Editorial : Un printemps oublié

Omnubilée par ses grandes nouvelles (angoisses terroristes, émeutes tibétaines, attaques sur la torche olympique, pollution, corruption, emploi), la rue chinoise finirait par en oublier d’autres moins spectaculaires mais aussi fortes, et qui occupent au moins autant les esprits :   

[1] La pénurie en grain s’aggrave : le ministère des chemins de fer vient d’ordonner l’envoi d’urgence (avant le 30/06) de 10Mt de blé et de riz du Nord-Est (grenier du pays), vers le Sud. Il faut dire qu’en 4 mois, le cours du grain à l’import, a monté de 62,5% (Chicago futures /juillet).

A ce prix, les ports ont du mal à résister à l’appel à la contrebande, transbordant le riz de nuit en haute mer, avec des complices de Taiwan ou d’Asie du Sud-Est. A Ningbo et Hangzhou en quelques semaines, cinq tentatives ont été avortées, et 170t de grain saisies -mais pour une jonque stoppée, neuf autres passent… Le Conseil d’Etat ordonne aux autorités maritimes de redoubler de vigilance. Presque chaque jour pour sa part, comme un mantra, la NDRC rappelle qu’elle détient dans ses silos «150 à 200Mt de grain dont 70% de riz, assez pour 6 mois de besoins des plus grandes villes ». Mais donne aussi consigne, partout où faire se peut, d’importer (de l’huile), de stocker (de la viande). Prévoyant une pénurie structurelle mondiale, elle prépare l’achat de «mines  vertes » -de vastes terres arables en Sibérie, Amérique latine. Une firme de semences de Chongqing réserve 300ha de rizière en Tanzanie… Mais d’autres pays tels l’Australie voient la démarche avec méfiance !

Reste une dernière voie : les OGM. A Wuhan, le professeur Zhang Qifa annonce la découverte du gène Ghd7, qui détermine à  la fois le volume de l’épi, la durée de floraison et la hauteur de la tige. Permettant de doubler la récolte – à condition de sauter le pas de l’alimentation génétiquement modifiée!

[2] Au Guangdong, face  au déploiement de radars et caméras contre leurs excès de vitesse, les conducteurs s’équipent massivement d’un gadget électronique qui, au 1er signal, change les chiffres de la plaque. Efficacité redoutable : à Yangjiang, un policier admet que plus de 50% des véhicules filmés, plaques maquillées, s’avèrent impossibles à identifier : à bon chat, bon rat !

[3] On se demandait quel prix payait Taiwan, pour ses ambassades qui sont toutes dans des pays pauvres.

La réponse vient de tomber, suite à la révélation de cet appel d’offres manqué, en 2006, à la Papouasie-Nelle Guinée. Comme dans un feuilleton de série B, de très discrets intermédiaires étaient venus négocier, et un cachet de 30M$ avait été déposé sur un compte à Singapour. Puis, Port-Moresby avait fini par rejeter l’offre : c’est alors qu’un des négociateurs s’était évanoui dans la nature «oubliant» de rendre le magot. Pour cette indélicatesse dévoilée trois ans plus tard, Chiou I-Jen le vice 1er ministre et James Huang  le ministre des affaires  étrangères, démissionnent et sont sous enquête judiciaire, interdits de quitter l’île. Ce scandale « applique la dernière couch e» à l’image d’incompétence et de corruption du DPP, le parti indépendantiste, à quelques jours de la passation du pouvoir au KMT, le Kuo Min Tang. Les experts, sur ce sujet, se posent deux questions simples : dans l’échec de 2006, et dans sa révélation en 2008, Pékin tire quelles ficelles?

 

 

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