Le Vent de la Chine Numéro 28
Le XVII. Congrès est annoncé pour le 15/10, précédé du dernier Plenum du Comité Central du XVI. Congrès. Ce que cela signifie en clair : les cartes politiques du prochain quinquennat sont distribuées, les compromis entre tendances ont été trouvés pour ce plenum capital, qui va désigner non seulement le prochain gouvernement (2007-2012), mais aussi le successeur de Hu Jintao pour l’ère suivante – l’héritier des rênes du pays. Des mois de luttes secrètes s’achèvent !
A titre indicatif (hasardeux mais plausible), déjà, une liste du futur Comité Permanent, l’organe suprême, fuit depuis Taiwan (28/08). Des neuf membres sortants, 4 fidèles de l’ex-Président Jiang Zemin s’y maintiendraient : Wu Bangguo (Président de l’ANP), Zeng Qinghong (vice-Prsdt) Li Changchun et même Jia Qinglin. Deux sortent, pour «limite d’âge»: Luo Gan (72 ans, protégé de Li Peng) et Wu Guanzheng, 69, le «policier du Parti» (sans allégeance). Selon ce scénario, les deux tendances «Hu» et «Jiang» ont serré les rangs pour as-surer «la stabilité» et leur avenir. Hu Jintao, Zeng Qinghong et Wen Jiabao, le populaire 1er ministre resteront pour un 2d mandat. Li Keqiang (52 ans, Serétaire du Parti au Liaoning) est le probable dauphin du régime. Entreraient avec lui au omité Permanent Yu Zhengsheng, Secrétaire du Hubei, et Zhou Yongkang, ministre de la sécurité publique, fort de ses fichiers sur tout l’appareil.
Sur cette trame, d’autres noms viennent s’ajouter, va-riantes, à l’infini : des technocrates jeunes (proches des 50 ans), diplômés et capables, se pressent aux portes du Comité Permanent, voire du Bureau Politique (22 membres) ou du Comité Central (220 membres) : Li Yuanchao (Secrétai-re du Jiangsu), Xi Jinping (récemment promu à Shang-hai), Wang Yang, l’homme de Chongqing hier distingué par sa gestion d’un conflit explosif, Liu Yandong, qui si elle réussit, serait la 1ère femme à monter si haut.
Parmi les perdants figurent Jiang Mianheng, fils de l’ex-n°1, et You Xigui, son chef de la garde. De l’autre bord, sont sacrifiés Zheng Bijian, concepteur de la réforme sous Hu Jintao, et surtout Jin Renqing, le ministre des finances : au total, 5 ministères changent de maîtres -promus ou mis au placard : finances, sécurité publique, culture, COSTIND (recherche en armements), et «supervision» (justice interne du Parti). Aux deux derniers postes accèdent Zhang Qingwei, commodore du programme spatial, 46 ans (le benjamin du cabinet), et Ma Wen, une des trois femmes à rang de ministre.
Sous réserve d’inventaire, un nom fameux manque à l’appel des fonctions suprêmes : Bo Xilai, ministre du commerce, peut-être -déjà—pénalisé par son âge de 58 ans, ou sa fonction trop médiatique : les vrais « poulains » vivent dans l’ombre de leurs protecteurs !
Le programme du XVII. Congrès est plus clair : priorité à la qualité des produits, leurs prix (halte à l’inflation), à la réduction des disparités de fortune, de la pollution, de la corruption. Le tout, assorti d’une vague campagne ultérieure pour associer l’opinion, les 8 mini-Partis démocratiques, la bourgeoisie montante, à toutes ces luttes… Histoire d’améliorer leur chance d’aboutir !
Les 27 et 28 août, pour le 35ième anniversaire des relations sino-allemandes, Angela Merkel n’a pas failli à sa réputation de « main de fer dans un gant de velours ».
Dès son arrivée aux affaires, elle avait rompu les années d’amitié sans critiques de son prédécesseur Gerhardt Schroeder. Elle avait dénoncé sans état d’âme les actions autocratiques de Pékin sur l’opinion. Tout d’abord, Pékin peu habituée, lui avait tenu rigueur, comme en mars 2007 à Berlin, par la voix de son ambassadeur. Mais la chancelière tenait bon, et pas moyen pour la Chine, de faire l’impasse sur cette puissance commerciale !
Angela Merkel arriva à Pékin en position de force, et y imposa un style très différent : renonçant à la traditionnelle course aux contrats (seul, Thyssen signe une JV de vilebrequins à 200M$ près de Nankin), elle réclamait de parler avec Hu Jintao, Wen Jiabao et tous les preneurs de décisions. Il s’agissait désormais de communiquer, dans un style quasi-scolaire, tout en exprimant sans ambiguïté ses valeurs. Il s’agissait aussi de désigner au partenaire le plus court chemin pour affronter ses propres crises, tout en négociant sur tous les fronts conflictuels à la fois, les maillons faibles de la relation entre ce pays en développement et le monde riche :
– Contre le réchauffement global, quatre mois avant la ronde de Kyoto-II, (en décembre à Bali) Angela Merkel suggéra que si la Chine prend des engagements contraignants, elle recevrait en échange sa part des technologies européennes d’économies d’énergie. Est-ce un hasard si juste après, Hu s’engagea à soutenir, à Vienne cette semaine, une « déclaration commune » de l’APEC, sur ce sujet ?
– Sur les droits de l’homme, Angela Merkel rappela que «la dignité humaine est indivisible», et s’entretint avec des journalistes dissidents, dont Li Datong, journaliste limogé pour sa plume libre, qui lui fit cet hommage : « fille de l’Est (fille d’un pasteur de RDA), elle nous comprend mieux que d’autres leaders de l’Ouest ».
– Aux femmes, elle lança cet encouragement rare : « vous avez besoin de promotion sociale », et à leurs maris, « soutenez vos épouses et vos familles ».
En fait de concurrence internationale, elle martela que des nations-partenaires, pour s’entendre, devaient jouer le jeu commercial avec les mêmes règles.
Angela Merkel, qui inaugura aussi à Nankin trois ans de renforcement des liens et d’image de leurs pays, suggéra qu’elle retournerait à Pékin chaque année. Manière de bâtir l’avenir commun sur un travail d’influence, et non plus seulement sur quelques gros contrats !
Cinq lois toutes neuves, dont celle anti-cartel !
En quelque sorte, la loi anti-monopole adoptée au Bureau de l’ANP, le Parlement, le 30/08 répond au veto du Congrès US en 2005, au rachat du pétrolier californien Unocal par la Cnooc (China National Off-shore Oil Corp). Jusqu’alors, la Chine faisait sienne le credo américain d’un marché régi par la loi de l’offre et de la demande, et avait dû déchanter. Pour autant, ce texte ne serre pas la vis, mais se contente d’intégrer l’arsenal réglementaire déjà en place pour les fusions-acquisitions. Là où l’étranger applaudit de bon coeur (Jorg Wuttke, Président de la Chambre européenne, James Zimmerman, Président d’Amcham), est le volet anti-cartel de cette loi -qui fut bloquée 13 ans par les lobbies intérieurs. Il réprime les monopoles visant à manipuler les prix hors-marché (comme viennent d’y être « pincés » les géants de la nouille instantanée). Seul monopole toléré, sans distinction d’origine: celui porteur d’innovation ou de progrès technologique. A part ce texte, quatre autres lois sont passées :
– prévention épidémiologique,
– immobilier : protège mieux le petit propriétaire contre l’expropriation – mais après la bataille, une fois achevé le grand cham-bardement des villes, aux sols rachetés « une bouchée de pain »
– promotion de l’emploi – qui promet l’égalité des chances aux femmes, aux minorités ethniques, aux malades et handicapés, et
– « réponse aux catastrophes naturelles », qui interdit au baron rouge de province de taire un accident sous sa juridiction. Suite à un débat houleux, le texte adopté renonce aussi à taxer le journal qui aura publié la mauvaise nouvelle. Comme on voit, toutes ces lois, si appliquées, vont –timidement- dans un sens d’ouverture!
Chronique de désastres annoncés
Les 19 crues de l’été ont causé 1.138 décès, dit Chen Lei, ministre de l’eau (29/08). Elles affectèrent au moins 139M de gens (1/10ème de la population !), détruisant 883.000 logis.
Entre Zhejiang et Fujian, des typhons comme Sepat (19/08) forcèrent des millions d’évacuations. D’autres désastres ont pour seule origine la faute humaine, voire la corruption : comme l’effondrement du pont en construction à Fenghuang (13/08, Hunan) qui causa 64 morts. Enfin, les 1.138 fatalités citées, n’incluent pas les 172 hommes inondés depuis le 17/08 dans leur mine de Xintai (Shandong). Cas spécialement choquant, vu le nombre d’irrégularités relevées. Cette houillère quasi-épuisée (ne produisant plus que 0,8Mt/an) aurait dû être fermée depuis 2003, et les patrons ignorant les avis d’intempérie, avaient refusé de faire remonter leurs gars.
Pour calmer la population locale meurtrie et en colère, le bureau national de la sécurité du travail, refuse de conclure au simple désastre naturel et promet des sanctions. Entre temps, la série « noire » ne s’arrête pas : 12 morts à Baofeng (Henan) le 31/08, d’un coup de grisou qui lui aussi, pouvait être prévenu !
ACER/LENOVO — la chevauchée fantastique
Même si leurs «boards» ont approuvé le deal, on n’est pas encore tout à fait sûr qu’Acer (Taiwan) rachète d’ici décembre. pour 710M$ Gateway (n°3 US), tel qu’annoncé le 27/08.
C’est que pour Acer, reprendre ce groupe, serait du même coup souffler Packard-Bell, la filiale hollandaise de Gateway, à Lenovo qui la guignait, et s’assurer le 3ème rang mondial avec un revenu de 15MM$ et une production de 20M d’ordinateurs par an. Entre les deux groupes chinois, force est de constater que l’insulaire progresse bien plus vite que le continental avec, au 2d trimestre, des livraisons de 4,26M de PC, soit +54%. Une avance qui résulte du passé.
Entre sa filiale IBM et sa chaîne pékinoise, Lenovo garde un écart de qualité et maîtrise moins bien qu’Acer, design, branding et intégration des pièces. Il a un problème de stratégie—comment imposer ses produits hors de ses frontières, de son marché captif. Entre ces deux-là, c’est aussi un peu le bras de fer Chine-Taiwan qui se reproduit. C’est surtout, l’aventure de jeunes Goliath, hier bas de gamme travaillant à façon pour l’Occident, qui escaladent aujourd’hui à toute vitesse l’échelle mondiale de la valeur.
L’aviation chinoise en quête de tapis volant
L’entrée de Singapour International Airlines (SIA) dans China Eastern (MU) vient d’être approuvée : 930M$ pour 24% de MU, dont 16% au transporteur et 8% à Temasek, le bras commercial de la cité-Etat.
Or, Air China (AC) qui avait tenté de bloquer l’opération par une contre-offre sur 10% de China Eastern, se dit tentée par un rachat de China Southern (CS), par la voix de son Président Cai Jianjiang. A notre sens, ces deux mouvements résument l’incertitude d’un secteur en quête de consolidation. Proche du pouvoir, le vent en poupe (150M² de profits au 1er semestre, +240%), Air China se sent l’âme à assister l’une ou l’autre de ses soeurs MU et CS, qui vont mal. La 1ère, car son fief est Shanghai, ville en disgrâce politique (l’effet Chen Liangyu, qui s’éternise : cet ex-Secrétaire du Parti local est expulsé semaine passée du PCC). Le second, car Canton sa ville, est un «désert aérien», au marché aspiré par Hong Kong…
En théorie, l’alliance Chine Eastern/SIA pourrait susciter des synergies, voire une fusion à long terme… Mais après plus d’un an, l’autre alliance entre Air China et Cathay Pacific de HK, possession croisée de 17,5% du capital, n’a porté aucun fruit : faute de liberté d’entreprise, voire de tradition d’audace gestionnaire. Aussi cette tentation d’Air China de reconstituer un ptérodactyle, 20 ans après l’avoir scindé, décontenance, jusque dans ses propres rangs : dès le lendemain, M. Cai se ravise, précise que son désir… n’est pas pour tout de suite : décidément, pour remettre à plat les ailes chinoises, pas de formule magique à l’horizon !
NB : l’autre technique, pour mener les transporteurs chinois à leur taille adulte, est l’endettement : Shanghai Airline commande 5 Airbus A321 pour 370M$, et Xiamen Airlines bloque 25 Boeing B737-800, pour 1,9MM$, discount non compris.
Quel est, au juste, le risque des subprime en Chine, nouvelles mauvaises dettes issues de titres immobiliers américains?
Les trois grandes banques admettent posséder pour 20MM$ de tels titres (cf VdlC n°27), mais début août, Goldman Sachs prêtait à la Banque de Chine pour l’an passé, 90,1MM$ de tels achats (dont la majorité en subprime), 25,6MM$ à l’ICBC (la banque de l’Industrie et du commerce) et 39,3MM$ à la CCB (la banque de la construction) : vulnérabilité qui devrait alourdir leurs pertes, bien plus qu’elles ne sont prêtes à l’admettre ! De source anonyme, même la Banque centrale avait acquis fin 2006 pour 100MM$ de ces titres US dans la tourmente – ses achats s’interrompirent en mai 2007, à l’aube de la tempête.
Le 29/08, la Banque centrale elle-même ordonne au secteur de dévoiler son exposition à ce risque -tout en se voulant rassurante : ces maisons à la gestion « conservatrice », auraient des réserves suffisantes pour absorber les pertes !
A toutes fins utiles, les trois soeurs ont clôturé le 1er semestre par de formidables profits : +62% à l’ICBC, +47% à la CCB, + 52% à la BdC. Cette performance suit une croissance du PIB de 11,9% au 2d trimestre, et des gains explosifs des firmes, dont 12% auraient été acquis en jouant en bourse. C’est pourquoi la Banque centrale, la CSRC (Qi Bing, chercheur) et Hu Jintao en personne (29/08) adjurent la finance de se préparer à une conjoncture moins souriante, tout en rappelant le risque d’investir en bourse, qui a quadruplé en 2006. D’autant qu’en quête de meilleur service, les clients les plus riches quittent les trois soeurs pour des maisons plus petites (CITIC, Merchants) ou étrangères…
Aux banquiers comme aux assureurs, les tutelles désignent le nouveau cap : éviter la bourse, aller vers les campagnes aux marchés encore vierges. N°1 de l’assurance-vie (47% du marché) avec 650.000 vendeurs, China Life abonde en ce sens, ayant vu son profit au 1er semestre mousser à +160% (les experts attendaient 85%), mais « le second sera moins bon», prévient Yang Chao, son Président.
NB : alors que la finance mondiale se couvre de nuages, Pékin a souci de rassurer. En cours de création, sa China Invest Co a reçu l’ordre pour l’heure, d’éviter d’acheter « des grandes entreprises occidentales », et de se limiter aux seules valeurs fiduciaires sur les marchés !
Pour les 180M de Chinois courbés sur leurs rizières, l’été fut néfaste : le climat extrême, les pestes et les insectes ont alourdi les pertes : 11M d’ha en sécheresse (2,14M ha de plus que la moyenne récente), et 9,7M ha en crues.
La récolte d’automne qui compte pour 70% de celle de l’année, sera mauvaise. Les 147Mt de maïs prévus, sont réduits à 125Mt -soit 22Mt de perte— 2 récoltes argentines de blé…
Pas d’inquiétude à avoir : la Chine garde le stock le plus fort du monde, estimé en 2001 à 230Mt (toutes céréales). Elle pourra donc puiser sur ses réserves. Mais depuis 1999, confrontée à une série d’années de « vaches maigres », elle recourt chaque année à cet expédient. Résultat : dès 2004, 60% des réserves étaient envolées (il restait 100Mt). Le déstockage a certes d’autres raisons : améliorer sa qualité, tenir l’engagement à l’OMC (Organisation mondiale du commerce) d’accepter plus de commandes étrangères. Ou encore, développer la demande en céréales pour le biocarburant, nouveau débouché…
Cependant, la médiocre récolte d’automne repose la question de l’autosuffisance, dogme stratégique : est-elle viable? Deux voies d’avenir sont possibles : un import plus fort, et l’arrivée de nouvelles technologies. De toute évidence, on va assister aux deux. Le high tech, signifie d’abord l’étranger, vu que la recherche locale en OGM, quoique avancée, n’est pas prête à aboutir à une autorisation à court terme.
Justement, un mariage se prépare entre Limagrain, le n°1 européen de la semence, et Longping, de Changsha (Hunan, 180M² de ventes/an), 1er producteur/marchand de semence de riz hybride, de piment, voire maïs et coton. Pour 45M², Limagrain prend 45% du contrôle du groupe méridional coté en bourse de Shenzhen, et bat sur le fil pour ce contrat, Dupont-Pioneer, le n°2 mondial (USA). Le Français pourra ainsi vendre localement ses semences, via le réseau commercial du partenaire, ce qui le fera « changer d’échelle ». Tandis que grâce à l’expérience mondiale de Limagrain, Longping pourra se faire les dents sur les marchés asiatiques, du Proche et du Moyen-Orient.
C’est ainsi, par ce type d’alliances, que l’agriculture chinoise prend sa place dans celle du monde, tout en se dotant d’outils pour résister à un environnement moins faste !
Firmes européennes—deux grands nettoyages
Deux groupes européens font face dans leurs branches chinoises à des affaires de corruption.
[1] Accusé par l’hebdo Wirtschaftswoche d’avoir obtenu par bakchich jusqu’à la moitié de ses contrats chinois de télécom, Siemens dément, mais admet des «comportements impropres» chez son personnel, et d’avoir congédié 20 cadres pour cette raison. Loin de se limiter au sol chinois, l’affaire est mondiale: 200M² manquants à l’audit auraient servi à financer des contrats sur divers continents.
NB : la Chine est un espace vital pour Siemens qui y a investi 1,5MM², veut y placer 1MM², et qui en tirait 5MM² de marché en 2006, qui doubleront d’ici 2010.
[2] En coopération avec les autorités, Carrefour, le distributeur aux 101 grandes surfaces, fait le ménage parmi ses directeurs locaux.
Huit d’entre eux sont aux arrêts, accusés d’avoir sollicité les faveurs des fournisseurs, sous forme de cartes de crédit, billets gagnants de loterie et factures discrétionnaires. De juin à août, la police a interrogé 22 suspects dont 12 fournisseurs et dix cadres « achats », entre Pékin et sept autres villes, dont Shenzhen. La source de la fraude est la liberté octroyée par le groupe aux cadres en Chine, de choisir leurs achats, fournisseurs et prix. L’absence de transparence, et la distance permettait aux indélicats de réaliser de gros profits personnels au détriment de la firme et du consommateur. Eric Legros, directeur général depuis 2006, a éventé la pratique.
NB : comme pour Siemens, l’affaire ne devrait pas avoir d’incidence sur la croissance de Carrefour en Chine, qui y générait 2,4MM² de chiffre en 2006, et compte ouvrir 25 magasins de plus cette année — sur ces bases assainies !
Anti-dumping européen : une cote mal taillée
En 2001, la Commission Européenne infligeait pour cinq ans un droit anti-dumping sur les ampoules néon à économie d’énergie originaire de Chine.
Au terme de la période, l’industrie chinoise n’empoche « que » 70% du marché de l’Union Européenne, estimé à 376M². Le reste allant à l’allemand Osram et trois autres producteurs. La question était posée, de savoir quelle suite à cette mesure expirant en octobre. Osram réclamait deux ans de délai « transitoire ». Tandis que Philips, ayant fait le choix de produire en Chine, réclamait l’abolition d’une barrière douanière lui coûtant 20M²/an.
En un jugement de Salomon, Peter Mandelson, le commissaire à la concurrence a obtenu (29/08) de ses collègues une prorogation d’un an. Bon pour l’emploi européen, mais mauvais pour le consommateur, et pour l’économie d’énergie. En tout cas, très bientôt, on peut s’attendre à voir les 10aines de compagnies productrices en Chine, renforcer leurs chaînes de production, rejointes par les industries européennes encore absentes sur la photo!
NB : A 5 pays dont la Chine, Bruxelles vient aussi (30/08) d’imposer une autre taxe antidumping, provisoire, sur le ferrosilicone (adjuvant des aciers spéciaux) : +35,5%. 1er producteur mondial, la Chine en a livré en Europe près d’1Mt, de janvier à juillet.
[1] Polémique, l’exploit de Zhang Huiming, qui vient de courir de Hainan à Pékin, 3500km pour célébrer l’avènement prochain des jeux olympiques.
C’est que Huiming, gracieuse petite, n’a que 8 ans, et a dû, deux mois durant se lever chaque nuit à 2:30 pour avaler 60km avant midi, suivie par son père à vélo électrique. Des associations étrangères pour l’enfance craignent que Huiming n’ait pas eu vraiment le choix, tandis que des médecins redoutent qu’elle ne le paie plus tard dans sa croissance. Le père balaie ces craintes : « c’était plaisant… comme un camp d’été »! Pesant 13kg, Huiming a quand même usé 20 paires de brodequins!
[2] Le 1er et l’ultime jour des Jeux Olympiques, pour les cérémonies, sont garantis hors pluie grâce au système du bureau météo de Shanghai qui insémine les nuages de sel d’argent—par avion, ou par fusées.
[3] A la cantine olympique, les 7500 athlètes auront du porc sans antibiotiques ni stéroïdes, luxueux produit du groupe Qianxihe.
De même, les légumes spéciaux auront poussé au lait de soja, au sucre et au vinaigre. Histoire que si les tests antidopage tournent au vinaigre, les sportifs n’aillent accuser le cuisinier !
Comme souvent au Céleste Empire, l’histoire qui va suivre est à tiroirs, dont les sens se dévoilent doucement, pour nous entraîner dans les arcanes de la famille chinoise. Elle nous révèle 2 ressorts immuables du conflit en Chine : le théâtre (un goût invétéré du bon mot, de la réplique) et la piété filiale, principe antique aujourd’hui bousculé par la mondialisation, avec sa vision du monde mécaniste et fonctionnelle, aux antipodes de la morale confucéenne.
A Xin’an, bourgade proche de Luoyang (Henan), de 1996 à 2000, Zhang Ping’An, commerçant sans talent, avait tapé son père d’un total de 20.000 ¥ : moins pour investir, que pour renflouer ses affaires toujours souffreteuses. Mais pour le père, s’en venait le temps de la retraite et avec lui, l’urgence de payer ses propres créanciers : à ses prières d’abord bonhommes, puis toujours plus inquiètes, Ping’An fit la sourde oreille, jusqu’au jour de l’an 2002 où, pressé par son hôpital de payer ses consultations, le patriarche assigna son fils en justice.
Par la monstruosité créative de sa réponse, Ping’An fut digne d’entrer dans les annales : méritant bien mal son prénom de Paix (平安), il contre-attaqua son géniteur et réclama encore plus que lui, au nom d’un préjudice que personne au monde n’avait encore osé revendiquer. « Dès la petite enfance », osa-t-il, il avait dû éructer cent fois par jour ce mot de pàpa (爸爸) qui lui écorchait la gorge. Tout comme sa femme, astreinte depuis 23 ans à cette humiliation, et depuis 20 ans leur fille, obligée d’appeler le père yèye (爷爷). Or, toute peine méritait salaire ! Au tarif forfaitaire, tout à fait raisonnable d’un ¥ / personne / jour, le père lui devait 35.225 ¥ – pas un de moins!
Le magistrat s’amusa fort de l’étrange démarche. Puis il la démolit d’un trait de pinceau, au nom de son irrecevabilité juridique. L’argument était « 痴人说梦 » (chi ren shuo meng), « du délire éveillé ». Débouté, Ping’An se vit accorder, pour rembourser, 4 ans de délai, assortis d’une astreinte à assurer au père ses repas.
Sortant du prétoire aux 3/4 groggy, Ping’ An sentit une main lui frôler le coude: celle, ridée comme une pomme, du père qui le consolait : « t’en fais pas, Petit… En repas, je coûte plus bien cher, et plus pour longtemps. Pour la dette, t’as qu’à changer ta Santana pour une QQ, et ça le fera… »
«T’inquiète, papa !», répondit l’autre, sans lui préciser que la VW hypothéquée ne valait plus un clou. Il perdait tout, et pourtant, cette perspective le mettait d’humeur bizarrement guillerette. Car elle lui portait l’intuition d’une libération bien inattendue. Le verdict l’enfonçait certes dans ses dettes, mais aussi, effaçait une tare dont il avait été l’inconsciente victime : celle de reporter sur ses parents la responsabilité matérielle de sa vie.
En Occident, souvent, telle dépendance s’estompe au 1er emploi, voire au mariage ou à la paternité. En Chine, sous un système d’éducation autoritaire, la jeunesse garde bien plus tard l’image d’un père écrasant, d’un Etat omnipotent, dont elle dépend entièrement. Elle en tire les conséquences -le maintien tardif d’exigences puériles envers ses parents !
Or à présent, Ping’An, sous la férule du juge, voyait cette porte se refermer. C’était un jeu à qui perd-gagne : libre enfin, à 44 ans, il larguait les amarres : hourra, hourra, la vie commençait là !
3-9 sept., Hu Jintao en Australie / le 8-9 Sommet de l’APEC à Sydney
4-8 sept. Shenyang : Salon int’l du transport et de la logistique
5-7 sept. Shanghai : Salon mondial de l’alimentation
5-9 sept. Pékin : Salon de l’industrie ferroviaire
6-8 sept. Dalian: World Economic Forum,
Thème: « The New Champions »