Une volée de flèches des USA contre la Chine vient d’interrompre la drôle de paix entre ces deux pays. Elle exprime l’exaspération de l’Amérique profonde envers : [1] l’insolente réactivité de la Chine face à la crise, et [2] sa propension à surprotéger ses exportations et ses surcapacités industrielles, sans assumer sa part du nécessaire grand dégraissage planétaire.
Le 16/09 R. Gates, Secrétaire américain à la défense dénonce la marche forcée chinoise vers de nouvelles armes, par satellite et via l’internet. Tandis que D. Blair, directeur de l’intelligence nationale, désigne la Chine comme une des quatre sources d’espionnage contre les USA d’ici 2013. Le 14/09, B. Obama frappait de 35% de taxe anti-dumping, pour trois ans le pneu chinois (marché d’1,8MM$ l’an passé). Et le 17/09, US Steel, suivi d’une filiale de Vallourec, réclamaient à leur tour jusqu’à 90% de taxes contre le tuyau d’acier de Chine.
Les syndicats américains du pneu accusent la concurrence d’avoir «tué» 5000 jobs en 3 ans, tandis que l’industrie chinoise crie à la menace sur 100000 emplois locaux. Et contre les tuyaux chinois, Inde et Mexique aussi ont enregistré des plaintes des producteurs locaux.
Mais la réponse américaine semble faire plus de mal que de bien: selon M. Kantor, l’ ex-«trade representative» de B. Clinton, ces trois ans de sursis accordés aux caoutchoutiers américains, n’ont aucune chance de leur permettre de retourner sur un marché du pneu à bas prix, définitivement perdu.
Obama peut avoir besoin d’attaquer la Chine, pour convaincre sa virulente opposition républicaine de sa capacité à défendre les intérêts nationaux. On lui prête aussi une autre intention: tenter de forcer la Chine à négocier avec lui une interdépendance plus profonde de leurs économies. De chercher des ententes lors du G20 de Pittsburgh (24-25/09, sur la réforme de la finance mondiale), pour le Sommet OMC de Doha (du futur traité de l’OMC, en panne depuis 2003) ; et sur le COP15, sommet anti-réchauffement global (Copenhague, décembre).
Or sur cette volonté d’approfondir la relation, Pékin est sur la même lon-gueur d’onde. Suite à la rétorsion commerciale, il a bien sûr contr’attaqué, comme toujours en ce cas, introdui-sant un recours devant l’OMC et lan-çant ses propres procédures de punition contre deux produits américains. Mais à peine la hache déterrée, les 2 parties font surenchère de modération, pour éviter la guerre. Les intérêts communs sont trop forts, tels les 24MM$ de bons du trésor américains achetés par la Chine rien qu’en juillet.
Il se trouve que les 22 et 23, avant le G20 à Pittsburgh, Hu Jintao passera par New York pour s’expliquer avec Obama, et présenter au monde une nouvelle politique chinoise de l’environnement, plus responsable et solidaire…
Autrement dit : les rapports sino-américains sont moins en tempête, qu’entre deux phases. Encore inconnue, la seconde peut déboucher soit sur un conflit lourd où personne n’a à gagner, soit de fait, vers une nouvelle alliance, comme la « locomotive franco-allemande » qui depuis 30 ans, traîne sur ses rails le train de l’Union Européenne !
Sommaire N° 30