A la loupe : Chine, Japon enterrent la hache de mer

Entre Chine et Japon, il aura fallu sept mois de négociations difficiles pour aboutir à ce résultat mince, mais qui change toute la donne régionale: un accord sur le partage des hydrocarbures de mer de l’Est autour des îles Diaoyu (Senkaku), à 600km au sud d’Okinawa. Le 18/06, les capitales publiaient leur projet d’exploitation conjointe du gisement gazier de Chunxiao (Shirakaba) et d’exploration d’un bloc près de Longjing (Asunaro).

Pour y parvenir, il a fallu voir défiler trois 1ers Ministres nippons en 3 ans, J. Koizumi (nationaliste haï de Pékin, parti en 2006), Shinzo Abe son fils spirituel (mais ayant admis la nécessité de rapprochement, parti en octobre 2007), suivi de Yasuo Fukuda, que Pékin attendait, fils du signataire nippon du traité d’amitié. Sa visite (décembre 2007), puis celle de Hu Jintao en mai 2008, relançaient la confiance.

En cet accord, les pays déclarent partager les ressources, malgré le vieux litige sur la frontière. S’alignant sur le droit de la mer, Tokyo la trace selon les ZEE, zone économique spéciale maritime, (autour des îles sous sa souveraineté), tandis que Pékin ne jure que par le «plateau continental», prolongation immergée de son relief. Depuis 2003, Tokyo reprochait à la Chine de pomper «ses» réserves, derrière la ligne contestée.

Sur Chunxiao, supposé contenir 64M de barils d’équivalent- pétrole, le Japon investira dans les 2 projets chinois. Sur Longjing, ils exploiteront en JV des réserves estimées à 116Mt—une misère, face aux 3,26MM barils supputés dans toute la mer de l’Est.

Cet accord encore très parcellaire permet aux pays d’affirmer la vocation de «paix, coopération et d’amitié» pour cette mer qui les séparent, tout en réservant leurs droits respectifs. C’est tout ce que pouvaient se permettre pour l’heure Pékin et Tokyo, vu le lourd passé qui les séparent et les atrocités (encore partiellement niées) de l’armée du Mikado en Chine des années ’30 à ’45.

Ainsi le naufrage (10/06) d’un chalutier taiwanais coulé par un garde-côtes nippon (Tokyo s’en excusa le 20/06), causa l’incursion dans les Diaoyu d’une flottille nationaliste taiwanaise, et le 18/06, une tentative de manif à Pékin, prétendant bouter Tokyo hors de l’archipel… Cette même évidente peur, au Parti communiste, vis-à-vis de la rue chinoise, avait contraint Pékin (30/05) à dissuader le Japon d’envoyer son aide d’urgence au Sichuan par C130 militaire. Ce qui ne l’a empêché, le 18/06, d’accueillir à l’arsenal de Zhanjiang, le destroyer japonais Sazanami (4650t) : c’est une première !

Avec cette réconciliation ébauchée, le bon sens reprend ses droits -même en affaires. Un groupe comme Nissan prévoit d’augmenter ses ventes de voitures de 64% d’ici 2012, franchissant la barre du million. Et les Chinois peuvent enfin avouer qu’ils préfèrent 1000 fois le « made in Japan », au produit « national » !

 

 

Avez-vous aimé cet article ?
Note des lecteurs:
0/5
10 de Votes
Ecrire un commentaire