Temps fort : Les petites brassées de la Chine vers l’Océan Arctique

L’été 2010, le vieux Xuelong, brise-glace racheté à l’Ukraine fera route vers le pôle, pour sa 4ème expédition arctique. Sur place, il communiquera avec la base chinoise de Ny-Ålesund (îles Svalbard, Norvège). Et dans trois ans, le pays lancera son nouveau brise-glace de 8000 tonnes, construit localement sur design étranger…

Tels sont les signes de l’intérêt de la Chine pour la région polaire, grandissant à mesure de la fonte des glaces, et d’un dégel inéluctable (conséquence du changement climatique) vers 2020-2030, alors que 50% de son PIB passe par la navigation. Dans son étude réalisée pour le SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute) Linda Jakobson, chercheuse, constate qu’une traversée de Shanghai vers Rotterdam, via le détroit de Behring, économiserait 6400km, et que celle vers New York s’avèrerait à peine plus longue que la route classique vers Los Angeles (cf. notre carte).

D’autres atouts ne peuvent que faire rêver Pékin, dans sa soif insatiable en ressources nouvelles : hydrocarbures, métaux rares sont détectés sous la banquise. Cet attrait fait d’ailleurs craindre à un colonel Han Xudong «des conflits dans l’Arctique sous 5 à 10 ans, suite à des disputes de souveraineté»: via leurs ZEE des 200 milles, selon le droit de la mer, cinq pays monopolisent 88% des richesses connues. Réunis en Conseil Arctique, Canada, USA, Russie, Danemark et Norvège laissent l’ONU légiférer sur la zone, mais revendiquent d’avance sa propriété et y renforcent leur présence militaire, surtout la Russie qui y fait quadriller ses patrouilles aériennes et y a immergé ostensiblement un drapeau national, en août 2007.

Face à cela la Chine joue la prudence. Elle reconnaît les droits des pays riverains, tout en affirmant le besoin, face à cet Arctique «patrimoine de l’humanité, d’affiner le droit international » dans le sens du respect des droits des autres nations. Ce qui, au passage, pourrait être la position d’autres régions non riveraines telle l’Union Européenne. Ce que la Chine redoute, est l’imposition de droits de passage élevés par la Russie, la plus assertive dans sa prétention d’exploitation exclusive de « sa » part de l’Arctique.

Dans les faits, ces espoirs sont prématurés : [1] Les bas-fonds de Behring fermeront la route aux super tankers, les icebergs la rendront dangereuse et lente : les primes d’assurance ne seront pas forcément moins lourdes que celles de la route de Malacca, décuplés en cinq ans sous les frappes du piratage.

[2] Le reste du monde voudra et aura les moyens de contraindre les riverains à partager cette richesse voire à garantir la protection de cette « pompe à oxygène » et « pompe à froid » de la planète bleue.

Aux yeux scandinaves, le dégel offre une chance exceptionnelle vis-à-vis de la Chine : celle de s’en faire entendre, avec enfin une monnaie d’échange à faire valoir: l’offre de JV polaires minières et de transport, où ils apporteront leurs droits souverains et leurs technologies!

NB : Pékin vient de faire un pas vers son rêve arctique, en louant «pour 10 ans» à la Corée du Nord le port de Rajin. Rouvrant ainsi à son Dongbei une porte sur la mer du Japon, fermée depuis le XIXs, suite à une guerre perdue. Désormais, le Jilin est à 10h de Niigata (Japon), et bien plus proche des routes polaires vers l’Europe et l’Amérique…

 

 

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