Temps fort : L’Euro raboté—le Yuan secoué!

Durant 10 ans, la Chine a rejeté toute pression à la réévaluation, défendant sa parité à 6,83¥/1US$. Mais elle n’a pas pu empêcher, de janvier à mi-mai la hausse du ¥uan sur l’²uro de 14,5%, ce qui porte des nuages noirs dans son ciel.

Le 17/05, la bourse de Shanghai chute de 5%, et de 21% depuis janvier. C’est la 25ème phase de repli depuis la création en 1990 de cette place en mal de stabilité.

Sur la scène de la jeune carte de crédit chinoise, qui comptait 2,17milliards d’unités en mars, la mauvaise dette (à 6 mois de retard) augmente de 14,4% au 1er trimestre (8,8MM¥), signe d’essoufflement de la capacité d’achat.

En avril, les tarifs de l’immobilier ne donnent pas signe de reculer face à l’arsenal de nouvelles mesures dissuasives : à Pékin, ils montent de 14,7%.

Autres nouvelles mitigées : l’explosion du cours des légumes (+44%), suite à l’hiver long et rigoureux. Idem, d’ici l’été, réagissant à un début de reprise, le minerai de fer importé augmentera de 30 à 50%. Les analystes en attendent une inflation de 3% en mai, succédant aux 2,8% d’avril. Mais ces 3% sont le plafond que le Conseil d’Etat avait fixé pour l’année : ils devraient le forcer à réagir, en rehaussant enfin les taux d’intérêt. Il s’en abstient encore, sous le lobbying des pouvoirs locaux (nécessitant l’immobilier pour se financer), de l’exportation (ayant besoin de prêts pour avancer les frais des commandes) et des grandes entreprises d’Etat. Pour compenser à l’avance les provinces pour ce crédit plus cher, Pékin leur alloue 2,45MM$ en aide au logement à bas prix.

L’enchérissement du crédit punira aussi les créations d’emplois, à un mauvais moment, alors qu’arriveront en juin 6,3M de néo-diplômés sur le marché du travail…

Sous toutes ces pressions, le 1er ministre Wen Jiabao ne cache pas son incertitude, évoquant (16/05) « beaucoup de dilemmes, et de conditions internationales extrêmement complexes » : c’est de l’effritement de l’² qu’il parle, lequel devrait repousser au moins jusqu’à l’été, voire pour l’année la réévaluation du Yuan.

En effet, la baisse de l’² favorise « ses » industries par rapport à celles en $ (ex: Airbus coûte en Chine 14,5% de moins, par rapport à Boeing). Elle multiplie aussi les annulations de commandes d’importateurs frappés par la perte de leur marge, et d’exportateurs incapables de trouver les crédits de pré-paiement : dans ces conditions, toute réévaluation se traduirait par des pertes supplémentaires de marché en Europe, et donc d’emplois chinois… Selon Yan Jin, économiste à la Standard Chartered, le surplus commercial sur l’Union Européenne en 2010 atteindrait 100MM$, soit la moitié de 2009 et le tiers de 2008. Or ces échanges, qui atteignaient 134MM$ l’an passé, font 16% du commerce extérieur chinois. …

En résumé: pour la 1ère fois, la Chine est incapable de jouer sur l’avantage-prix, au moment précis où par ailleurs son immobilier ne répond plus aux commandes, et où sa bourse joue au yoyo, un jour globalement déprimée, l’autre jour guillerette sous la rumeur d’une mitigation du plan d’austérité.

Selon Andy Xie, le pouvoir doit ramer pour protéger un marché immobilier souffrant de 10 à 20M d’appartements invendus, dont l’investissement pourrait valoir 10 trillions d’² (3 ans de PIB: énormément surévalué)… Face à un tel risque, ses options semblent limitées —surtout depuis que vient de surgir d’Europe la réévaluation «a contrario » de son ¥ : il doit à présent la subir, faute de l’avoir lui-même programmée au bon moment.

 

 

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