Après le séisme, la vie reprend—la Chine retourne à sa routine. Trois vieux démons viennent la hanter cette semaine, dossiers ignorés depuis des décennies. Mais signe de mutation historique, tous sont en effervescence, porteurs d’embryons de solutions!
[1] Avec Taiwan, depuis l’arrivée aux affaires du Président Ma Ying-jeou (20/05), c’est « l’amour ».
En Chine du 31/05 au 5/06, Wu Poh-hsiung, l’insulaire chef du Kuo Min Tang, reçut la vague promesse que l’armée gèlerait le déploiement de missiles contre l’île (qui sont déjà 1300), et préparerait leur démantèlement -dont Ma fait justement une pré condition à toute discussion. D’autre part, le Bureau des affaires taiwanaises reçoit un chef plus jeune (55 ans) et dynamique, Wang Yi, vice ministre. Enfin, Pékin offre de négocier tambour battant (11-14/06) la réouverture des lignes aériennes directes, voire un siège à l’OMS, l’organisation mondiale de la santé…
Le chef de l’Etat taiwanais de son côté, fait preuve de la même bonne volonté en rouvrant le mausolée de Chiang Kai-shek, qu’avait fermé son rival indépendantiste, Chen Shui-bian. Et déjà se profilent de gros contrats, le raccordement à Taiwan au réseau chinois de cartes de débit UnionPay (pour ravitailler les millions de futurs touristes chinois), l’installation à Xiamen de Hon Hai, n°1 mondial de l’électronique, qui ouvrira une usine d’écrans LCD avec 40.000 employés sur 800.000m², au prix « de milliards d’Euro »…
[2] Sur le 19. Anniversaire du massacre de la Place Tian An Men (4/06/1989), Ma Ying-jeou s’est adressé au leadership en termes ambigus, mi critique, mi louangeur, marquant sa volonté de rappeler publiquement cette date-phare, mais d’éviter de blesser le régime… Cette année encore, sur le continent, tout a été fait pour occulter la commémoration, sur internet (100.000 policiers virtuels), et sur la place. Intimidées, les 128 «mères de la Place » (ayant perdu leur enfant la nuit fatale) cessaient «provisoirement» d’exiger la révision du verdict officiel sur le printemps de Pékin (celui d’«activité contre-révolutionnaire»), dans l’espoir d’une hypothétique pension -car bon nombre d’entre elles vivent proches du besoin. Des voix de l’étranger ont réclamé l’élargissement des 130 dissidents de l’époque encore en prison—le pouvoir s’en est « indigné ». On voit ainsi la survivance de l’intransigeance officielle, mais avec deux légers progrès. Des dissidents se disent «plus à l’unisson » avec le régime, souhaitant s’associer à l’action nationale d’aide aux sinistrés du Sichuan. Et d’autre part, c’est à ce moment, 10 ans après sa mort, que sort l’évaluation du massacre par l’ex-Président Yang Shangkun : 15.000 arrêtés, 70 exécutés, 600 morts par balles… C’est un voile levé sur un très lourd secret d’Etat. Amorce d’un dégel ?
[3] Au Tibet 90 jours après les émeutes, règne la tension. 80 nonnes auraient été arrêtées depuis le 14/05 à Dragkar Ganzi, Sichuan, et la Chine dénonce trois tentatives d’attentats à la bombe—16 arrestations depuis le 14/05.
Protégé de Hu Jintao et déjà l’homme fort au Toit du monde, Zhang Qingli vient d’être promu Secrétaire provincial. Enfin, pour cause de « reconstruction au Sichuan », Pékin vient de repousser la 2ème ronde de palabres avec le Dalai Lama, fixée au 11/06… Seule nouvelle non négative : à Lhassa, les autorités affirment préparer la réouverture du Tibet au tourisme étranger, pour début juillet !
Sommaire N° 19