Engagé depuis 2006, le conflit entre Danone et sa filiale Wahaha rebondit.
A l’automne à Pékin, le Président français Nicolas Sarkozy avait négocié avec son homologue Hu Jintao une assistance aux deux groupes de yoghourt, eau et biscuits, devant geler les poursuites durant trois mois de trêve. Le géant européen accuse sa filiale locale à 51%, d’avoir créé jusqu’à 39 structures illégales, et de produire et écouler ses «vrais-faux produits», piratant ainsi la maison-mère.
Trois scénarios avaient été concoctés pour ces négociations :
[1] placer les actifs chinois des deux sociétés en une structure cotée en bourse,
[2] que Danone cède tout à Wahaha,
[3] ou l’inverse.
Danone favorisait la 1ère solution: chacun détiendrait 40% des 39 unités douteuses (Wahaha devait défrayer Danone de 7MM$), les 20% restants allant en bourse.
Or, la limite du 10/04 est passée sans accord : à peine l’échec prononcé, la revue financière privée Caijing dévoile (14-04) la mi-se en examen fiscal « depuis août » de Zong Qinghou, le PDG de Wahaha. A Hangzhou, siège de Wahaha, les impôts accusent ce 23ème milliardaire chinois d’évasion de 300M¥ d’impôts (43M$) depuis 1996. Avec l’aplomb qui fait sa « marque de fabrique », Zong déclare que la plupart du montant était un prêt sans intérêt de Danone, qu’il en a déjà remboursé l’essentiel, et qu’il «coopère activement» avec l’autorité fiscale. Il aurait déjà réglé dès octobre la majorité des arriérés (200M¥)…
Le sens de la démarche publique est sans ambiguïté: pour cet-te indélicatesse de + de 100.000¥, et + de 30% d’impôt évadé, selon la loi, Zong est passible de sept ans de prison et d’une amende égale à cinq fois la fraude. Autrement dit, l’Etat s’apprête à mettre sous les verrous son flamboyant capitaliste, à moins qu’il ne se soustraie à la justice—ce qui lui ferait probablement tout perdre.
D’où ces 2 questions :
[1] Pourquoi Pékin a-t-il attendu si longtemps? Réponse plausible : Zong, député et célébrité, jouissait de puissantes protections.
[2] Pourquoi lance t-il a présent la procédure? D’abord, car tous les moyens de discussion sont épuisés—le gouvernement est soucieux de son image de crédibilité, face aux investisseurs. Puis, Pékin se soucie de ne pas perdre sur son sol le service du n°1 mondial des produits laitiers, en pleine période de crise alimentaire, alors que l’objectif est de sortir de la pénurie. Enfin, un peu comme hier en Russie -Poutine avec le patron du groupe pétrolier Youkos – le rôle de l’Etat, n’est pas forcément de protéger ses nouveaux milliardaires dans leurs jeux financiers au-dessus des lois. Pour toutes ces raisons, le groupe d’Antoine Riboud voit le ciel se lever, et se dit « optimiste », quant à l’issue du conflit !
Sommaire N° 14