Pour la 2ème fois depuis décembre, la Banque Mondiale (BM) revoit à la baisse son pronostic de croissance pour la Chine, à 6,5% en 2009. Ce qui ne l’empêche pas de la féliciter pour son plan stimulus, affirmant qu’il réussit : la Chine sera un des rares pays en croissance cette année, et 75% du mérite en reviendra aux dépenses de l’Etat.
Pourtant après 4 mois d’exercice, nombreuses sont les critiques de ce plan. Les media en dénoncent l’opacité et l’exclusivité octroyée aux firmes publiques, qui se permettent même de chasser de leurs métiers traditionnels des firmes privées. Même la Banque Mondiale ose conseiller à l’Etat un peu de dérégulation de son corset financier.
Ailleurs, des économistes ne se gênent pas pour parler plus clair, comme Andy Xie dans Caijing : « c’est la réforme, pas le cash qui nous sortira de la crise ». Pour lui, la chute de la consommation en Chine, à commencer par l’immobilier, vient non d’une méfiance des ménages mais de la faiblesse de leur revenu. Radicale, sa solution consisterait pour l’Etat à [1] distribuer aux citoyens ses actions dans les firmes d’Etat. Par exemple, en ouvrant automatiquement des comptes individuels dans les banques, sur base des cartes d’identité. [2] L’inventaire immobilier invendu (voir ci-dessous) devrait voir ses prix cassés à 1,5 mois de salaire par m², perte sèche supportée conjointement par le promoteur et l’Etat. De la sorte, l’Etat transférerait son patrimoine aux consommateurs, qui s’empresseraient, pour « 10 à 15 ans » de recommencer à acheter de l’immobilier et d’autres biens, relayant ainsi effectivement les recettes d’exportation perdues.
Ailleurs, cinq économistes publient un autre plan de contre-stimulus en 14 points, basé sur des prémisses identiques: « la crise vient de l’étranger—mais sa solution passe par le règlement de vieilles contradictions intérieures », disent Chi Fulin, Président d’un Institut de recherche économique de Hainan, et Chang Xiuze, analyste à la NDRC, la commission nationale de développement et de recherche.
Pour se donner la chance d’arracher la Chine à sa panne, la Chine devrait promulguer avant l’été la dérégulation des prix de l’eau, du sol, du bois forestier, de l’électricité, du carburant : les doter d’un prix (et d’une taxation) non plus mijotés en ministères, mais basés sur le marché, avec un correctif pour refléter leur rareté. Les auteurs proposent aussi d’ouvrir au secteur privé les portes des chasses gardées de l’Etat, tels les chemins de fer, l’aviation, l’énergie. Ainsi devrait être baissé le seuil d’investissement exigé en ces secteurs. De même, en chemin de fer, firmes exploitantes et pouvoirs locaux devraient reprendre au ministère la gestion des chantiers.
En bref, derrière ces contre-mesures suggérées, se lit l’idée de profiter de la crise pour enterrer deux principes socialistes increvables, quoique non durables : le gaspillage des ressources réputées (à tort) « inépuisables », et la mainmise sur l’économie par des grands corps d’Etat perclus de lourdeur, corruption et incompétence.
Sommaire N° 9