travers le monde…

Ex-1ère fortune de Chine en 2007 avec 6,3MM$, Huang Guangyu, fondateur de Gome, 2d groupe de distribution de l’électroménager n’a pas pu siéger, étant en prison depuis 2009 pour corruption et délit d’initié. Après sa chute, Gome avait été maintenu à flot par son bras droit Chen Xiao, et recapitalisé de 10% par Bain Capital : alliance qui fit bientôt de l’ombre à Huang (s’ajoutant à celle dans laquelle il croupissait), et qu’il ne tarda pas à combattre. Huang avait perdu ses droits civiques, mais non ses 32% de parts dans Gome : il vient de réaliser le tour de force de contraindre Chen à la démission. Preuve qu’en Chine, sans aller jusqu’à racheter la liberté, l’argent permet d’allonger les bras des milliardaires, bien au-delà des barreaux d’une cellule !

 

 

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