Chine-Taiwan : hymen à la chaîne
Pour maintenir le tempo du rapprochement sino-taiwanais, Pékin et Taibei sous la houlette de Ma Ying-jeou (nouveau leader de l’île, KMT, et véritable artisan de la détente entre les deux rivages) reprennent le vieux gadget du mariage de masse, version moderne du mariage arrangé confucéen, pratiqué de part et d’autre dès les années 70 pour éviter aux familles modestes les budgets somptuaires du mariage traditionnel. Ainsi, deux agences matrimoniales (en Chine, la Shuangxi Cultural Comm, de Canton) font appel via internet à 39 jeunes couples candidats. La procédure est simple, mais floue. On ignore le pourquoi du chiffre «39»; les critères de sélections ne sont pas nets, pas plus que le profil du couple recherché (mixte, ou national). Quoiqu’il en soit, les élus gagneront une visite touristique de fiançailles en septembre à Pékin et Hangzhou, puis un voyage de noces collectives en novembre à Taiwan. L’union sera célébrée sur un site nuptial célèbre, au bord du lac Sun Moon entouré des montagnes à mi-automne –romantisch ! Seule fausse note au programme souriant : Taiwan rejette sans appel (10/07) l’appellation olympique de «Chine-Taipei», que l’hôte chinois tentait de lui glisser, faisant valoir que «c’était pareil». Taiwan préfère garder celle, bizarre, de «Taipei-chinois» -précisément pour faire moins chinois!
Emeutes de Wengan : les triades, acteur caché
L’émeute de Wengan (Guizhou), le 28/06, avait lancé 30.000 citadins contre le siège du Parti et la police, suite au décès suspect d’une adolescente. Pour calmer les émotions, Pékin avait ordonné une 3ème autopsie. Sans surprise, le rapport (8/07) confirme la mort «accidentelle et sans violences» -mais famille et amis parlent d’enquête truquée. A ce moment, deux hauts cadres s’épanchent. Ancien chef de la police, limogé pour «incompétence», Shen Guirong, accuse des édiles de liens avec la triade Yushan («montagne de jade»). Tandis que Shi Zongyuan en personne, secrétaire provincial, dénonce l’utilisation arbitraire du bras policier pour étouffer les protestations. Comme pour en donner une illustration, le 27/06 à Guiyang la capitale locale, quelques 20 pauvres hères, licenciés sans solde depuis 2002 de leur usine publique de cigarettes, marchèrent pour la nème fois sur le commissariat, et quand ils furent arrêtés, sortirent de leurs poches des fioles de mort-aux-rats pour tenter un suicide collectif, histoire de se faire entendre, fût-ce depuis l’au-delà. Tous ces dérapages servent de révélateur du climat moral délétère qui peut régner sur les villes, suite à des décennies d’abus d’autorité et de règne sans loi.
« Chinafrique », toujours plus vite, haut et fort
La Chinafrique gagne du terrain, ayant sextuplé en sept ans le commerce bilatéral (à 35MM² en 2006, selon la BM) tout en dépassant la France comme 2d partenaire commercial en 2007. Pékin a su saisir la chance de leur complémentarité, entre le cruel déficit africain en infrastructures et celui de la Chine en ressources fossiles : la Chine fournit chaque année 22MM$/an à 35 pays, en partie en équipements made in China, emportant en échange pétrole et minerais. Modèle illustré cette semaine par trois contrats : [1] Au Niger, pays du Sahel enclavé et parmi les plus pauvres, mais riche en uranium et pétrole, la Chine livre ses vieilles centrales thermiques. Polluantes —mais à prix imbattable, ce seront les 1ères d’un pays en sous-tension chronique, raccordé au Nigéria. Elles seront payées sur une ligne de crédit de 5MM$, payables en trois ans par la CNPC, qui construira aussi un oléoduc de 2000km et une raffinerie sur le gisement de Diffa (à l’Est), aux réserves prouvées de 324M barils. [2] Au Gabon, après deux ans de palabres difficiles, la CMEC obtient pour 25 ans 700km² de gisement de fer à Belinga (500Mt de réserves): 790M$ sont engagés pour ouvrir la liaison ferroviaire de 500km, une centrale hydroélectrique, et le port en eau profonde de Santa Clara. Rendement prévu : 30Mt de minerai/an. [3] De passage à Luanda (Angola), Li Ruogu, gouverneur de l’Eximbank chinoise, signe trois chèques pour 135M$, pour restaurer centrales électriques, centres de traitement des eaux et voirie. La Chine lui a déjà fourni entre 4 et 11MM$. En revanche, Luanda offre les 2/3 de son or noir.
NB : depuis 2002, suite au détournement d’au moins 1MM$, le FMI ne finance plus l’Angola.
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