A la loupe : Obama-Chine : vers une nouvelle alliance

Depuis la venue en Chine de R. Nixon (1972), pas un Président américain n’a omis de visiter le pays. Mais cette mission présente d’Obama (15-18/11) est différente, frappée à l’effigie d’une époque nouvelle, aux moeurs nouvelles: celle du 1er Président noir des Etats-Unis, et de l’effondrement de leur empire financier mondial.

Depuis le 1er jour, Obama et Pékin préparent cette rencontre avec la préscience d’une étape cruciale. L’enjeu pour chacun est identique: jeter les bases d’une alliance et confiance mutuelle, là où il n’y avait que «business», et en tirer un charisme leur permettant d’augmenter leur marge d’action, face à leur opposition.

Dans un style bien chinois, cela commence par une redéfinition de la relation. G.W.Bush l’appelait «candide», -ce qui déplaisait à Pékin. Pour l’heure, les deux pays se sont entendus sur les termes un peu benêts de «positif, coopératif et intégral». Obama a été plus clair, qualifiant la Chine de «ni amie, ni ennemie, mais rivale». Le mot aurait pu blesser. Au contraire, il enchante Hu Jintao comme le Conseil d’Etat, pour son affirmation d’absence d’inimitié (c’est une nouveauté importante pour eux) et une émulation commerciale qui leur convient bien.

Obama a aussi multiplié les gestes de bonne volonté. Il s’est abstenu de voir le Dalai-Lama. Il consacre à cette visite 3 nuits, contre une à la Corée et une au Japon, les alliés de toujours (un peu mortifiés). Il a aussi qualifié de «crucial» le lien sino-US, pour tous «sujets critiques, du climat à l’énergie, de la convalescence économique à la sécurité régionale». La Chine en a conclu, par la voix du professeur de la CASS (Académie chinoise des Sciences Sociales) Tao Wenzhao, à l’évident désir d’Obama de promouvoir ce rapport. Ce qui comble son propre rêve depuis toujours. Elle ne peut donc qu’accéder enthousiastement à ce désir, et en donne un signe qui ne trompe pas : sa suggestion d’une future réévaluation du Yuan, qu’elle refusait au monde depuis 10 ans (cf édito).

En 3 jours de dialogue intense à tous niveaux, bien des sujets défileront : les offres respectives au COP 15, pour le futur plan global anti-réchauffement climatique, la prévention d’une guerre commerciale, les zones de tension régionale (Irak, Pakistan, Corée, Afghanistan), l’avenir des énormes masses monétaires imprimées et prêtées de part et d’autre du Pacifique… Et bien sûr, les droits de l’homme. Sans doute, seront évoqués les projets futuristes d’Union Asiatique, de monnaie commune, projets où l’Amérique doit trouver son intérêt -être présente!

On s’apprête à assister à la rencontre des leaders de la 1ère puissance (en déclin) et de la plus jeune (en ascension). Ensemble, ils ont un levier sur le reste du monde. Le rapprochement est inévitable et bénéfique, à condition qu’il ne se fasse pas au détriment des autres, en un nouveau Yalta. Les intérêts «impérialistes» respectifs pourraient les y conduire. Mais la sensibilité démocratique d’Obama et celle anti-hégémoniste du socialisme chinois les détournent à priori de cette voie. D’autant plus que sans un minimum d’acquiescement des autres régions du monde, un tandem Sino-américain n’a ni sens, ni chance.

 

 

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