Temps fort : Immobilier – la locomotive folle

Le bilan de conjoncture du 1er trimestre réservait aux analystes deux surprises, une bonne et une mauvaise.

La bonne d’abord: la Chine dépasse tous les pronostics de retour en santé avec une croissance de 11,9% ce trimestre, dépassant les 10,7% du 4ème trimestre de 2009. L’export augmente de 28,7% (sur un an), l’automobile de 76%. Les autres chiffres sont tout aussi enrobés de caramel : durant ces trois mois, l’investissement général a augmenté d’un quart, l’urbain de 26,4%, et en mars, la production industrielle a monté de 18%, tandis que l’inflation baisse à 2,4%, 0,2% de moins qu’en février. En bref, la Chine caracole, loin devant le peloton des nations, et générera 33% de la croissance mondiale cette année, croit l’OCDE.

Tout est relatif : cette croissance miraculeuse partait de très bas (+6,2% un an plus tôt). De même, l’effritement de l’inflation s’explique par le repli saisonnier de la consommation après la fête du printemps. Il n’empêche: en augmentant de 5% le carburant (14/04), l’Etat affiche une confiance royale : l’indice des prix étant «fondamentalement stable» (Li Xiaochao, porte-parole du Bureau national des Statistiques).

Cela confirme le sentiment général. Alors que la Chine surfe sur la vague, le moment est idéal pour rehausser le cours du ¥—pour réduire sa note de produits de base importés (+17% en mars), et investir dans la confiance avec un Occident excédé de la voir lui faire porter l’essentiel de la crise par son bouclier protectionniste.

La mauvaise nouvelle: selon la Coface (assurance crédit), le spectre du trafic triangulaire est de retour, où fournisseurs, industriels et distributeurs se paient plus tard et plus mal. Ils sont 24% à souffrir d’impayés de plus d’un an (double de 2008), et 55% de plus de 60 jours. Dès lors, ils sont 80% à «solder» les dettes, contre deux- tiers un an plus tôt. Les firmes se livreraient à ce jeu délétère, du fait d’une culture du crédit (post socialiste), exacerbée par le repli sur le marché intérieur.

Autre point : l’investissement immobilier a augmenté ce trimestre de 35%. Le prix de vente dans les 70 plus grandes villes a pris + 11,7% en mars, contre 10,7% en février et 9,5% en janvier, quoiqu’on ne construise quasi plus, faute de terrain encore disponible. La demande qui reste vive, et solvable, se reporte donc sur le marché de l’occasion (+32%). A la foire immobilière de printemps de Pékin, il s’est vendu pour 10% de moins (pour 2,9MM¥) qu’en 2009, mais au prix moyen de 21,164¥/m² contre 11,566¥… Même tendance relevée à Shanghai, le pouvoir, dans sa tentative de refroidir le marché, ne parvient pas à se faire entendre.

Ultime remède, dans l’espoir d’éreinter les spéculateurs, le Conseil d’Etat vient d’imposer un apport en cash de 50% pour tout achat secondaire et un prêt à 110% minimum du taux de la Banque populaire de Chine. Il tente aussi d’étrangler les compagnies financières parallèles, créées par les provinces pour contourner l’interdit aux banques d’alimenter leurs projets. Selon Ting Liu (Merrill Lynch), leur endettement serait, fin 2009, de 750MM², égal de la dette publique centrale (et 21% du PNB). Pékin vient d’ordonner aux banques de lui remettre d’ici juin un audit détaillé de chaque prêt passé, se réservant d’imposer une révision des conditions, comme une hausse de l’hypothèque.

Mais face à la course au béton et l’endettement d’endroits tel Chongqing (cf p.3 « Bilan pour Chongqing et son Maître BO »), on se dit que Pékin aura du mal à faire plier toutes les provinces à sa discipline…

 

 

 

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