A la loupe : Shenzhen, Shanghai – renaissance dans la douleur, sous la crise

A Shanghai et à Shenzhen, la récession offre la chance de se réinventer. Cette cure de jouvence est en fait une nécessité absolue, car elles sont déjà rattrapées par les provinces de l’Ouest, qui leur ont pris l’avantage concurrentiel.

A Shenzhen, après accord du Conseil d’Etat, cette ville la plus jeune de Chine, aux 11M d’âmes va quintupler son territoire en passant à 19000km², intégrant les cantons de Bao’an et de Longgang. Cette dotation foncière sera la «corbeille de mariage» de la fusion avec Hong Kong, d’ici 2047. L’Hinterland tout neuf permettra d’intégrer les ports et aéroports des deux villes, les PME high tech et la finance. Parmi les projets figurent la vieille idée d’une bourse des PME à risque (quoique HK l’ait déjà réalisée avec son GEM – Growth Enterprise Market), celles d’échanges de futures (marchés à terme), et d’obligations en devises et en ¥uan.

L’autre volet du plan est plus novateur. Il s’agit de refondre les 21 bureaux municipaux en trois départements de conception, d’exécution et de supervision. Décloisonner, supprimer les postes inutiles, forcer les ronds de cuir à repenser leurs services, en redistribuant plus équitablement la richesse sociale. Proposée dès 2001, cette réforme avait été d’abord enterrée par les cadres, dont elle menaçait les privilèges, mais aussi par l’aide dure du Parti, dérangée par cette apparence de concession à la démocratie : car le nouveau découpage ressemble comme deux gouttes d’eau à la classique séparation des pouvoirs entre législatif, exécutif et judiciaire. Aussi, La réforme est moins celle de Shenzhen que celle du régime entier, qui la teste derrière l’espace clos de ce territoire-tampon. Rare démonstration de l’Etat, d’une capacité à se remettre en cause !

A Shanghai, la renaissance est claire en concept, mais floue, voire en panne dans les moyens d’application. A ce 1er port du monde par le tonnage, Pékin vient d’octroyer l’objectif de se hisser d’ici 2020 au rang de hub financier et maritime mondial : Shanghai abandonnerait l’industrie pour devenir leader planétaire des services.

Mais comment faire ? En terme de service et de fiabilité, Shanghai ne peut se mesurer à Hong Kong, moins encore à Londres ou New York. Pour y parvenir, il faudrait disposer des mêmes outils que les autres : une finance (banques, bourses, assurances) ramifiée sur les cinq continents, une monnaie convertible. Or, Shanghai doit déchanter : Pékin n’a pas les moyens d’accélérer la libre convertibilité du yuan, ni l’ouverture de la finance à l’étranger, mais doit maintenir le bouclier protectionniste, au profit des provinces pauvres de l’intérieur. Il manque aussi un cadre légal aux normes internationales.

A ce vieil écueil, vient de se rajouter celui de la récession. Au 1er trimestre, Shanghai a vu son PIB, jusqu’en 2007 le plus vif du pays, chuter à +3,1%, le plus faible des provinces de la côte. Dans ces conditions, le cap vers un hub mondial en 2020 est remis en cause. Avant de rêver à l’avenir, Yu Zhengsheng, son Secrétaire du Parti doit rabattre sur ses prétentions et miser d’abord sur le sauvetage de ses industries. Shanghai l’admet à mi-voix : le seul objectif à sa portée, profitant du déclin de l’Amérique, n’est plus de devenir phare mondial, mais d’émerger comme 1ère place asiatique.

 

 

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