En 1979, l’Etat assumait 54% des frais de santé des citoyens. En 2006, il ne fournissait plus que 17% – dont 1/5 seulement aux campagnes, qui représentent plus de la moitié de la population !
C’était le fruit du choix de désengagement de Deng Xiaoping 20 ans plus tôt, afin d’assainir les finances. Il en résulte aujourd’hui une médecine à deux vitesses, et deux tares : un prix usuraire, des prestations inadaptées. Forcé de «se nourrir sur la bête», l’hôpital augmente son prix en abusant des médicaments, (50% de la facture), et de services inutiles mais coûteux, telle la césarienne (50% des accouchements) ou le goutte-à-goutte.
Résultat, l’OMS classe la Chine 188ème sur 191, en matière d’accès aux soins. Une réformette en cours, faite moins pour amender le système, que pour en avouer l’échec : des policiers se déploient dans les hôpitaux pour prévenir les violences, 5500 agressions sur le personnel médical en 2006, et 26M$ de dégâts.
D’autres mesures ont été prises.
[1] Depuis avril, le privé, même étranger peut posséder jusqu’à 70% d’un hôpital. Des groupes tels Hua Xia ou AFH (Hong Kong) visent le rachat de 10aines d’hôpitaux – pour offrir des soins de nouveaux riches -telle la chirurgie esthétique.
[2] Au 15/05, les prix de 182 formules occidentales (et 1200 médicaments) baissent de 19%, voire 62%. Mais les labos esquivent la directive en renommant leurs produits… Cette coupe est la 5ème en deux ans, sans baisse significative du coût de la santé: en 2006, la consultation coûtait 128,7¥, traduisant une hausse de 40% en 6 ans, et la nuitée 4668¥ (+43.86%). …
[3] Pékin tente d’enrayer la pratique des laboratoires, qui font des « dons » aux hôpitaux afin de les inciter à prescrire leurs produits…
Sur cet outil obsolète, de tels remèdes ne peuvent obtenir qu’un léger gain de temps : l’Etat médite une refonte complète du système. Fait rare, le Conseil d’Etat a commandité 7 scénarii, à trois universités, un centre de recherche, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), la Banque Mondiale, et McKinsey. Ces remèdes se cristalliseraient en deux modèles, basés sur une injection massive de crédits frais: l’un, du Ministère de la santé, prétend réhabiliter le service public, et assainir et multiplier le réseau existant. L’autre, soutenu du Ministère du travail et la sécurité sociale, veulent confier actes médicaux et subventions «au meilleur sur le marché» – public, ou privé—cette voie est d’ores et déjà perçue comme impraticable dans les campagnes reculées !
Enfin, cette réforme reçoit un atout majeur : le nouveau ministre Chen Zhu, 54 ans, formé en France (Paris VII, hôpital St Louis), brillant patron du programme « génome humain » à Shanghai. Un homme donc bien armé pour guérir ce système, en connaissance de ce qui se pratique ailleurs. Tandis qu’au plan politique, sa nomination marque un pas vers la séparation du Parti et de l’Etat !
Sommaire N° 19