Le Vent de la Chine Numéro 38
La semaine passée, les relations sino-européennes ont connu un tournant, introduisant entre les deux bords un gel plus vu depuis des années. Même si la vie politique de ce régime s’accompagne d’indiscutables effets théâtraux – ou si les autres pays voient leur statut souvent muter d’«amis» à «en disgrâce». Mais cette crise frappe, car de tous les alliés de la Chine, l’Union Européenne est la plus stable, construisant avec elle toujours plus de liens juridiques, scientifiques, financiers à travers les décennies.
Le 26/11, « jour J-4 », la Chine décréta le report unilatéral du Sommet euro-chinois qui devait réunir les 27 leaders des Etats-membres à Lyon le 1/12 : Wen Jiabao et ses 150 patrons d’affaires se décommandaient, gelant toutes les commandes en cours—y-compris 150 A-320 et A330 (Airbus démentait que cette intention d’achat soit compromise). La raison de l’orage était dite: la Chine n’avait « pas le choix », suite aux rencontres annoncées entre des leaders de l’Union dont Nicolas Sarkozy, son président en exercice, avec le Dalaï-Lama.
Sur les causes du clash, il faut d’abord relever un problème de méconnaissance de la Chine par Paris, sous l’angle psychologique et des techniques de rapport. La Chine peut supporter un refus net à ses exigences, mais non des louvoiements. Sur la question du Tibet et des Droits de l’homme, Sarkozy avait commencé par menacer de boycotter les JO, puis s’y était rendu. Puis il avait délégué « sa » rencontre du Dalaï-Lama à son épouse C. Bruni, puis à son ministre des affaires étrangères B. Kouchner, avant d’oser annoncer qu’il le rencontrerait directement. Tout en tentant de désamorcer cette bombe, en la parant du titre plus innocent, d’« échange de vue avec des Prix Nobel dont Lech Walesa »… Pour la Chine, tous ces mouvements maladroits étaient autant de double langage.
Pour autant, ce report a éveillé en Europe une furieuse polémique, flot de critiques contre l’atteinte à la souveraineté des nations et la tentative de pression.
A froid, cependant, elle semble intempestive : ce camouflet chinois sanctionne un « délit » à venir, et prétend punir tous les Etats-membres, pour l’action d’un petit nombre. Ce qui ne peut que créer une unanimité contre la Chine, peu propice aux compromis futurs.
Au même instant, les leaders chinois, avouant que la récession frappe « plus fort que prévu », tentent de prévenir la montée dans le monde d’un sentiment protectionniste, dont elle sera la 1ère victime : sous cet angle, l’annulation du Sommet est maladroite. Selon Valérie Niquet, directrice de l’IFRI, « Malgré la crise (…), la hiérarchie idéologique l’emporte sur celle d’une grande puissance responsable»: dans la décision, la vieille garde du Parti a pesé plus que la relève des jeunes formés en relations internationales et en économie.
Or, ce jour même (26/11), la Banque centrale lançait une autre initiative aux effets au moins aussi forts à travers le monde, en édictant sa plus lourde baisse des taux d’intérêts en 11 ans, de plus de 1%, pour un taux à un an de 5,58%. Ce signal très bienvenu fit remonter les places boursières (européennes, mais aussi le HK Stock Exchange, qui monte de 9,7% dans la semaine). La simultanéité des deux actions, l’une négative, l’autre bénéfique ne peut être due au hasard : on reste sur l’impression que la Chine a voulu contrebalancer la première, par la seconde !
Fondé en -482 par Thémistocle, le plus vieux port d’Europe, Le Pirée vient de prendre un coup de jeune en devenant chinois, deal signé (le 25/11) à Athènes, en présence du Président Hu Jintao.
En trafic voyageurs, Le Pirée dessert les îles (19M passagers/an, 3ème port mondial), et en fret, les Balkans et l’Asie, avec 1,37M de « boites » EVP traitées en 2007. Quoique la Grèce tienne 20% de la flotte mondiale, et quoique Le Pirée soit 1er port de l’Europe du Sud-Est, sa croissance était jusqu’alors bloquée par :
● l’indifférence de ses armateurs, émigrés entre Alexandrie, Londres et NY, et celle des investisseurs d’Europe du Nord,
● un mouvement syndical déterminé à bloquer tout changement à son statut privilégié. Par ses actions de grèves et procédures ju-diciaires, il a retardé de six mois le transfert de propriété. Il serait intéressant d’ailleurs, d’entendre son avis sur la Cosco, firme d’Etat d’un régime socialiste, qui vient du bout du monde lui briser son « bol de riz d’acier », en un style capitaliste de choc.
Mis à l’encan par le gouvernement Caramanlis (la compagnie portuaire publique OLP), Le Pirée est emporté par Cosco Pacific, 5ème opérateur mondial, qui souffle la place au n°1 Hutchison (HK, du tycoon Li Ka-shing). Pour la concession de 35 ans, Cosco paiera 1,1MM², incluant 7 fois la valorisation boursière et 620M² en travaux sur les terminaux 2 et 3 (fonctionnels en 2014 et 2015). De 4,3MM² au total, le deal prévoit aussi le versement à l’OLP de 21%, puis 25% des profits -forme créative d’actionnariat. Enfin, dans la création d’infrastructures, Athènes aura sa part, construisant le centre logistique de Thriassio Pedio et la liaison ferrée Le Pirée-Thessalonique, 2eme port national (ouverture en janvier 2009).
Pour la Chine, reprendre Le Pirée est un choix stratégique -et pour la Grèce aussi ! Car Athènes a donné son propre port aux Chinois, mais Thessalonique à Hutchison : dénotant un souci de ne pas « mettre ses oeufs dans le même panier ». Cosco et Hutchison, opérateurs asiatiques, se font une concurrence effrénée à travers le monde, l’«élève» chinois ayant rattrapé le « maître » Hongkongais en peu d’années. Ils ont tous deux les fonds pour s’implanter dans les ports des cinq continents, et leur offrir le « plus » de la globalisation : l’intégration sous une architecture technologique et commerciale unique, permettant une économie de temps énorme en manutention, entretien et formalités. Cosco posséderait 29% d’Anvers, 49% de Singapour. Par cette alliance, Athènes vient d’obtenir bien plus que le droit de renouer avec les profits : une position maîtresse dans le dispositif global de demain, où une dizaine de réseaux se partageront le trafic. Dans ce métier, Cosco est jeune, mais de ce fait justement, condamné à réussir, à moins de perdre sa crédibilité.
CORRUPTION – 贪污
Le stéthoscope, la craie, sous la loupe
Le socialisme chinois poursuit son interminable marche contre la corruption. Cadres politiques et fonctionnaires sont désormais assez réglementés. A présent, au tour d’autres métiers! Dans leurs hôpitaux, les médecins les plus courtisés (spécialistes, chirurgiens) complètent leurs honoraires par la «petite enveloppe», obligatoire pour consulter et surtout opérer en coupant des mois de liste d’attente. Or, le Juge et le Procureur Suprêmes viennent (21/11) de statuer: cette pratique est de la corruption. Même faute, en cas d’acceptation de commissions (ou de faveurs, vacances, carte de clubs) des laboratoires, en échange d’une prescription systématique de leurs remèdes : dans les deux cas, les hommes en blanc risquent la prison. Professeurs et maîtres aussi, seront corrompus s’ils prennent l’argent -ou tout avantage en nature – des parents (pour laisser passer leur enfant en classe supérieure) ou de firmes (contre le choix de leurs manuels ou uniformes). Mais tout cela est-il praticable? Le médecin moyen gagne souvent 2000¥ (230²) ! Ce chirurgien pékinois dénonce le tarif ridicule de l’appendicectomie, 3¥. Les professeurs sont connus pour « brûler la chandelle par les deux bouts » – se tuer à la tâche pour un salaire indécent, sans même être assimilés fonctionnaires… Sans doute, cette réforme morale devra être suivie de celle des salaires !
La chute de la maison Huang
La mise sous écrou le 19/11 de Huang Guangyu, l’homme le plus riche de Chine, est dans l’ordre des choses. En novembre 2008, l’appareil sent le besoin de désigner à des millions d’actionnaires un responsable de leur ruine.
En 1986, dit sa légende, Guangyu, Cantonais de 17 ans montait à Pékin avec son frère Junqin, 3000 yuans en poche et créait son 1er magasin « Gome » d’électroménager et électronique. 22 ans après, son empire de 1200 magasins, en bourse, valait 6MM$, et sa fortune privée 2,7MM$. Huang Guangyi avait réussi grâce à une recette simple et géniale: être l’homme juste, au bon moment. Les industries naissantes avaient besoin d’un réseau national de distribution, indépendant de l’étranger. Après avoir créé quelques dizaines de succursales en Chine, en reprenant la méthodologie occidentale d’approvisionnement et de comptabilité, Huang, beau parleur, s’était fait admettre au club très fermé des décideurs politiques et d’affaires de la côte, obtenant l’accès illimité aux prêts bancaires et à la bourse. Issu de l’ère Jiang Zemin, le jeune homme trop confiant en ses appuis, n’avait pas prévu les implications du nouveau règne de Hu Jintao, à partir de 2003 : soucieux de «société harmonieuse», Hu voulait réprimer les écarts des nouveaux seigneurs, barons rouges et chevaliers d’industrie.
Premier souci en 2006 : accusé d’avoir reçu un prêt non réglementaire de 128M² par la Banque de Chine, Huang peut après quelques mois à faire classer l’affaire. En 2007, par pure imprudence, il se lance dans une affaire plus grave, par… esprit de famille: il aide son frère à faire «frire» en bourse de Shanghai le titre de Jintai, son groupe pharmaceutique du Shandong: il passera de 3,16¥ la part en février à 26,58¥ en août (moyennant pots–de–vin au MofCom, dit-on à la CSRC), avant de s’effondrer en septembre. Là encore, ses relations lui permettent de faire traîner les choses, et il aurait pu s’en sortir si 12 mois plus tard, l’économie mondiale ne s’était effondrée : là, plus de compromis possible. Plus que jamais, Pékin veut éliminer les Etats dans l’Etat des fortunes, dont les frasques le déstabilisent.
Maintenant, la question est de savoir si l’on peut faire plonger Huang, sans tuer Gome, en grand besoin de crédit pour refinan-cer sa dette, et sur la liste noire des banquiers. Symptomatiquement, en catastrophe, Gome, le 27/11, tente de se distancier de lui, nommant à sa place Chen Xiao (son directeur commercial) comme PDG par interim. Tandis que dès la veille, Junqin rejoignait son frère derrière les barreaux.
Après les fracassantes condamnations de Yang Bin (2003), Chen Liangyu (2007) ou Zhou Zhengyi (2008) On voudrait espérer que cette affaire marque la fin du capitalisme «cow-boy» des années ’90, aux relations incestueuses avec les apparatchiks. Mais… Wait and see !
Comment la Chine dépassera-t-elle son fléau de la pollution ? L’Organisation non gouvernementaile canado-suisse IIDD (Institut int’l de développement durable) conseille le Mofcom depuis 2006, et vient de sortir (25/11) ses «recommandations à propos de la filière bois, coton et déchets électroniques. A Pékin, son Président D. Runnalls nous les a présentées, jetant une lumière précieuse sur ces politiques, qui dans cinq ans, changeront l’image du pays.
● La Chine est le 1er pays du e-déchet, en tant que 1er producteur des produits neufs, et recevant des volumes énormes (12 à 14Mt/an) de ces objets en fin de cycle. Ces livraisons sont clandestines : Pékin interdit, mais sans pouvoir faire respecter sa loi. Mais par son ban légal, il se prive de réglementer ces flux qui sur le papier, n’existent pas -mais bien dans les dépôts d’ordures, où 700.000 pauvres s’empoisonnent à brûler, marteler et dissoudre ces déchets pour en extraire les matières précieuses (or, argent) en volumes infimes… L’IIDD recommande de légaliser l’activité par l’octroi de licences, d’encourager la recherche dans le design pour rendre les e-déchets aisément recyclables, et de créer les standards mondiaux du e-déchet, de manière à renforcer son emprise sur ce trafic générateur de profits et d’emplois.
● En matière de bois, la Chine importe 80Mt /an de vieux papier, 50% de ses besoins en cellulose. Mais elle s’attire une image désagréable en coupant à blanc les forêts (40Mt/an) des pays incapables de se défendre : 40% du bois russe et indonésien, 90% de l’africain. Ici, l’IIDD recommande d’aider ces pays, par subvention et formation, à renforcer leur administration, à passer aux coupes sélectives, et à faire certifier les meubles, comme produit d’une collecte responsable—conservant ses sources de bois et évitant le boycott mondial qui pointe à l’horizon.
● En matière de coton, qui pollue les sols par un usage immodéré de pesticides, Pékin est prié d’aider ses fournisseurs africains (Maliens, Nigérians) à passer à des cultures à fibre longue et à basse pollution, améliorant sa matière 1ère et son image.
Du travail de l’IIDD, on retient 2 leçons. [1] Plus que les Etats, les multinationales sont en état de faire reculer les agressions de la vie moderne sur la nature. Ayant pour ce faire, une puissance d’intervention technique incomparable et leur réactivité à l’opinion -aux choix du consommateur. [2] Si le MofCom fait appel à l’étranger pour l’aider à préparer des politiques nouvelles qui changeront la vie des Chinois, c’est… par inquiétude de voir le ministère de la SEPA, (State Environmental Protection Administration) concurrence redoutable, truster l’action environnementale, priorité de tout pouvoir chinois d’ici 20 ans. Par leur recherche de terrain et rôle de laboratoire politique, l’IIDD et d’autres viennent aider le ministère du commerce à guerroyer sur le terrain de son rival de l’environnement.
MONDE RURAL – 农业
Le tracteur sur les chapeaux de roue
China Tractor, de Changchun (Jilin) annonce le doublement de ses ventes sur les trois premiers trimestres, avec 24,1M$ pour environ 60.000 machines, grâce à l’expansion de la division «tracteurs légers et moyens». JV fondée en 2005 entre Chang Tuo, marque traditionnelle, et des capitaux Hongkongais, l’usine ne cesse d’allonger la production et la liste des produits entre motoculteurs, tracteurs et combinés. Cette santé robuste tient d’abord à son implantation au coeur du Dongbei (Nord-Est), région industrielle mais aussi grenier à blé, maïs et soja. La demande vrombissante en produits alimentaires, les subventions et crédits rétablis depuis 2003 font le reste.
Premier groupe du Dongbei, China Tractor n’est pas seul à profiter de cette manne : l’an dernier, la mécanisation de l’agriculture a fait un bond en avant, atteignant 162M d’hectares à travers le pays et un taux moyen de 41% entre semailles, repiquage et moissons. Cette année, le secteur national devrait produire 220.000 tracteurs grands et moyens, et 80.000 moissonneuses batteuses, soit une hausse de 10 à 15% – ce matériel agricole commence à s’exporter, vers l’Asie du Sud-Est et la Russie notamment, générant un excédent de 1,4MM$. En attendant de se frotter aux marchés des pays riches—John Deere, New Holland, prenez garde !
Wifi : chance de connection pour les campagnes
Comme d’autres ont apporté la fée électricité dans les campagnes, le Californien MediaG3 -et sa filiale chinoise Oriental Media- prétend relier à l’internet les 900M de paysans. MediaG3 est l’auteur d’une technologie d’internet sans fil (système Wifi) à large bande, par satellite, bi-directionnel (envoi/réception de données), sur des fréquences de 24 à 43GHz. Pour un coût modeste, cette solution semble efficace sur des territoires vastes, excentrés et à faible densité de peuplement : là où un réseau par câble ou fibre optique ne se justifie pas, sous l’angle technique et/ou commercial. Le système comporte des stations de réémission MG3 multipoints d’un rayon d’action de 11km, et sont conçues pour évoluer en volume d’abonnés, comme de services disponibles.
Si ce système a sa place ici, c’est qu’après avoir reçu l’approbation de la tutelle SARFT (State Administration of Radio, Film and Television) et du MofCom, il entame son déploiement sur base expérimentale, au bénéfice de 45M de population rurale (5% du marché). Pour MediaG3, le contrat de fournitures se monte à 10M$ la 1ère année, autant la seconde— subventionné par 593.000$ de l’agence fédérale pour le commerce et le développement. Et si le succès est au rendez vous, le marché national sera d’1MM$ en infrastructure -sans doute assorti de transfert de licences et construction locale !
Energie : l’or noir sous la crise
En matière d’énergie, la surprise vient moins de ce que la Chine fait, que de ce qu’elle ne fait pas. Quatre mois d’effondrement des cours du pétrole n’ont pas inspiré le pays à commander à l’étranger des volumes supplémentaires à sa demande, afin de compléter ses réserves stratégiques, aujourd’hui suffisantes pour 15 jours d’utilisation (dès 2009, un jour équivaudra à 8M barils, prédit l’AIE l’Agence Int’le de l’Energie). Elle voudrait les porter à 60 jours – la norme, pour les pays de l’OCDE, est de 180 jours. C’est la seconde occasion manquée en 10 ans : en fin des années ’90, le 1er ministre Zhu Rongji avait déjà interdit les imports « gris » (affaire Lai Changxing) d’un or noir qui coûtait alors 20$ le baril.
Ces 2 ratages ont une raison unique : le pouvoir lobbyiste des monopoles pétroliers CNPC et Sinopec. Ces maisons, comme ailleurs au monde, ont l’obligation, liée à leur licence, de constituer ces réserves, qui cependant signifient pour elles une immobilisation de fonds « inutile ». A l’époque, Zhu avait bloqué les importations, afin de protéger leur prix intérieur supérieur au cours mondial. Aujourd’hui, on peut supposer que CNPC et Sinopec n’ont pas bougé, préférant privilégier les investissements productifs.
La Cnooc elle, se prépare à l’après récession : avec ses partenaires américains Devon et Anadarko, et British Gaz, ce monopole de l’off-shore veut dépenser 29MM$ d’ici 2020, en exploration en mer de Chine du Sud, d’une surface septuple de la France (3,5M km², de Singapour à Taiwan), et mise en perce de gisements. Elle veut parvenir à forer à 3000m, contre 1450m actuellement, et se constituer une réserve de 22MM barils d’ici 2020 (1Mbaril/j), tout en frisant d’ici là, en production, la barre du M de baril/j.
En matière de gaz, on voit refaire surface tous les projets de terminaux GNL, annoncés depuis 5 ans, et sur la touche depuis lors, faute de trouver l’approvisionnement. Signe que depuis lors, la Chine s’est résignée à payer le prix aux groupes internationaux et aux pays producteurs, Qatar, Australie, Malaisie, Indonésie. Entre les trois groupes nationaux, 12 terminaux sont en construction. Les derniers contrats consistent dans le doublement à 2Mt, d’un contrat « Shell » depuis le Nord-Ouest australien, et dans celui de Qatargaz, de 2Mt, pour les terminaux de Cnooc à Dapeng (Canton) et Putian (Fujian). Un autre contrat « Total » pour 1Mt, est en bonne voie. Total d’autre part, achève son exploration de Sulige-Sud (Mongolie intérieure), et vient de faire son offre au client CNPC : le groupe français propose d’y forer 2000 puits en 25 ans, moyennant un investissement de 1,5 à 2MM$, et se propose d’en tirer 3 à 5MMm3 de méthane, qu’il céderait à la CNPC, la compagnie nationale pétrolière, pour distribution sur Pékin entre consommateurs privés et industriels.
NB : Plus cher que le charbon, le gaz enregistre un bond en avant, voyant doubler en cinq ans sa part dans l’énergie chinoise, de 2,8% à 5,3% : les villes chinoises ne veulent plus être enfumées.
Sida : des progrès, mais…
Ce 1er décembre, jour mondial contre le SIDA, éclaire les progrès réalisés en Chine. Les malades seraient 700.000, 50.000 de plus qu’en ’07. Le régime a développé de multiples actions, allant des centaines de cliniques de désintoxication aux campagnes pour le condom (22000 points de vente dans Pékin). Mais les chiffres de l’année, pour la capitale, sont inquiétants. Comme principal relais du virus, le sexe a remplacé la drogue, passé de 25% en 2004, à 55% cette année. Seules 46,5% des 90.000 prostituées de Pékin utilisent le condom. Et sur les 755 cas de l’année, les étrangers sont 219, et les homosexuels 249 : donc un tiers, contre 3,5% selon la statistique admise jusqu’alors… Le vrai problème, tient a l’obscurantisme, voire l’inefficacité des cadres, surtout provinciaux. Seuls 19% des malades nécessitant la trithérapie y ont accès gratuitement (37.497, en 4 ans). La 1ère campagne TV sur le SIDA, remonte à l’an passé. Toute initiative privée anti-Sida est brimée, comme celle de Mme Gao Yaojie, doctoresse de 82 ans, en résidence surveillée. Les ONG restent privées de licence officielle, et plus encore de subventions. Résultat : le séropositif demeure stigmatisé et doit cacher son mal pour garder sa place dans la société. Il reste donc bien du chemin à faire dans les mentalités, et en attendant, le fléau gagne, dans l’ombre.
La crise du lait est sans conteste plus grave que toute autre en Chine, cumulant les effets de la récession aux conséquence de l’incroyable fraude de professionnels ayant « mouillé » leur lait à la mélamine, poison mortel à haute dose.
Comment repêcher Sanlu, le principal tricheur, ex-n°2 mondial du lait maternisé, aux sept sites productifs et 30.000 ouvriers? La production vient de reprendre sous la marque de Sanyuan, la laiterie pékinoise, à qui le pouvoir s’apprête à confier sa propriété. Choix logique : Sanyuan est un des rares grands à la réputation intacte, après avoir été «blanchi» (si l’on ose dire) par le test national de qualité en septembre. L’actionnaire Fonterra (NZ) perdra ses 43% de parts, ses 38M² d’invest, et plus encore : il inscrit à son budget 58,5M² de pertes, en dédommagement aux victimes et frais d’élimination du stock. Pour autant, ce 1er laitier mondial n’est pas trop à plaindre, exportant vers la Chine depuis lors, 10 fois plus de son propre lait, un des rares dont le Chinois veuille encore. Il s’y trouve avantagé par sa monnaie, le $ neo zélandais, dévaluée de 30%, et des nouvelles laiteries qui émergent dans la nuit, pour faire de nouveaux produits « fiables » et « honnêtes », menaçant de mort au moins une fraction de l’industrie.
Car voici la vraie question, celle du sauvetage du secteur, dont le marché de lait, glace, fromage a régressé de 20 à 30% depuis septembre.
Le plan de l’Etat consiste à forcer d’ici octobre 2011 les laiteries à produire par elles mêmes au moins 70% du lait qu’elles transforment, et au moins 30% en fermes de plus de 100 têtes. Avant octobre 2009, l’interprofession aura dû s’imposer des normes de traite, d’hygiène, teneur etc. Et avant fin 2008, le marché (production, transformation et vente) devrait être retourné à la normale…
Raisonnable en soi, ce plan garde une lourde incertitude. De l’avis des professionnels, il n’offre aucune garantie contre d’autres fraudes futures, frappant d’autres secteurs alimentaires tels les vins, la pâtisserie, les surgelés…
Sous l’angle social, pointe un autre danger : comment transférer vers ces méga-élevages, désormais obligatoires, les 14,3M de vaches, sans spolier leurs propriétaires paysans? Les grands groupes sauront se retourner, Mengniu, par exemple, qui prétend sous deux ans, ouvrir 20 fermes de 10.000 vaches, et faire passer son auto-approvisionnement de 30 à 70%. Mais le problème est celui des 2M de petits éleveurs, des milliers de micro-laiteries précaires : Pékin saura-t-il leur préserver une place ? Se laisseront-ils liquider sans se défendre ? Sans compter cette menace déjà évoquée, des importations : on voit mal des géants comme Mengniu ou Yili survivre, amputés de 30% de leur marché et de toute croissance future. A moins que Pékin ne «trouve un truc» pour fermer les frontières, contournant les règles de l’Organisation mondiale du commerce.
Au fin fond de la Chine, on trouve des peuplades venues du fond des âges, vivant dans la nostalgie d’un passé de razzias. Aujourd’hui affaiblis, relégués sur des terres ingrates, les Yi de Juemo (Sichuan) vivent de charpardages, et considèrent leur « district autonome » comme une enclave sans lois. Mais pas tous !
En mars 2000, avec ses cousins Ruhei et Aqian à demi ivres, Laqu avait tabassé 3 maîtres d’école, prétextant qu’ils étaient «Han». C’était oublier que Laobulaluo, l’aîné de Laqu, depuis 17 mois était agent au commissariat de Leshan. Et ne pas prévoir que ce jeune plein de foi en la portée morale de sa tâche, se proposerait pour descendre à Juemo arrêter les coupables !
Au village, son cadet furieux, l’accusa de pactiser avec l’ennemi. Bouleversés, les parents tentèrent de l’émouvoir par les larmes, tandis qu’un oncle plaidait leur cause : « Ruhei, Aqian, Laqu sont fautifs, mais avant tout des frères de sang ». Devant le clan, les écervelés faisaient les fiers: jamais Laobu, qui les avait toujours gâtés, n’o- oserait commettre l’impensable! Quelle ne fut leur immense sur-prise, quand ils se trouvèrent ramenés à Leshan, menottés, où ils en prirent pour 6 mois, voire 3 ans, fermes !
L’affaire fit exploser le clan, dynamitant ses liens séculaires. La branche de Ruhei et Aqian coupa tout contact avec Laobu et ses parents,sauf pour les abreuver d’insultes et de menaces, lorsqu’ils osaient sortir au marché. Au pire de la crise, un matin, les vieux cons-tatèrent que leur boeuf ne se levait plus : « on » lui avait coupé la queue et un tendon d’Achille, durant la nuit.
Puis les choses se calmèrent, la sagesse reprit ses droits. En 18 mois de taule, le cadet avait eu le temps de méditer. Rétrospectivement d’accord avec la sévérité de l’aîné, il ne deman-dait plus qu’à vivre en paix avec la loi. Même si les autres, le vice rivé au corps, poursuivaient leurs fredaines !
En octobre 2002, aidé de deux comparses, le cousin Luozi shasha racketta de 5000¥ un motocycliste, sous prétexte d’un ba-nal accrochage: là encore, Laobu (entre-temps promu commissaire) vint le coincer le lendemain et le ramena à la ville, où il reçut un stage non désiré en camp de rééducation.
L’ultime intervention «familiale» du jeune officier remonte à février : Labudali, un cousin de sa femme avait fauché un sac à main dans un bus. Pour Laobu devait l’arrêter, mais le moment faisait problème : c’était le 1er jour du Nouvel an lunaire, trêve traditionnelle. Enfin, se dit il, quand on aime, on ne compte pas : sans tergiverser davantage, il arrêta le coupable, portant ainsi à 48 le nombre de ses frangins par lui embastillés, dont 25 condamnés.
La conclusion qu’en tire le Journal du Commerce (Chengdu) peut surprendre : plus Laobu a arrêté de frères, et plus il compte d’alliés, en les personnes des condamnés eux-mêmes, à qui la prison a rendu la raison. Tel Luozi shasha, rangé, qui s’est fait élire maire de son village. Dans la réserve désormais, on n’appelle plus Laobulaluo que « protecteur public au visage noir» (hēi liǎn bāo gōng, 黑脸包公) -référence à un juge mythique de l’époque Song, passé à la postérité en raison de son intégrité inflexible.
Et, dit la chronique, notre superflic peut retourner dans la réserve passer les fêtes. Depuis que son message est passé – la famille oui, mais avant tout, la loi !
2-4 décembre, Pékin, Salon des équipements pour aéroports
3-5 déc. Shanghai, Salon des accessoires de mode
4-6 déc, Shanghai, FCH, Salon de l’alimentation et de la boisson, du commerce de détail et de l’hôtellerie