Voici venir le temps des fêtes, de la Mi-automne (Zhongqiu 中秋 22/09) et de la Fête Nationale (Guoqing 国庆1er/10), issues d’une refonte des congés en 2008, pour étaler les semaines d’or qui entassaient la population à la queue leu leu, derrière les tiroirs-caisses, sans vraiment les reposer.
En est ressorti un curieux calendrier, 7 séries de jours ouvrés et fériés. Les gagnants sont ceux qui cette année, font le «pont» et partent 16 jours, hors de Chine. Les autres, 210M, visitent localement: Pingyao, Suzhou, Hainan! A elle seule, Shanghai attend un essaim de 8M de touristes, +40%.
Côté trafic routier, c’est embouteillage et bouchon. Dès le 17/09, Pékin haletait sous 140 engorgements (4,5M de voitures) malgré l’interdiction de rouler pour 20% des voitures/jour. Et le hasard voulait que tombe, le 22 septembre, jour férié, la 4ème journée mondiale sans auto, à laquelle se pliaient difficilement 110 villes…
Selon l’usage, la police fait avant les fêtes la purge des salons de thé, massage, karaoké. Rien qu’au Shanxi,1900 sites furent nettoyés : 296 cadres, cueillis en de tels lieux, furent limogés, (auto)-critiqués, rétrogradés ou rééduqués.
Les gâteaux de Lune (月饼) sont l’offrande de saison. Ronds, dorés, emballés luxe, ils font jusqu’à des milliers de ¥uan le coffret, 10-20% de plus qu’en 2009, à cause de l’envol des prix des denrées. A 1² en moyenne par citoyen, il s’en vendra 250.000t ce mois-ci. Les inspecteurs d’hygiène, qui veillent, en ont fait retirer 9,5 tonnes avariées.
Chacun connaît la légende du Zhongqiu (15e nuit du 8e mois lunaire): celle où Houyu, l’archer puni pour avoir tué 9 des 10 oiseaux-soleil, peut rejoindre Chang’e, sa femme recluse sur la Lune (pleine) en son palais de glace.
Pendant ce temps là, un autre sujet, nettement plus grave, se poursuit : la crise avec le Japon, après qu’il ait arraisonné (7 /09) un chalutier chinois au large des îles Senkaku-Diaoyu.
Affaire complexe: Tokyo n’a pas donné ses raisons à la saisie, ni avoué d’où était parti l’ordre, des garde-côtes ou de S. Maehara, le bouillant ministre des Aff. Étrangères. Mais pourquoi une saisie si risquée en une zone de souveraineté contestée et à 11 jours du 79ème anniversaire de l’invasion japonaise? D’autres questions s’imposent côté chinois: le pêcheur était-il en mission secrète? Pourquoi avoir tenté d’enfoncer les coques des deux vedettes? Faute de réponse, impossible de dire si l’incident était dû au hasard ou à une provocation.
Mais l’escalade se poursuit. Pékin coupe tous les échanges : 1000 étudiants nippons sont désinvités à l’Exposition Universelle de Shanghai, et à New York à l’ONU (22/09), Wen Jiabao précise qu’il ne rencontrera pas Naoto Kan, son vis-à-vis nippon. La presse étale (23/09) la mort «de désespoir» de la mère du capitaine, et la police interpelle à Shijiazhuang (Hebei) quatre Japonais pour «espionnage». Pour l’instant, la rue ne s’active pas trop sur l’ambassade nippone convertie en Fort Knox. Comme si elle s’ intéressait moins à cette crise qu’aux congés, ou au coût de la vie.
Un 3e acteur reste en retrait, les USA muettement satisfaits. Joe Biden, le vice-président peut rassurer Tokyo (21/09) de la solidité de leur alliance, même en cas de conflit armé : à New York, on assiste à un rapprochement sensible des pays d’Asie Pacifique et des Etats-Unis (cf brève, p.2). Et Pékin, qui là, n’est pas gagnant, tente de limiter les dégâts en avertissant Washington (22/09) de s’occuper de ses affaires…
Enfin, vendredi soir, Tokyo jetant l’éponge sous la pression intense chinoise, libérait l’homme, renvoyé samedi à l’aube par avion spécial vers le continent. Ce qui n’empêchait Pékin, jouant très ferme, de revendiquer d’impossibles excuses nippones pour l’arrestation… A l’évidence l’affaire, qui explicite la vertigineuse montée en puissance de la Chine sur sa région, n’est pas terminée, et promet déjà de laisser des traces durables dans la relation bilatérale.
Sommaire N° 31