Sur le front climatique, la douche froide de la COP 15 de Copenhague en décembre, semble être suivie d’une intense activité diplomatique: comme si surpris par l’orage, les pays devaient réagir en se mettant à courir. Au 3/02, 67 pays, berceaux de 78% des émissions mondiales de CO² avaient remis à l’UNFCCC (United Nations Framework Convention on Climate Change) leurs objectifs «volontaires» d’atténuation des émissions, dans le but commun d’un plafond du réchauffement global à 2°C.
Wen Jiabao vient d’engager son pays auprès de Ban Ki-Moon, Secrétaire général de l’ONU, à rechercher un accord «complet, efficace et contraignant» lors de la prochaine conférence COP 16 à Cancun (Mexique) en novembre.
Ministre d’Etat français à l’Environnement, Jean-Louis Borloo était à Pékin le 1/02, en route vers New Delhi pour reprendre le dialogue et préparer Cancun. Pour Borloo, la COP 15 a produit un accord «rapide» mais «conforme à la feuille de route» et sur lequel on peut travailler. Il attribue les blocages à une «incompréhension culturelle» de l’Ouest qui voulait un accord «qui lui ressemble», sur la vérifiabilité des efforts des pays émergents, sans s’interroger sur sa recevabilité. Déjà dotés d’institutions supranationales, les 27 Etats-membres pouvaient se plier à un tel système. Mais émergents et PVD, à peine sortis de l’ère coloniale, ne pouvaient ressentir que comme une insupportable atteinte à leur souveraineté les prétentions de contrôles et punitions. Ce qui ne signifie pas qu’ils refusent un plan mondial. Mais ses outils doivent être inventés de toutes pièces, non recopiés de l’Union Eropéenne.
Borloo se dit convaincu que la Chine, sous peu d’années, sera un des pays en pointe du monde dans les filières solaires, éoliennes, de la « voiture décarbonisée » (sic) et de la capture et stockage du CO²: stratégie qui l’aura fait passer du « low cost » au « low carbone ».
Pour Borloo, reste à régler à Cancun : [1] le lancement du fonds de 10MM$/an pour l’agriculture et les forêts des pays pauvres, [2] les réductions des émissions d’ici 2050 (50% aux PVD, 80% aux pays riches), et [3] un mécanisme d’information régulière des nations à l’ONU, sur leurs progrès d’atténuation des émissions. «L’essentiel», précise-t-il, «est de rétablir la confiance, afin que le monde sans exception s’ébranle, et que toute nation fasse sa part, avec ses moyens propres du moment».
A Pékin, le ministre annonce l’octroi par la Chine à la France d’un ambitieux projet conjoint : deux villes nouvelles de 0,5 million d’habitants : au Nord (Tian’an, Liaoning) et au Sud (ville satellite de Shenzhen), « le plus proche possible d’une neutralité carbonique ». Dès la planche à dessin, le projet intégrera des solutions aux transports publics et privés, des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique des bâtiments et le retraitement des déchets. Un projet de laboratoire, mais de grande ampleur, qui reflète la confiance franco-chinoise justement: retour d’ascenseur de Pékin peut-être, pour ce soutien français à la Chine climatique, plutôt rare par les temps qui courent.
Sommaire N° 5