Editorial : L’écologie chinoise, en panne, jette le voile

Le 4/06, à 48h du sommet G8 de Heiligendamm, le ministre Ma Kai dévoila le 1er plan national contre le réchauffement global. Il rejetait tout objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), qui est la règle du jeu des pays signataires du protocole de Kyoto. Par fermeture de petites mines et d’usines, par économies d’énergie et développement des énergies renouvelables, Pékin espérait pour 2010, une coupe de 950Mt des rejets, 15% des émissions de 2004 (5,6MMt).

Problème: en 2005, la Chine a promis une coupe de 4% de ses besoins d’énergie et n’a atteint que -1,33%. Et même si elle tenait sa parole, son « plan national » vise beaucoup moins loin que celui visé par les nations de «Kyoto-II», à savoir d’ici 2050, contenir la hausse des rejets à +50% (par rapport à ’90), et le réchauffement à 2°C. La Chine justifie sa « traîne » par le «droit à la croissance», et la «responsabilité des riches», c’est-à-dire le refus des Etats-Unis de participer à l’effort commun.

Or de manière frappante, le 31/05, le Président George W. Bush proposait que «15 pays, gros pollueurs négocient entre eux» des quotas de réduction. Ces démarches chinoise et américaine, étaient identiques en esprit, rejetant l’effort collectif de Kyoto, qu’ils prétendaient troquer pour une action individualiste moins dérangeante. Symboliquement, avant de s’envoler pour l’Allemagne, Hu Jintao lançait une campagne pour resserrer les liens avec Washington: une de ses raisons, étant ce «partage du monde écologique », entre puissances conservatrices décidées à gagner quelques années sans rien changer.

Et pourtant, à Heiligendamm, G. Bush et Hu Jintao se sont trouvés en position délicate face à des européens et japonais bardés de rapports scientifiques accablants, qui les sommèrent de prendre leurs responsabilités, et une combative Angela Merkel, Présidente du G8. Et à l’issue, la moins mauvaise décision émergea : le G8, y-compris les Etats-Unis, promirent sous deux ans des coupes contraignantes, «substantielles», de GES. C’est un pas en avant certain : désormais, Pékin est seule dans son refus de participer à l’effort mondial !

Sur le fond, pourquoi Pékin s’enferre-t-il dans ce refus qui va l’isoler diplomatiquement, tout en privant ses industries d’une chance de guérir leur grande faiblesse face à l’extérieur, leur gâchis des ressources?

Il se trouve que selon plusieurs sources concordantes, le pouvoir vit une crise sans précédent. Wen Jiabao le 1er ministre s’angoisse de l’injustice, des privilèges des cadres «risquant de mener au désastre».Corruption et individualisme règnent sur les 71M de membres du Parti. Hu Jintao tente en vain de les combattre en multipliant les campagnes indigestes – la dernière intitulée « l’éducation aux trois consciences »…  Tout en rejetant tout appel à la démocratisation, suggéré par les anciens du Parti !

Ce syndrome explique au moins en partie l’absence d’initiative chinoise dans les affaires du monde : incapable de se faire obéir, Hu ne peut prendre d’engagements extérieurs, faute d’être sûr de pouvoir les remplir. D’autant moins qu’avant le XVII. Congrès, il doit réunir un consensus autour de lui et donc, ne pas heurter. Voici donc un prix que la Chine commence à payer, pour ses 20 ans d’impasse sur toute réforme politique: sa faible capacité d’engagement global !

 

 

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