Temps fort : Cancun—la divine surprise, mais pas si vite !

120 chefs d’Etat, 170.000 experts s’étaient déplacés en décembre 2009 au Sommet climatique de Copenhague. A celui de Cancun (29 novembre – 11 décembre), ils n’étaient plus que 15000 experts, et aucun décideur d’envergure. Tout cela suite à l’échec de Copenhague à dicter une suite au protocole de Kyoto, imposant à 37 nations une baisse de 5,2% d’émissions de C02 d’ici 2012. Le problème était celui des USA et de Chine, pays les plus pollueurs (45% des émissions globales), non signataires de Kyoto et pas prêts à y adhérer.

Sur telle base, l’ambiance à Cancun débutait pessimiste, prête à voir se reproduire cette arène de confrontation. Depuis un mois pourtant, la Chine exprimait une vague volonté de compromis. A l’évidence, Pékin voulait éviter d’apparaître à nouveau le « fossoyeur » d’un accord mondial.

Cancun créa donc la surprise. Dès le 1er jour, on vit les négociateurs Su Wei (Chine) et Todd Stern (US) se plier à un tacite pacte de non-agression verbale -c’était nouveau. Les scientifiques furent d’autre part plus écoutés, leurs chiffres alarmants poussant au compromis. Avec tous les records de chaleur battus en 2010, même l’objectif de Copenhague (couper d’ici 2020 les émissions de 7000MMm3), ne suffirait plus. Le réchauffement prévisible d’ici fin du siècle est désormais estimé à 3°, annonceur de très gros soucis alimentaires. Pour maintenir ce mécanisme à un niveau viable sous la barre des 2°, il faudrait trouver 5000 MMm3 de plus à réduire—à se partager entre nations…

Or à Cancun, tandis que USA et Chine enterraient la hache, d’autres perdaient patience : Japon, Russie et Canada prétendaient se retirer en 2012 d’un accord sans participation sino-US, et des petits pays comme la Bolivie d’Evo Morales, se lançaient dans un absolutisme sans espoir… C’est alors que Pékin fit ses propositions spectaculaires, suggérant qu’elle était prête à faire passer ses coupes volontaires d’émissions sous le pot commun du régime «contraignant» -scénario qu’avait prédit en 2009 J.L. Borloo, alors patron de l’environnement français. Sur l’autre domaine capital des contrôles des coupes, Pékin acceptait enfin le principe de la transparence et d’une vérification internationale. La Chine faisait ces efforts désespérés, pour obtenir une extension de 2 ans du protocole de Kyoto, laissant ce temps aux USA pour voter leurs réductions d’émissions. En fait, à peine émises ces concessions, comme effarée par son audace, Pékin revenait en partie sur elles. Pour elle-même et pour les PVD, elle maintenait son exigence de liberté totale de pollution et de maintien du protocole de Kyoto, et côté contrôles quelque chose de lourd pour les pays riches, léger pour elle-même et autres «pauvres». Faisant dire à Todd Stern que dans ce new deal chinois, il ne voyait rien de nouveau.

Il n’empêche : la brèche était faite, et la présidente mexicaine du COP16, P. Espinoza, sut s’y engouffrer, offrant le 10/12 un compromis qualifié d’«habile» par la ministre française N. Kosiusko-Morizet. Après une seconde nuit blanche, l’assemblée plénière des 194 pays adoptaient le texte.

Un préambule réitérait l’objectif de contenir le réchauffement à 2° (révisable à 1,5°) et confirmait un fonds de 100MM$ pour soutenir les pays sauvegardant leurs forêts.

Une 1ère résolution prolongeait Kyoto de 2 ans. Une 2de résolution détaillait les promesses de contribution des USA et ceux des pays en développement (entendez, de la Chine) : encore non contraignantes, mais pouvant le devenir, lors du Sommet de Durban (Afrique du Sud) en 2011. Ainsi naissait enfin, dans la douleur, le socle d’une future politique commune, la première de la planète Terre.

 

 

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