A la loupe : Tibet, Xinjiang, la radicalisation menace

Six mois après les émeutes de Lhassa (14/03), le retour à une vie normale est dur, entre Tibétains et autorités, au Toit du monde et dans les provinces voisines. Les révélations qui filtrent sur la vague de reprise en main n’ont rien arrangé.

Jigme, moine du Gansu, affirme avoir été laissé pour mort dans un hôpital après des semaines de mauvais traitements, et évoque des séances d’endoctrinement forcé en son monastère de Labrang. Défendu par Reporters sans frontières, un Tibétain retourné de l’Inde, Dhondup Wangchen est aux arrêts depuis mars avec son caméraman pour avoir produit clandestinement un film sur sa terre natale, où des témoins locaux évoquent la perte de leur culture, la sédentarisation forcée. Washu Rangjong, présentateur TV, est aux arrêts depuis le 11/09…C’est dans ce contexte de crispation que doit se tenir en octobre le 8ème round des négociations entre les émissaires du Dalai et Pékin. Désabusés, les 1ers ne sont pas loin de vouloir jeter l’éponge, face à l’absence alléguée de volonté politique des 2ds. Karma Chophel, porte-parole du Tibet en exil, croit que le sommet tournera en débat de procédure.

Pressé par ses propres troupes, le Dalai-Lama est contraint, une fois de plus, de parler -beaucoup, et fort. Non seulement ce sommet, s’il en est ainsi, sera le dernier, mais encore, un congrès des leaders Tibétains en exil est convoqué pour novembre ou décembre, pour tirer les conclusions de la série de rencontres stériles, et de l’action des Tibétains des deux bords. Pourquoi cette radicalisation? La brève faiblesse de santé du souverain-pontife lamaïste n’est sans doute pas fondamentale – le Dalai se donne, avec ses médecins, une vingtaine d’années d’espérance de vie. Mais 60 ans d’occupation assimilatrice nourrissent, surtout chez les jeunes, une tentation nihiliste, exacerbée par la flambée des prix alimentaires. Situation  non sans analogie avec l’évolution au Xinjiang, le voisin nordique que tout au reste -ethnie, religion, histoire—différencie du Tibet.

Le Xinjiang aussi porte les stigmates de la tension, après les attentats de l’été. Nuer Baikeli, Président de région, en des termes mus-clés tirés du glossaire révolutionnaire, vient de désigner la responsable : Rebiya Kadeer, millionnaire et ex-égérie du pouvoir, exilée en 2005 et depuis Présidente du Congrès ouighour mondial. Sans preuve, comme pour désigner aux Chinois un nouvel ennemi public – Dalai pour les Tibétains, Kadeer pour les Ouighours. Les signes sont inquiétants : face à ses deux minorités à la dérive, Pékin semble déterminé à la fermeté, ignorant les signes de dégradation rapide qui couvent. Signe aussi, il faut le dire, de confiance dans ses propres forces, et d’attente « au chaud ».  

 

 

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