A la loupe : Gaokao — petit ascenseur pour le paradis

Les 7-8/06, 10M de lycéens chinois subirent l’épreuve du feu, but d’années de marche-ou-crève scolaire : le gaokao, concours d’entrée à l’université.

La promo 2007 leur offrait 5,7M de places, chiffre qui révèle l’immense effort du régime : en 2000, ils étaient 4M pour 1,4M de places ! Issu du système mandarinal inventé (le 1er dans l’histoire) avant JC, le Gaokao avait été aboli en 1966 par Mao, en même temps que tout système scolaire, puis rétabli par Deng Xiaoping 11 ans plus tard. C’était il y a 30 ans pile. Il a depuis lors ouvert à 36M de bacheliers les portes de la faculté !

C’est donc pour cette jeunesse, le moment crucial, qui décide de leur vie : aux gagnants (et à leur famille!), les chances de promotion sociale ; aux autres, les places en usine ou en magasin… Aussi depuis des semaines, un luxe de précautions a été pris pour assurer aux candidats les meilleures chances.

Des A-yi tantes») ont été recrutées comme cuisinières, avec menus allégés et toniques. Les pharmacies ont été dévalisées de stimulants ou remèdes douteux tel le Ritalin (méta-amphétamine, contre l’hyperactivité). Les chambres d’hôtel proches du centre et les taxis ont été retenus. Puis les rues adjacentes ont été barrées par les parents : le silence est d’or, la Chine marche sur la pointe des pieds, brûle l’encens dans les églises, puis dans les temples…

Le Gaokao compte deux versions, « S » et « L ». Canton cette année teste une variante, en introduisant une « épreuve de base » et plusieurs options. Il s’agit d’une épreuve à points, garantissant un maximum d’équité. Mais avec un tel enjeu, et la chute malgré tout sensible des valeurs morales, la fraude gagne, aidée par les progrès de la microélectronique. Les tricheurs détectés étaient 1300 en 2005, 3000 en 2006 ! Aussi le Ministère, après avoir introduit dès 2004 la promesse écrite d’honnêteté, menace les joueurs invétérés d’un genre de casier judiciaire qui les suivra toute leur vie, consultable par les employeurs potentiels… 

Ces dernières années, donc, les chances d’admission ont fort monté. Au Gaokao, on reproche un manque d’équité, du fait des quotas instaurés par chaque université pour sa ville, et telle ou telle province. Même handicap pour les filles qui feraient autrement 70% des entrées. Sur les paysans aussi. Nanti des meilleurs professeurs, l’enfant des villes a 80% de chance, contre 30% à celui des campagnes. C’est l’échec du rêve de Deng d’une école socialiste ayant réalisé l’égalité des chances. Ainsi, les pédagogues le reconnaissent, loin d’être parfait, le système est le «moins mauvais possible ». Du reste, le Gaokao va devoir franchir une étape périlleuse pour son existence : quand le nombre de places dépassera celui des candidats—c’est pour bientôt !

 

 

Avez-vous aimé cet article ?
Note des lecteurs:
0/5
9 de Votes
Ecrire un commentaire