En Australie, le cabinet de Kevin Rudd (centre gauche) traverse une tempête, soupçonné par l’opinion de trop de sympathie envers l’empire du Milieu, voire de lui céder à vil prix les bijoux de famille.
Il faut dire que depuis le début de la crise, les démarches chinoises de rachat de mines australes se multiplient.
– Chinalco offre 19,5 MM$ pour 18% de Rio Tinto, argent qu’il se voit prêter … à 110% par quatre grandes banques (Banque de Chine, Banque de l’agriculture, la Banque de la construction et du développement et l’Ex-ImBank)
– Valin l’aciériste chinois offre 1,2MM$ pour 18% des mines de Fortescue.
– Minmetals, le consortium minier prétendait aux mines d’or, cuivre et autres minerais d’OZ, pour 1,7MM$.
Symptomatiquement, c’est juste 48h après que Pékin ait interdit le rachat de Huiyuan par Coca-Cola (2,4MM$) que Canberra a rejeté l’offre de Minmetals : soi-disant, une de ses mines était voisine d’un champ de tir militaire. En fait, le rejet du deal Coke-Huiyuan a dû influencer l’autorité australienne, qui a aussi voulu prouver à son opinion intérieure sa fermeté face à la Chine.
La presse locale, au même moment, découvrait des rendez-vous curieusement cachés par Kevin Rudd, avec Li Changchun, tsar de la propagande et Zhou Yongkang, patron de toutes les polices; des invitations secrètes en Chine, entre 2002 et 2005, de l’actuel ministre de la défense J. Fitzgibbon. Et d’autres allégations de la même eau.
Kevin Rudd justifie sa politique d’alliance avec la Chine par la nécessité : Pékin est le 1er client naturel de l’Australie, usine du monde, en besoin illimité des matières 1ères dont l’Australie est un « poids lourd » mondial.
Aussi, à peine le veto à Minmetals proféré, une version fraîche du contrat était reficelée, qui a cette fois toutes les chances de passer. De même, Valin a obtenu en 48h le feu vert pour son contrat avec Fortescue. Et concernant Rio Tinto, on tranchera « au cas par cas »: avec bienveillance, s’entend.
NB : Le malaise remonte peut-être lors du passage de la flamme olympique à Canberra en avril 2008. De tout le pays, des milliers d’étudiants chinois avaient convergé vers la capitale, portant T-shirts rouges et drapeaux chinois, inquiétant la population par leur démonstration de puissance. D’ailleurs à Lausanne, le Comité olympique international, ayant retenu la leçon, vient de bannir tout défilé de torches olympiques hors des frontières du pays hôte des Jeux.
C’est ainsi que la crise réveille à la fois des appétits de concentration financière, et les nationalismes locaux : en Asie, comme en Australie ou ailleurs. Réactions normales à pareille époque, mais aussi antagonistes, et qui nécessitent chez les politiciens plus que d’habitude, du doigté et de la capacité de compromis.
Sommaire N° 11