Sauver Beichuan – par le tourisme
Le 12/05, 87.000 Sichuanais mouraient autour de Beichuan, d’un séisme de force 8 sur l’échelle de Richter. Une fois les 1ers besoins comblés (tentes, préfabriqué etc), restent les problèmes de long terme. Peu formés et éduqués, 1,5M de paysans sans terres offrent un casse-tête aux 20 provinces qui tentent de leur créer un autre gagne pain—la moitié d’entre eux ont émigré entre Pékin et Shanghai, dans des jobs de misère. 80% des autres sont au chômage. Sur dix ans, l’Etat a promis d’injecter 100MM² dans le rattrapage de la région. Le plan de relance est dévoilé, et pour Beichuan, reconstruit sur un site plus sûr, c’est un avenir à vocation touristique qui est retenu—logiquement, avec pour patrimoine ses montagnes et torrents, la culture et l’architecture si typique, en hautes tours style donjon des minorités Qiang et Dayu. Pékin dotera ce plan spécial de près de 2MM², dont la plupart passera en routes, égouts, hôtels, centrales électriques. Pour la mémoire collective, le musée du séisme comprendra un centre de formation à l’évacuation d’urgence, un monument aux morts et aux héros, et d’autres animations autour de la culture des Qiang, dont 30.000 moururent (10% d’entre eux) ce jour-là. Déjà, ce travail de promotion commence, et pas toujours comme le souhaiterait Chengdu : au festival de Pusan (Corée), « Qui tua nos enfants? », de Pan Jialin, fait fureur…
E-commerce : Taobao, perle d’Alibaba
Depuis sa création en 1999, Alibaba est passé n°1 asiatique d’achats en ligne, et croule sous l’or. Surtout grâce à Taobao, sa filiale d’enchères gratuites pour acheter ou vendre n’importe quoi, et grâce à ses 850.000 boutiques privées hébergées avec un catalogue global de 2M de produits référencés. Par cette stratégie de gratuité, il a pu chasser l’américain eBay de son marché. Aujourd’hui pas encore rentable mais déjà autosuffisant, Taobao vit de sa pub et de ses services commerciaux. En 5 ans, le bilan est édifiant : trustant 84% du marché chinois, il accueille 80M d’acheteurs, 1M de vendeurs qui réalisent 1,5M de transactions par jour, pour un chiffre de 30,5M². De 5,6MM² en 2007, le chiffre du e-commerce doit passer à 12,6MM² en 2008 et 56,9MM² en 2011. Pour poursuivre ses projets d’expansion, Alibaba crée aujourd’hui son grand Taobao, en le fusionnant avec Alimama, son autre site de pubs qui profitent à 0,4M de PME. Il annonce aussi un crédit de 541M² sur 5 ans pour «développer d’autres outils de vente». Il a pour lui un marché potentiel de 253M d’internautes, et -meilleur atout encore, peut-être -la crise, qui risque de détourner vers lui les clients de la grande distribution traditionnelle, en quête de moins cher. Alibaba rêve de dépasser sous 10 ans le géant américain WalMart, tout en reprenant sa liberté vis-à-vis de son actionnaire Yahoo (39%) : cette ambition semble à sa portée.
Sanlu tue la vache au lait d’or…
Après un mois, le scandale du lait à la mélamine poursuit ses dégâts. Le 1er ministre Wen Jiabao l’assure, «rien n’est caché», mais le bilan officiel (« 90.000 enfants touchés ») reste en-deçà de la vraisemblance -ils sont 15M, les nourrissons qui consomment ce type de produit. 5000 inspecteurs sont lancés sur les milliers de laiteries du pays, et une quarantaine de responsables (dealers, patrons d’usine) sont sous les verrous. En catastrophe, l’Etat a fixé un taux-plafond admissible de mélamine, à respecter par les industriels sous des peines allant jusqu’à la mort. Implacable, la revue économique Caijing accuse l’AQSIQ, agence de l’hygiène alimentaire, d’avoir arbitrairement exempté d’inspections Sanlu (la 1ère firme coupable) et fait taire la presse à sa demande. Or, les pertes s’annoncent lourdes, en milliards d’², durant un an au moins, selon l’expert hollandais Bram Wouters. Des firmes comme Sanlu, Yili, Mengniu… ont déjà vu leurs ventes chuter de 70%. Incapables d’écouler leur lait, les paysans touchent en prime d’urgence 200¥/vache pour éviter l’abattage. Le secteur qui progressait jusqu’alors de 20% par an (17,3MM² en 2007) en perdra 20% cette année. 3M de travailleurs voient leurs emplois fragilisés. Et sans doute, tout le secteur, à réorganiser, devra retourner à l’école!
Restauration : l’irrésistible ascension du fast-food
Quel symbole plus clair que celui du fast-food, pour la mondialisation qui gagne en Chine? Le fast-food chinois gagne la bataille des ventres, tenant la dragée haute à McDo, KFC et Pizza Hut, dit Research in China. L‘an passé, la restauration en Chine occupa 19,4% du commerce de détail, dont 1/6ème au fast-food. Sur ce dernier, 80% était local. Cette domination devrait durer : la croissance annuelle de 30% en 2007, est très supérieure à celle des chaînes étrangères. Tout va comme si la Chine avait mis quelques années à «digérer» la formule importée, avant de la resservir avec succès sur un marché captif où tous, parents comme enfants doivent acheter leur déjeuner, à prendre en quelques minutes. Depuis 2007, la flambée des étiquettes favorise elle aussi la restauration collective, par ses moyens de comprimer les prix. Aussi ce fast-food qui en 2007 revendiquait 7,4% de toutes les dépenses des foyers, passera d’ici 2011 à 9,3%, + 25% par an. Assurant la petite part de ce festin national, les étrangers font contre mauvaise fortune bon coeur. Pour 2009, Yum! (KFC, Pizza Hut, Taco Bell) espère en Chine une croissance de +20%. D. Novak, son Président ajoute ce faux aveu: «Nous sommes contents d’être en Chine, où nos restaurants sont vite amortis». Mais d’autres, tel l’analyste D. Miller, sont moins béats : «sous ce climat économique négatif, les gens préfèrent se passer du restau, et déjeuner au bureau»!
Sommaire N° 32