Temps fort : La grande bataille : général hiver contre blackout !

Alors que la Chine du Nord renoue avec les froids sibériens, charbon, gaz et diesel viennent à manquer depuis septembre. A Pékin, le gaz en bonbonne est rationné et enchéri de 11%. Partout à travers le pays, se multiplient les queues aux pompes à diesel. Éternelles perdantes face aux chaînes d’Etat, 2000 stations privées ont fermé dans le sud. A Hohhot, les camionneurs n’obtiennent plus leur demi-plein que moyennant bakchich de 50¥. A Chongqing, les crématoriums ferment, faute de fuel…

Tout ce désordre ressemble à une réaction en chaîne. Le diesel manque, racheté par des PME forcées d’assurer seules la part d’électricité que le réseau cesse soudain de leur fournir. Elles produisent même à perte, ou sans profit, juste pour garder leurs clients à l’export, comme cette firme de surgelés de Wenzhou (Zhejiang), qui selon Xinhua achète en catastrophe un groupe électrogène pour produire 60.000Kw/h que le réseau ne lui fournit plus, l’ayant rationné à 60% de ses besoins.

L’été dernier, quand devint clair que l’objectif quinquennal de coupe de 20% d’«intensité énergétique» ne serait pas atteint, Pékin intima aux provinces de tenir leurs quotas coûte que coûte – par le biais des blackout (baisses de tension). Précisons que paradoxalement, l’effet est inverse de celui recherché. A usage égal, cette électricité, produite hors centrale, dégage beaucoup plus de CO², tout en dévorant les profits de l’industriel. Le seul qui s’y retrouve est le cadre, en train de couver sa promotion de 2012.

Cependant l’analyse de la crise va plus loin. En profondeur, un lien subtil associe la pénurie du gaz, à celle du diesel et du charbon, selon l’analyste Han Xiaoping (cité au SCMP). Même les centrales, quoique supposées travailler moins, ont bien du mal à trouver leur houille, qu’elles viennent négocier jusqu’aux portes des fournisseurs du Shanxi ou du Shaanxi. D’aucuns craignent un hiver de «glaciation de 1000 ans» – quel que soit le fondement scientifique du pronostic. Mais avec une production de 3,2milliardsde tonnes (plus de 2t par habitant!), la pénurie est improbable. Elle est pourtant ressentie, explicitée par la hausse du charbon, à Qinhuangdao, de 30 à 50% et 750¥/t, prix sur lequel s’alignent gaz, légumes sous serre…

La vraie difficulté tient au transport ferroviaire, sur une moyenne de 600km entre mine et centrale, qui sature les rails au détriment d’exports à valeur ajoutée (ce qui retarde l’enrichissement de la Chine de l’intérieur), sans même parvenir à couvrir les besoins. A la moindre tension, c’est la pénurie et le stockage de panique. D’autre part ces centrales à charbon, sur qui pèsent 71% de la production d’énergie, ont pour partenaire un acteur unique qui leur dicte les prix : State Grid, de loin le plus riche groupe du pays. Le prix est bloqué, suivant les consignes du Conseil d’Etat qui craint… l’inflation. Mais de la sorte, les groupes électriciens se voient privés de fonds pour se rediversifier vers des énergies renouvelables et de masse.

Au XII. Plan, le Conseil d’Etat veut arracher le pays à la fausse fatalité de la dépendance houillère. D’ici 2015, il veut brider la hausse d’extraction de 5 à 7% (à 3,8 milliards de tonnes). L’intensité énergétique elle, doit baisser de 17,3%. L’expert Han croit l’objectif possible, mais sous une condition : la rupture du monopole de State Grid. Mesure qui, semble-t-il, figure en bonne place sur la liste de celles que gouvernement actuel ne veut prendre en aucune circonstance—sauf celles extrêmes, peut-être, en cas de rupture du système…

 

 

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