Editorial : Hong Kong triomphe mal à l’aise…

En ces 1ers jours de 2008, c’est Hong Kong qui retient l’attention, après que le Parlement chinois ait annoncé (2/01) que la RAS, la Région administrative spéciale, n’élirait, qu’en 2017 son chef de l’exécutif au suffrage universel, et son Legco (l’assemblée locale, de 60 députés), qu’en 2020 – au mieux. 

Depuis le retour à la Chine en  1997, l’opposition pan-démocrate, majoritaire dans l’opinion mais divisée, réclamait la date de 2012. Trois semaines avant, Donald Tsang, l’actuel leader avait annoncé la couleur, dans un rapport remis à Pékin : « l’opinion espère 2012, mais 2017 serait acceptable »… Cependant, dans le panorama politique de Hong Kong, rien n’est simple !

Avec huit lignes sillonnant sous terre et mer, son métro est le meilleur du monde, toujours à l’heure, doté d’une carte de paiement Octopus d’avenir, valable pour les bus, ferries et trams. Son aéroport est une success story, à la croissance de 20%/an – trafic fret de 3,5Mt l’an passé, 35% de ses exportations en valeur. Sa bourse est la 6ème par la taille, mais la 2de en valeurs nouvelles, derrière New York. Armée de tels outils, cette métropole de 7M d’habitants a créé en Chine 12M d’emplois et  maintenu depuis 2005 un taux de croissance de 7% : elle est la 12ième puissance économique mondiale…

A l’HKTDC, bureau de promotion commerciale, Helen Chan explique ce bilan flatteur, par des décennies de politique libérale éclairée : une traque intransigeante de la corruption par l’ICAC (Independent Commission against corruption, la très populaire police des affaires), une administration légère mais compétente, des taxes et impôts bas, et un  programme systématique d’éducation continue ayant permis en 12 ans aux diplômés supérieurs de passer de 19 à 32% des actifs.

Mais d’autres données manquent à l’appel :

[1] Pékin s’efforce de préserver Hong Kong des crises cycliques qui déferlent depuis 10 ans sur l’Asie (1997- «vendredi noir» monétaire, 2003-SRAS, 2005-grippe aviaire), pour lui faire oublier ses rêves de démocratie : il lui offre des M de touristes, et un cadre d’investissement préférentiel.

[2] La richesse est aux mains d’un club restreint d’entrepreneurs tels Li Kashing ou Tung Cheehwa, qui ont reçu en 1997 les clés de la ville : plus que la Chine, ils sont les 1ers opposants au partage de son pouvoir.

Or, l’arrangement commence à gripper, faute d’une représentation adéquate de pans entiers de la société insulaire. Mal partagée, la croissance ne suffit plus. Prostitution et mafia remontent, avec la pauvreté, tandis que reculent l’anglais et la liberté d’opinion : faute d’un message clair du pouvoir, la presse est désorientée.

Mais l’opposition se prépare, guettant l’occasion de lancer une méga-manifestation, comme elle l’avait fait en 2005 et 2006 : 500.000 citadins avaient forcé Pékin à renoncer à un projet de loi réprimant l’opinion… Ainsi, la Région administrative spéciale, de plus en plus, laisse le sentiment que l’actuel compromis fragile sera toujours plus dur à maintenir, entre ces trois composantes que sont le Parti communiste, les magnats, et une rue, toujours plus éduquée, et qui (à l’instar de toute bourgeoisie naissante) réclame sa part des pouvoirs. De ce bras de fer de David et Goliath, dépend l’avenir de cette ville-phare, synthèse de l’Est et de l’Ouest en Extrême Orient, qui va devoir bientôt, prouver sa capacité à maintenir sa différence !

 

 

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