Les crues du Sud-Ouest, la sécheresse de l’été n’ont pas empêché une récolte «égale» à 2009 (531Mt), selon le ministre Han Changfu.
Seul souci, le riz en recul, devant le blé et le maïs, face à la mutation alimentaire mondiale vers le pain (blé) et la viande (maïs). Le déficit en riz pourrait d’ailleurs s’aggraver : planté trop tard, il pourrait en plus souffrir de gelées précoces, avant sa récolte.
Au reste les aléas climatiques ont fait flamber tous les prix, rappelant la pénurie de 2008, causée par l’urbanisation, le réchauffement et le désinvestissement mondial en agriculture. Le blocage de l’exportation russe de grain cet été a inspiré des importations, à prix d’or : blé (845.000t) au 1er semestre, riz (+44%), coton. L’import de maïs atteindra 3Mt en 2011, 15Mt en 2015, rien que des USA. Le vieux défi du pays est de maintenir 95% d’autosuffisance (on ne parle même plus de 100%). Il faudra au bas mot produire toujours plus, soit 10Mt de plus en 2020 avec toujours moins :
-moins d’emblavures, 0,9 M hectare/an perdus depuis 1998. L’Etat s’est fixé une « ligne rouge » de 120Mha à ne pas franchir— à 121,7M hectare cultivés, on y est déjà !
-moins d’eau, avec un manque de 30MMt en 2009, dû aux systèmes d’irrigation périmés,
-moins d’hommes, avec 23 millions de paysans en moins en 2009—soit un total de plus de 200M, d’ici 2020.
-moins d’argent, vu la dette provinciale 1200MM$ (20% du PIB), en plus de celle de l’Etat, 1800MM$ (30%).
Cependant il y aura plus de fonds alloués aux paysans—l’Etat n’a pas d’alternative à ce choix politique du tandem Hu/Wen :
[1] 2,3MM$ en 2009 en primes directes aux équipements,
[2] 8,5MM$ en 2011, aux écoles, au nom des «trois gratuités» aux enfants pauvres (livres, allocations, repas).
[3] 125MM$ sur 3 ans, à la santé, pour rénover/bâtir 1000 hôpitaux de canton, former les médecins, accélérer le déploiement de régimes simples de Sécurité sociale/retraite (100M d’affiliés fin 2010, selon Yin Weimin, ministre de la Sécurité sociale)…
D’autres mesures sont : la hausse des prix publics du riz et du blé (5 à 8% en 2011), l’accès internet de 30.000 sites web agricoles pour seulement 105millions de ruraux (15%), au contraire du téléphone mobile et TV (96%).
Enfin, la banque pénètre dans l’agrobusiness, chinoise (ABC, Chongqing-Rural, Postal Savings etc) ou étrangère, Santander/CCB, BEA, Stanchart ou HSBC, laquelle compte déjà quatre agences… C’est évidemment une révolution verte, soutenue par l’épargne des migrants et 10 ans d’énormes dépenses d’infrastructures : écotourisme, urbanisation, reboisement font qu’un bourg, tel Huzhou (Zhejiang) avance un revenu/habitant de 11 745¥/an, double de la moyenne paysanne avec 88% de revenus non agraires.
Autre phénomène, la terre prend une valeur telle à la côte, que 9/10 des étudiants de Yiwu (Zhejiang) préfèrent garder leur identité paysanne « Hukou », pour avoir droit à un lopin qu’ils font bâtir, ce qui les rend à 20 ans propriétaires d’un bien de 5M¥… plus qu’ils ne pourraient espérer gagner de toute leur vie avec les salaires locaux !
Le pouvoir semble donc tout à fait dynamique face aux campagnes—à une exception près, qui est de taille : il vient de buter sur le droit du paysan à hypothéquer sa terre, et ainsi la réforme du droit foncier.
C’est trop pour Hu Jintao—ce sera pour ses successeurs.
Sommaire N° 36