Matières 1ères : shopping hors frontières
En période de coup de feu sur les matières 1ères, la stratégie chinoise d’achats de réserves à travers le monde est plus que ja-ais d’actualité, à tout prix, payé sur les abondantes finances de l’Etat et des firmes.
[1] En Australie, Sinosteel inflige un revers peut-être décisif à Murchison, son rival pour la reprise de Midwest: il porte sa part du minéralier de 33 à 40%, surenchérissant à 1,3MM$ et surtout, acceptant de renoncer au contrôle majoritaire. Midwest est une position à prendre : sous 5 ans, sa production de 1,1Mt de minerai de fer annuels devrait passer à 16,5Mt.
[2] Plus osé, Jiangxi Copper et China Metallurgical emportent pour 30 ans la concession de la mine de cuivre d’Aynak en Afghanistan, prospectée dès les années ’80 par l’URSS. Nul ne s’était jusqu’alors risqué à l’exploiter, en raison des infrastructures importantes nécessitées, une centrale thermique de 400MW et une ligne ferrée, à travers des zones d’insécurité… Les deux compagnies paieront 808M$ selon une source, 3,5MM$ selon une autre. La mine doit être ouverte sous 60 mois -la ligne ferrée ira du Xinjiang au nord, au Pakistan (4000 km via Tadjikistan) -il s’agit donc aussi d’un projet politique arrimant l’Afghanistan à la Chine. Jiangxi Copper paiera 20% du projet, mais rachètera au moins 50% de la production. Il y aurait, sous la roche, pour 11Mt de cuivre pur.
[3] Au Niger, pays enclavé où elle exploite déjà deux gisements, la CNPC, la compagnie nationale pétrolière, ose s’engager pour 5MM$ sur le bloc d’Agadem, pour en explorer puis exploiter les 324M de barils de réserve. L’an dernier encore, ce pétrole était considéré inexploitable. Mais aujourd’hui, à 130$/baril… Il faudra construire un pipeline jusqu’à Zinder (600km), et une petite raffinerie (20.000 barils/j) pour les besoins locaux. Le reste revenant en Chine via le Nigeria.
A Hong Kong, l’ICBC passe et gagne
1ère banque en Chine, dans la botte des 10 majeures mondiales, l’ICBC reçoit le 2/06 l’agrément de l’autorité boursière à Hong Kong pour une banque d’investissement destinée à préparer les entrées en bourse de HK (HKSE) de groupes chinois en parts « H ». Ce type d’émissions d’au moins 100M² était jusqu’alors l’apanage de géants américains tels Morgan Stanley.
L’ICBC tient déjà sur le rocher deux branches de courtage (dont ICEA, filiale conjointe avec BEA), mais manque d’un réseau international. Elle aura donc moins de problèmes à trouver ses clients (parmi les 2,72M de firmes chinoises ayant un compte chez elle) qu’à les servir… D’autre part, il se trouve que jusqu’au 28/05, l’ICBC était au coude à coude à Hong Kong avec China Merchants pour la reprise de Wing Lung,ban-que familiale. Alors que la surenchère s’envolait, Pékin était intervenu, imposant un prix max. (à 2,85 fois la valeur comptable, soit 4,5MM$), puis un vainqueur, Merchants. Dans ces conditions, la licence à l’ICBC apparaît un lot de consolation, octroyé moins par HK que par la Chine. Moyennant une légère entorse au principe de non-ingérence de «一国两制, «un pays deux systèmes».
Dongfang Electric, Phoenix qui renaît de ses cendres
Sous le séisme, Dongfang Electric a perdu son usine de Hanwang, 500 hommes et 700M$ d’actifs.
Mais le soutien public arrive : pour ses 1ers besoins, ce n°2 national des turbines à vapeur recevait de sa tutelle SASAC (State-Owned Assets Supervision and Administration Commission), 71M$. Puis le 24/05, il annonce une commande de 648M$ du groupe Huaneng pour six centrales thermiques de 660Mw ou éoliennes, destinées au Shaanxi. Un autre contrat important, lui vint d’un autre électricien, Huadian.
Par ailleurs, à plus longue échéance, Donfang Electric s’est vu confier, avec son partenaire Alstom, la fourniture des turbines géantes de 1,75Gw chacune, destiné aux deux réacteurs nucléaires commandés en 2007 à Areva pour le site de Taishan (Guangdong). Il y en a pour 300M² à partager. Pour l’heure, Dongfang tente de se réorganiser, et délègue à la concurrence en Chine et ailleurs certains contrats sur son carnet de commande, afin de pouvoir honorer ses échéances. Une phase de redistribution qui pourrait profiter à Alstom, son partenaire historique !
Sommaire N° 19