Aux débats préparatoires (Bangkok, 29/09-9/10) du sommet climatique COP 15 de Copenhague (8/12), via son émissaire Yu Qingtai, la Chine accuse soudain les pays du Nord d’«assassiner» le protocole de Kyoto (base légale des accords mondiaux de coupe des émissions de CO2) et de «déshonorer» leurs engagements.
A l’origine du clash se trouvent les USA, qui semblent avoir opté pour percer l’abcès, et dissiper un flou en avance du COP15. Sous G.W. Bush en 1997, les USA n’avaient pas ratifié Kyoto. Or, J. Pershing leur négociateur vient d’annoncer qu’ils ne le feront pas plus en 2009, et pour la même raison : ce traité « inégal » impose des efforts aux riches mais non aux pauvres. Washington ne s’associera qu’à un traité imposant des coupes vérifiables à tous (même si les efforts des uns et des autres sont négociables).
L’Europe a décidé de suivre l’Amérique sans son dessein: d’abord, car il constitue la seule manière d’associer les USA au futur traité qui n’aurait aucun sens sans eux, second pollueur mondial. Ensuite, car elle-même souhaitait depuis longtemps une rectification des privilèges régaliens octroyés à Kyoto aux pays émergents.
Cette stratégie des USA sert aussi à faire oublier aux autres que leur loi climatique ne sera pas ratifiée pour le COP15—ils n’ont donc pas de mandat de négociation. Mais en ouvrant ce nouveau front, ils gagnent du temps.
Une conséquence est aussi claire : qu’il y ait accord ou non à Copenhague, les pays riches moins avancés que les autres (USA, Australie) en matière de programme anti-réchauffement climatique, grappilleront quelques années de sursis en réductions d’émissions de gaz à effet de serre. Les Pays en voie de développement leur demandent « 40% de coupe d’ici 2020, par rapport au niveau de 1990»). De même, les Européens n’iront pas au maximum des efforts qu’ils proposaient (35%), s’ils étaient suivis par les autres.
Le COP 15 va t’il droit au mur ? Sans doute pas, malgré les apparences, car 3 éléments pèsent dans la balance :
[1] aucun pays (et les pauvres, moins encore que les riches) ne peuvent se résigner aux conséquences cataclysmiques d’un désaccord (sous 30/ 50 ans, chute des récoltes, tsunamis, typhons, appauvrissement de la faune et de la flore);
[2] Kyoto est mourant.
[3] Il va donc falloir négocier de nouvelles bases.
Côté Européen, on ne sera pas mécontent de reformuler un traité aux principes plus équitables, abolissant par exemple ces droits d’émission octroyés aux pays en voie de développement (revendus pour des fortunes aux firmes de l’Ouest) sans contrepartie de coupes contraignantes.
Côté USA, on pourra aller devant le Congrès avec un accord présentable.
Côté « Sud», on portera les exigences sur des terrains plus réalistes : des fonds pour financer la réduction de la déforestation et la dégradation de la couverture végétale, des transferts de technologies à bas carbone. C’est là que le Nord pourra prouver sa volonté politique d’un new deal équitable avec le Sud.
NB : Gageons que le sujet sera au coeur de la visite de B. Obama à Pékin, le mois prochain. Pour le COP 15 en tout cas, ce sera peut-être la dernière chance.
Sur ce dossier, notre étude « Chine/ COP 15, quelle stratégie ?» est eclairante – contactez-nous
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