Temps fort : Chine—Japon : réchauffement ‘climatique’

En 2005, lors d’un sommet régional, selon l’histoire, Hu Jintao aurait refusé de  prêter son stylo à J. Koizumi pour signer un accord. Vraie ou apocryphe, l’anecdote en dit long sur le peu d’estime en laquelle le leadership chinois tenait à l’époque son partenaire !  La raison de ce peu de courtoisie, était la vieille insistance du leader japonais à honorer des criminels de guerre inhumés au sanctuaire de Yasukuni, et donc à nier le massacre de Nankin (1937).

La semaine passée (1er/09), la réaction chinoise au départ d’un autre 1er ministre nippon, Yasuo Fukuda, montre le chemin parcouru  entre les deux puissances : un porte-parole chinois relève la « grande contribution » de Fukuda dans la restauration des liens, et conclut : « nous l’apprécions fort »!

La convalescence a débuté à l’arrivée aux affaires à Tokyo de Shinzo Abe, ardent nationaliste lui-même, mais qui comprit (suite à l’appel des industriels) l’urgence de mettre fin à cette dérive. Abe s’était empressé d’inviter en 2007 Wen Jiabao et Hu Jintao. Mais il avait maintenu la tension en tentant de relancer le réarmement du pays… Puis Fukuda arriva, attendu comme le sauveur par Pékin – n’ayant pas oublié son père Takeo Fukuda, 1er ministre, 30 ans plus tôt, l’artisan nippon du traité d’amitié sino-japonais… A peine investi dans ses fonctions en septembre 2007, Fukuda-fils s’envolait pour Pékin, annulait le projet de réforme constitutionnelle de l’armée, accueillait Hu à Tokyo en mai 2008…donnant ainsi tous les gages!

Après son départ, signe d’un système constitutionnel faible (10ème premier ministre en 14 ans!), Fukuda sera sans doute relayé par Taro Aso, cheval de retour, conservateur à tout crin. Les éloges répétées de Pékin à Fukuda traduisent le souci chinois, face aux bases encore fragiles de ces relations, et la conscience de leur importance. En fait, les risques de rechute sont infimes. Désormais au Japon, le nationalisme a mauvaise presse : les électeurs ne s’inquiètent plus que de l’économie et du social, avec une croissance en baisse de 0,6% au 2eme trim., et 30.000 cas de suicides par an, un des taux les plus hauts du monde.

Entre ces pays, la synergie est inévitable : en 2007, les échanges ont bondi de 15% à 236MM$. Les prêts bancaires nippons, à 23,2MM$ en mars, ont plus que doublé en cinq ans.

Second bailleur en Chine d’IDE, le Japon y a déjà placé 60,7MM$. A Shanghai, 25 banques nippones s’installent dans la nouvelle tour Mori (101 étages), pour placer en Chine les fonds levés chez elles, pour un profit meilleur qu’aux banques chinoises mêmes! En face, le capital chinois (la CIC) s’ébranle, pour trouver au pays du Soleil levant de bons placements… Avec de tels fondamentaux, entre ces deux pôles de l’Asie qui rivalisent depuis des siècles pour le leadership de pa région, le sentiment ne peut que changer, comme il le fit 59 ans plus tôt entre France et Allemagne, de la méfiance vers l’estime.

 

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