Samedi 1/12, jour mondial du SIDA, permit à la Chine de livrer un bilan faiblement optimiste: elle ne gagne pas sur tous les fronts, face à un virus comme doté d’une intelligence guerrière, qui cherche la faille, dans la Muraille ébréchée de la santé chinoise.
Le nombre officiel de sidéens s’élève à 223.500. Celui des malades réels serait de 700.000 soit + 50.000. Ils étaient +70.000 en 2005 : la courbe s’affaiblit. Certes, la tendance mondiale elle, baisse de 40M à 33M. Mais cela peut traduire, en Chine, d’une détection plus précise, plutôt qu’une aggravation. En tout cas, au nom du Fonds Mondial de l’Organisation Mondiale de la Santé, anti-sida, tuberculose et hépatite, le professeur français Michel Kazatchkine se dit satisfait de la Chine, et du déroulement de 10 programmes de prévention et d’éducation à travers 30 provinces, financés par 424M$ du Fonds.
Plus inquiétante, est la mutation des sources de contamination. Selon Chen Zhu, le nouveau ministre de la santé, la transmission sexuelle du SIDA est désormais, et de loin la première source, avec sur les nouveaux cas, 12% venus de l’homosexualité, 44,7% de l’hétérosexualité (le plus souvent vénale), et 42% de l’héroïne, par partage d’aiguille. Avec désormais deux-tiers des infections d’origine vénérienne, c’est le moment redouté par les savants : la drogue, qui concerne peu de gens, a joué le rôle de « mèche », allumant la charge d’un SIDA qui risque de se diffuser en masse par le biais du sexe, en des relations non protégées. Même si 40% des homosexuels prennent désormais le condom, contre 17% en 2002.
Les équipes de lutte voient leur travail freiné par l’absence de moyens, y compris aux ONG (souvent non reconnues, et jamais financées par l’Etat), le faible suivi médical des campagnes, et la vague de migrants (140M) sans feu ni lieu. Les préjugés contribuent aussi à inciter le malade à se cacher.
La vente du sang a reculé au Henan, mais se maintient partout, accuse la doctoresse Gao Yaojie, surtout au Guizhou, où 1,4M litres de sang y auraient été achetés par les laboratoires locaux.
Mais en face, les choses progressent. Les jeunes Pékinois donnent leur sang. Bien des compagnies étrangères s’allient dans cette croisade. L’Etat autorise l’import du ritonavir, nouveau cocktail médicamenteux d’Abbott (US). Enfin, est créé (27/11) le CARC, centre antisida tous azimuts, filiale de trois facultés de l’université Tsinghua (médecine, communication, sociologie), avec à sa tête David Ho, sino-américain célèbre, un des inventeurs de la trithérapie en 1996.
Par cette création, l’Etat veut rehausser ses moyens d’un cran —mais s’abstient toujours de puiser dans ses puissantes réserves monétaires (seuls 116M$ investis cette année), laissant l’essentiel de la charge à l’étranger, et décourageant ainsi le don privé…
Sommaire N° 39