L’automobile en Chine vient d’être tirée d’un nirvana irréel, obstinément mariée depuis cinq ans avec une croissance à deux chiffres. De retour aux réalités, 2008 a connu un électrochoc, avec une croissance de 6,7% et des fortunes très diverses, entre General Motors ou Chery (-7% chacun), Volkswagen à +12,5% (1,02M ventes, le leader), Toyota à +17% (585.000), Hyundai +25% (350.000) et Kia +36% (51.000).
C’est une mauvaise nouvelle, surtout pour l’industrie chinoise. Empêchée de s’exporter vers l’Europe et les USA, par ses faibles résultats aux crash tests, elle perd à présent du terrain sur son propre marché, suite à l’enrichissement moyen et la guerre des prix, qui mettent les marques étrangères à leur portée. Cette année, dit Cheng Xiaodong, directeur à la NDRC (National Development and Reform Commission), la valse des étiquettes atteindra -5%, privant les locaux de moyens pour faire de la recherche et combler leur retard technologique.
Pour échapper à la condition d’assembleur low cost, SAIC (Shanghai Automobile Industry Co) avait pris en 2004 le contrôle du Coréen Ssanyong : la faillite de sa filiale (voir VdlC n°01) le ramène loin derrière la case de départ, car son plan d’émancipation a fait long feu, et l’étranger y regardera à deux fois avant de lui céder d’autres actifs dans les prochaines années. Selon le mot de Ricon Xia, de Daiwa Associates, «les cas de reprises chinoises de firmes étrangères ayant réussi, sont rares» : la Chine aura encore besoin de quelques années pour maîtriser le management hors de chez elle, là où elle ne contrôle pas tout. Et la communication interculturelle avec les structures qu’ils reprennent.
Dans ce contexte, l’ensemble du marché retenait son souffle, attendant le plan de l’Etat. Publié le 14/01, ce dernier semble vouloir faire le ménage parmi les 45 constructeurs encore en lice – et faire prendre au sérieux sa politique de protection de l’environnement. Les aides visent encore surtout les nationaux, mais pas seulement.
Ainsi, seuls les moteurs d’1,6l max. (dont la 206 Peugeot) auront droit à une baisse de taxe de 10 à 5%. 730M$ de subventions iront à l’achat par les paysans de touc-toucs moins polluants. 1,46MM$ encourageront les projets high-tech et d’autres fonds, l’achat de véhicules à énergies nouvelles -telle la F3DM à moteur hybride de BYD, présentée au salon de Detroit, qui vient d’obtenir le soutien de Warren Buffett.
Après l’annonce du plan, Dongfang et Faw, les moins gâtés par ses mesures, chutaient de 6,9% en bourse de HK et 2,1% à Shenzhen… Tout se passe comme si, après 10 ans de protection sous l’aile socialiste, cette industrie poussée trop vite en couveuse artificielle, découvrait soudain l’heure de vérité : pour la 1ère fois, face à l’étranger, elle n’a plus l’avantage—l’Etat ne peut plus la lui octroyer !
Sommaire N° 2