Shanghai l’a voulue et la fera : la plus géante Expo Universelle de tous les temps, 200 pays, 250 pavillons, 100 millions de visiteurs attendus de mai à octobre sous le slogan de «ville meilleure, vie meilleure». Elle sera aussi la plus ambitieuse, au point d’en être parfois un peu dépassée : trois nouveaux tunnels sous la rivière Pu reliant les deux sites de l’Expo, ont compliqué l’évacuation des boues, la distribution d’électricité, retardé le gros-oeuvre : Pékin a dû reprendre à la mairie de Shanghai la direction du chantier.
Le résultat est un complexe vibrant sous les crépitements des soudeurs à l’arc, les ahans des maçons et grondements des bétonneuses, dont émergent déjà les structures, l’intimité joyeuse du pavillon hollandais (ruelle d’Amsterdam), la sphère lumineuse du pavillon britannique, les vasques de 30m de hauteur du boulevard de l’expo, la soucoupe volante du théâtre à 280M$ pour 18000 places, appelé à porter le nom de Benz en 2011 et à accueillir les show-matchs de basket-ball de la NBA.
Formule obligée par l’écart de richesses des nations, l’expo se décline en trois classes : celle des 42 pays qui choisissent leur architecture, celle des 46 locataires d’un espace clé en main, et celle des plus de 80 pays en voie de développement qui se partagent des halles, telle l’africaine aux parois de girafes et baobabs.
Les moyens varient du tout au tout, des 8M² du joli volume belgo-européen (un neurone, terminaison nerveuse des pays de l’Union), aux 100M² du Japon, effort sans précédent. En une démarche ambivalente, nationale et altruiste à la fois, tous quêtent les regards et les investissements du monde, mais font aussi le point ensemble sur les moyens techniques et le sens de la vie dans nos villes modernes. L’usage des matériaux de pointe (membranes de revêtement, éclairages LED, fibre optique) et de végétaux évoque bien cet aspect idéaliste et militant. Chaque pays déploie un concept : la conche marine pour Israël (curieuse cloche de béton et de verre), les dunes pour les Emirats, le panier d’osier pour l’Espagne, un titanesque portique « Pailou » pour la Chine.
Avec Ville sensuelle, de l’architecte J. Ferrier, la France a choisi les 5 sens, dans un atrium ceint d’une résille minérale et habillé par la cascade d’un jardin «à la française» vertical.
Pour conserver l’intérêt durant le semestre de fastes, Maison France abritera 4 restaurants, une chaîne de télévision HD, une expo du musée d’Orsay (Gauguin, Rodin, Van Gogh) et 10 autres gadgets, tel ces mariages célébrés sur place et un concours des plus jolis mariés (1er prix : une semaine en France).
Et les Shanghaïens, comment prennent-ils les choses ? Avec bonhomie. L’immense fierté pour la promotion de leur ville. Le stress des embouteillages, de la pollution des 1000 chantiers urbains. La campagne de propagande musclée, genre « patriotisme municipal » marche plutôt bien : 500.000 jeunes se sont présentés, pour les 170.000 places de volontaires dont 60.000 sur l’expo même et les autres, en ville… En résumé : à compter du premier mai, pour six mois, un rendez-vous qu’on ne saurait rater.
Sommaire N° 40