A la loupe : Nouveaux besoins industriels—nouvelles routes de matières premières

Troisième sidérurgiste national, Wuhan Steel signe un contrat à long terme d’achat de minerai avec le groupe d’Etat vénézuélien CVG. Ni prix, ni volumes ne sont cités.

L’important ici, est que la Chine ouvre un front contre le cartel des trois géants Vale (Brésil), Rio Tinto, BHP-Billiton (anglo-australiens). En 2008, pour au moins la 2de fois, son Association interprofessionnelle a perdu la bataille, refusant le prix de -33% convenu avec les groupes coréens et nippons. Du coup, ses membres ont été obligés de se fournir sur un marché libre en hausse de 70% en 12 mois, tandis que ses stocks s’évaporaient.

Pékin exige un contrat à long terme, contrairement à l’actuel benchmark renégocié chaque année. Il vient de l’obtenir avec CVG, firme d’un allié idéologique. Mais le prix peut s’avérer très élevé, vu l’enjeu -le pays d‘Hugo Chavez sait défendre ses intérêts. D’autre part, CVG ne peut beaucoup fournir, avec ses 23Mt de capacité face aux 410Mt d’imports chinois attendus en 2010 (+11%). Mais Wuhan s’est réservé le droit de préemption sur les capacités futures, et d’autres projets chinois bien plus gros sont en route hors frontière, tel au Gabon. En créant de nouvelles sources et diversifiant ses achats, Pékin croit pouvoir changer la carte minéralière du monde, et imposer son système de prix. Elle pourrait réussir, car la stabilisation des cours est à l’avantage de tous. Mais la tendance haussière est irréversible : d’ici 2025, poussée par la Chine, la demande mondiale aura multiplié par 2,5.

——————————

Fin octobre, Transneft (Russie) inaugure son oléoduc Skovorodino-Amour (Heilongjiang), d’une capacité future de 15Mt/an. La section chinoise jusqu’à Daqing se construit -390km prêts, sur les 1000 du projet.

La Russie fait en même temps parler d’elle avec l’autre branche de cet ouvrage-mammouth «ESPO». Le terminal de Kozmino, en mer du Japon, est achevé, avec 430m de quai, 4 postes d’appontement, 17km d’oléoduc. Le premier train vient d’y arriver, avec 4320t à bord. A terme, il sera remplacé par 4700km de liaison par tube.

La branche chinoise du projet est une affaire très politique, retardée depuis plus de 10 ans par une Russie déterminée à imposer son prix, et à ne pas se lier à un client majoritaire, pouvant devenir rival. Le train a eu longtemps sa préférence, par le moindre investissement, et le fait de ne pas se lier à long terme.

Par cet ouvrage en patte d’oie, la Russie se résigne donc à l’inévitable -une intégration et coopération économique lourde avec la Chine. Mais il signifie aussi un avertissement aux clients « tous azimuts » – bien selon son style. [1] A l’Europe: son pétrole (qui va bientôt l’atteindre via un oléoduc contournant l’Ukraine par la mer du Nord), peut repartir dans l’autre sens, vers l’Asie. [2] A la Chine : elle doit compter avec la concurrence de Japon et Corée, sur ce pétrole sibérien. Moyennant quoi la Chine réalise enfin son rêve ancien d’une nouvelle route d’or noir—mais il lui coûtera cher.

 

 

Avez-vous aimé cet article ?
Note des lecteurs:
0/5
9 de Votes
Ecrire un commentaire