En visite (4-6/07) au Jiangsu et à Shanghai, le 1er ministre Wen Jiabao a donné un signal de confiance en l’avenir, et des orientations en volte-face par rapport à son arrivée aux affaires en 2003. Il plaidait pour «plus de croissance, plus équitable, plus écolo et plus maîtrisée». A présent ses rêves de guerre à la surchauffe semblent du passé: il veut une croissance «rapide et soutenue face aux nouveaux défis», préparer l’après JO pour résister à la panne de croissance des pays riches. Les experts attendent 10% pour cette année (comme depuis 10 ans en moyenne), contre 11,8% en 2007.
Mal nécessaire, l’inflation doit demeurer «acceptable»: «une saine économie devant fournir au peuple les moyens d’y faire face». Elle était de 4,8% en 2007. En janvier, Pékin voulait la brider à 4,5%. En avril, elle s’emballait à +8,5%, pour rebaisser à 7,1% en juin. Mais divers signes industriels font attendre une autre flambée pour l’automne. La BM s’attend à 7% d’inflation pour l’année.
Wen parie donc sur le marché intérieur. Il voit dans une forte croissance le seul outil fiable pour maintenir la stabilité. Pour «concilier» (au moins sur le papier) croissance et lutte anti-inflation, Wen veut continuer à combiner subventions au monde rural prioritaire, et restriction du crédit -mais celle-ci sera contournée par la banque grise, forte des centaines de MM$ retournées de l’étranger, propriété des caisses noires des firmes chinoises.
La NDRC relève au 1er/07 le prix de l’électricité, pour répercuter les hausses du charbon: +4,7% (+0,25¥/kWh) pour l’industrie et le commerce. Mais fidèle à son plan national « renouvelables », elle impose que 20% des ressources nouvelles tombant dans la caisse des électriciens, soient réinvesties dans ces énergies nouvelles. Idem, les 17% de hausse du pétrole du 20/06, profits potentiels pour les raffineurs, sont effacés par la fin de la restitution de TVA de 13% sur le pétrole importé… Déjà, les raffineurs ont coupé de 40% leurs importations de janvier à mai dernier.
L’autre intérêt du maintien d’une forte croissance est de permettre à la Chine de rattraper les US, comme locomotive du monde. Aujourd’hui, en pouvoir d’achat réel, la Chine «pèserait» déjà la moitié des USA (PIBs respectifs de 3MMM$ et 14MMM$), et les dépasserait en 2035, dit A. Keidel du CEIP. Dès 2007, elle avait 29 des 500 « fortunes » globales, et les US en avaient 157 : score le plus bas en 10 ans.
Reste à ce plan un talon d’Achille, l’agriculture. La récolte de 2008 plafonnera à 500Mt, moins que la consommation (518Mt). C’est pourquoi Wen, visitant une ferme modèle de Wuxi, a lancé deux plans « stratégiques », sur 12 ans, pour porter la récolte à 540Mt d’ici 2020. Un effort massif de technologie et de capitaux est jeté dans la bataille —dont l’issue reste incertaine.
Sommaire N° 24