A la loupe : Population : La grande envolée des nids vides

A en croire l’assurance britannique BUPA, 30% des Chinois dépriment à l’idée de vieillir. Et selon Jing Jun, chercheur à l’université Tsinghua, les suicides de septuagénaires ont plus que doublé en 20 ans, à 33/100.000 en 2002-2008. Partout à travers les villes, des personnes âgées, avec tabouret et ciseaux, offrent une coupe de cheveux à une poignée de yuans: leur «retraite» ! Encore, ceux-là sont organisés. D’autres vivent dans l’indigence. Ainsi, alors que son vieillissement est annoncé, la Chine n’y est pas préparée!

En 2009, les sexagénaires et au-delà sont 167M dont la moitié sans pension: 12,5% de la population, qui sera 31% en 2050, à plus de 400M. C’est au village que la crise est le plus aigu: avec l’exode des jeunes vers la ville, ils sont 70% dont 81% sans pension. Et s’ils ont poulailler et potager, ils ont aussi les jeunes petits-enfants à charge.

La part matérielle de leur misère est claire : absence de pension (ils ne sont que 15M à cotiser, contre 325M en ville), d’hôpital ou centre d’accueil. Les enfants restent à charge pour 10% d’entre eux en permanence, 30% par intermittence, selon un sondage de la CASS (Académie chinoise des Sciences Sociales) à Canton.

Mais leur plus grande souffrance semble être morale, liée au syndrome du «nid vide». 62% des vieux vivent seuls en ville.4 8% d’entre eux reçoivent leur fils en visite une fois/ semaine, 28% une fois/mois, 24% une fois/an. 75% déplorent l’absence de soutien affectif de l’enfant, exprimant une sorte de réserve à se parler -même parmi les familles réunies: un grand-père dans cette situation déclare avoir été 2 mois malade, alité sans que le fils s’en aperçoive.

La Chine est fortement sous-équipée. Pour ses 2,6M de 60 ans et +, Pékin n’a que 30.000 lits et 90.000 demandes : on meurt souvent avant d’y arriver. Le pays ne compte que 30.000 diplômés en gériatrie (il en faudrait 10M), 38000 homes et 2,4M de lits, face aux 28M d’impotents qui devraient être admis en priorité…

Mais des débuts de solutions apparaissent. Sous le stimulus du ministre de la santé Chen Zhu, 20.000 centres d’assistance légale se bâtissent, et 40.000 écoles de formation gériatrique. Pékin en 2010, recrute 3000 assistantes sociales, pour plus que doubler les 2000 déjà en place.

L’assurance la plus sure, pour qui peut payer: investir dans plusieurs appartements et vivre des loyers. Shanghai, la ville qui vieillit le plus vite, est la plus avancée, avec des centres d’accueils offrant 2 repas chauds par jour à 8¥/pièce, en cantine ou livrés, fournissant aussi un exam médical quotidien et des activités. Les vieillards atteints d’Alzheimer sont équipés de GPS permettant de les retrouver (à 1000¥ l’appareil, au frais de la famille). La ville est aussi en train d’ouvrir un centre de recherche gériatrique, pour préparer un avenir à 20 ans de là, où ses 3M de sexagénaires auront doublé, et leur proportion dans la population urbaine aura passé de 20% à 30 à 35%, selon la croissance de la métropole d’ici là.

C’est la terrifiante pyramide inversée, la tendance « 4-2-1 » : d’ici 2050, un jeune devra financer, par son travail, les pensions de quatre vieillards. Pour y faire face, le ministère et la Commission nationale du vieillissement étudient les systèmes d’Europe, pour s’inspirer des plus performants : le modèle français, nous dit-on, a le vent en poupe !

 

 

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