Temps fort : L’Etat meilleur en finance, qu’en communication

En 2011, la finance chinoise donne des signes contradictoires.

Le 31/12 à Xilingol, par -25°C «Grand père-Wen » (Wen Jiabao le populaire 1er ministre) brave les blizzards mongols pour promettre un «halte à la vie chère», à la flambée du panier de la ménagère. Pour les économistes cependant, loin d’être une calamité, cette inflation née des aléas climatiques, est un bienfait: un transfert de ressources des villes aux paysans, chance de faire d’eux des consommateurs, raffermissant le PIB.

Prenant le pouls des prix, les experts croient d’ailleurs que l’inflation vient de franchir le pic. Et pour cause : des mesures énergiques sur les prix portent leurs fruits, comme seule peut en déployer une administration chinoise, dans son économie mutante mi-marché mi-Etat. Très surveillés, les camelots sont punis s’ils dépassent les prix. L’État déstocke et approvisionne directement les marchés, court-circuitant les intermédiaires. D’ici le «chunjie», 8Mt de blé et d’huile seront ainsi écoulés à prix coûtant. De même, début décembre, l’amende pour spéculation était quintuplée à 5M¥ l’infraction, décourageant la fraude.

En même temps, l’État augmente les salaires des résidents de 7% minimum/an d’ici 2015 (21% à Pékin pour le salaire minimum), les pensions de 10%, et révise la loi des monopoles pour mieux interdire les ententes sur les prix. Auprès des banques, il vient de rehausser les taux d’intérêts, de réduire les prêts et d’inciter l’argent chinois à s’ex-porter. Tout ceci pour éponger les masses de crédit dormant, résultat de ses 2 ans de stimulus offert aux firmes publiques. Il s’agit aussi de ralentir la croissance des réserves publiques, déjà à 2650MM$, et de brider la progression du yuan, à 6,6/1USD l’an passé—les analystes prédisent une hausse de 4,6 % à 6,3USD en 2011. Il s’agit de la seconde phase du plan des autorités, bien conscientes que l’intervention musclée sur les marchés n’aura qu’un temps.

Le problème : sourds et aveugles aux injonctions publiques, crédit et immobilier poursuivent la bulle et fuite en avant. Les contrôles publics n’empêchent pas les banques d’engranger des profits sans précédent, jusqu’à 1000MM¥ en 2010 (contre 668.4 en 2009). Dopés par cette capacité de crédit, ventes et prix de l’immobilier poursuivent leur chevauchée fantastique, atteignant à Shanghai 21.699¥/m² (moyenne). Etant le « nerf de la guerre »des cadres intermédiaires, c’est logiquement que banque et foncier résistent aux consignes centrales d’austérité. Du fait de disputes entre ministères, Pékin serait même sur le point de repousser l’adoption d’une taxe à la propriété. Le trou noir de l’économie chinoise est bien là: selon Yu Yongding, ex-conseiller à la Banque de Chine, « le modèle de croissance de la Chine est quasi épuisé», et sans ajustement structurel «douloureux», la croissance nationale pourrait subitement s’affaisser…

Au niveau social, de multiples incidents relaient ce sentiment d’alarme. A Pékin le 29/12, le Président Hu Jintao rendait une visite télévisée à une femme sans ressources, logée par l’Etat dans 45m², pour 77¥: les internautes crient au scandale, soupçonnant l’histoire d’avoir été «bidonnée». A tort, apparemment, mais la méfiance règne.

Idem à Yueqing dans le Zhejiang, un chef de village est mort (25/12) sous un camion, « accident » dit la police, « assassinat » dit la rumeur, d’un homme qui irritait des profiteurs, en tentant inlassablement de protéger ses administrés des expropriations abusives de leurs champs… Tout ceci révèle un climat social de plomb, que l’Etat se montre incapable de gérer de façon convaincante…

 

 

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