TGV : ligne nationale, ambitions mondiales
Pour l’avenir du TGV chinois, Zhang Shuguang, vice ingénieur chef au ministère des chemins de fer voit en grand : d’ici quatre ans sera lancé le train à 380km/h entre Pékin et Shanghai, chantier de 22MM². La rame n’existe pas, mais Zhang croit sa sortie possible dans les temps. Une telle prétention ne prête plus à sourire depuis cet été, où le CRH-3 (dérivé de l’ICE de Siemens, construit à Tangshan, Hebei), roule à 350km/h sur la ligne Pékin-Tianjin. L’objectif de 380km/h n’est pas indifférent: il permettra d’avaler les 1318km de Pékin à Shanghai en 4h (sans compter les arrêts sur le trajet), au lieu des 12h actuellement nécessaires. De quoi tailler des croupières aux avions sur la même route (2h de vol, + trajet-aéroport, fouilles, check-in etc). De quoi aussi épargner une énergie précieuse. De quoi enfin menacer les marchés étrangers des TGV français, ICE allemand et autre Shinkansen. L’an passé, le TGV a amélioré son record du monde de vitesse (574,8km/h), et le Shinkansen s’apprête à passer à 360km/-h moyenne. Cependant, aucun doute possible, ces maîtres mondiaux sont indéniablement rattrapés par l’élève chinois.
Ils l’ont été à une vitesse fulgurante : 15 ans seulement. Avec grand succès, la Chine a appliqué une stratégie -également suivie dans les filières du nucléaire et de l’aéronautique-, en invitant sur son sol les détenteurs mondiaux (Siemens/ICE, Mitsubishi/Shinkansen, Alstom/TGV), puis en les mettant en concurrence et en les amenant à céder leurs décennies de recherches et brevets, moyennant l’achat de quelques rames -et leur présence sur le marché chinois. De la sorte, le transfert de ces technologies à leurs JV locales, permit à la Chine de constituer en 15 ans sa propre infrastructure de production, design, maintenance et certification. Atout d’export futur, auquel s’ajouteront ceux des « amitiés tiers-mondistes », et son prix imbattable de construction.
NB1 : la priorité des investissements va à Shanghai et sa région (40% du PIB pour 25% de la population), mais à terme, toutes les métropoles seront reliées au réseau TGV de 12.000km.
NB2 : Pour moduler les propos de M. Zhang Shuguang, il convient quand même de préciser les faiblesses de ce rail chinois, régulièrement cité pour incompétence. Dernier incident en date : le 28 avril dernier, deux trains entraient en collision dans la province du Shandong. Bilan : 70 morts, 420 blessés ; une des pires catastrophes ferroviaires depuis dix ans.
Télécoms : China Mobile, l’homme à battre …
En mai, la refonte des télécoms en trois opérateurs mixtes (fixe-mobile) était supposée égaliser les chances aux outsiders China Telecom et Unicom, face au géant China Mobile.
Mais quatre mois plus tard, aucun doute : China Mobile conserve son rythme (7M de nouveaux abonnés sans fil/mois) et son avance (70% du marché). Wang Xiaochu, Président de China Telecom, se plaint d’un déséquilibre systémique, après avoir perdu 10M d’abonnés en ligne fixe en 1 an (il lui en reste 215M) et 8,2% en revenus nets au 1er semestre. Raison : les usagers votent pour le portable, et sont déjà 600M.
Pour renouer avec le profit, China Telecom n’a d’autre choix que compléter à étapes forcées son réseau mobile CDMA (norme US) juste racheté à Unicom (4,38MM²). Pour améliorer la diversité des modèles disponibles en CDMA, il vient de commander 5M d’appareils de marque (Samsung, ZTE, Motorola, Huawei), qu’il écoulera 200¥ /pièce, combinés à des services nouveaux (telle la bascule vers ligne fixe). Wang annonce d’autres mesures de l’Etat pour rétablir l’équilibre concurrentiel: le droit de quitter China Mobile tout en conservant son n° propre, ou la fusion de tous les réseaux exploités par les trois opérateurs, pour éviter les investissements redondants qui, de 2002 à 2006, coûtèrent 112MM² au pays, selon l’auditeur général Liu Jiayi, tout en n’étant utilisés qu’à 30%…
Et l’étranger, dans tout cela? Grande muette, il attend toujours. Seul l’Espagnol Telefonica peut placer 750M² dans China Netcom, juste avant sa fusion avec Unicom : à terme, Telefonica aura 5,5% du nouveau groupe, contre 3% à Vodafone (RU) dans China Mobile. Aux seuls équipementiers, l’avenir semble sourire -mais ce n’est pas nouveau !
Sommaire N° 29