La destruction (11/01) d’un satellite chinois par un missile à 850km du sol, inquiète la communauté internationale. Dès décembre 2006 pourtant, au Livre Blanc de la politique chinoise spatiale, le tournant était déjà – discrètement- inscrit : la traditionnelle antienne du PCC contre l’armement spatial (US) avait disparu, remplacée par l’objectif de « développer son industrie spatiale… en matière de défense ». Après son test, Pékin multiplie les propos rassurants, d’« utilisation pacifique de l’espace », et d’« opposition à une course à l’armement ».
Pour Washington, bien que la Chine n’ait violé avec ce test aucun traité in-ternational, l’alerte est sérieuse. C’est une menace indirecte sur le système de défense des USA. L’outil stratégique dont l’Armée (APL) cherche la maîtrise, a pour fonction, en cas de conflit, d’anéantir le réseau américain de satellites de communications et d’observation, qui assure 90% de sa supériorité tactique. C’est la 杀手尖 shashou jian, «dague du tueur», l’arme décisive.
Pourquoi la Chine a-t-elle pris un tel risque de confrontation? Peut-être en réponse à la prétention du Président G.W. Bush affichée en août, opposant aux demandes sino-russes de traité de démilitarisation de l’espace une fin de non-recevoir, et revendiquant pour son pays une totale liberté d’action hors de l’atmosphère. Mais cette thèse est infirmée par un détail bizarre. De source américaine, le ministère des affaires étrangères chinois n’a pu confirmer le test à Washington que cinq jours plus tard – la diplomatie américaine soupçonne qu’il n’ait pas été mis au courant.
Le Japon et l’Union Européenne aussi s’inquiètent des ambitions chinoises (cette dernière, par la voix de sa présidence allemande), et rappellent leur voeu d’un espace exploré à des fins pacifiques et exploité dans un profit universel. En fin de compte, ce test risque donc de freiner les coopérations militaire et spatiale de la Chine avec l’Ouest, dont elle réclame pourtant la technologie. Jacques Chirac sera désormais seul à militer pour la levée de l’embargo de l’Union Européenne aux ventes d’armes à la Chine. La demande de partenariat déposée début janvier près de l’Otan par le 1er ministre nippon Shinzo Abe, a désormais de meilleures chances d’aboutir. Enfin, ce test pose une série de doutes, dont la Chine se passerait bien : quel type de puissance veut-elle devenir, de quelle indépendance jouit son armée face à l’Etat, quelle crédibilité accorder à ses engagements politiques et militaires?
Sommaire N° 4