Pol : Afrique : la Chine entre deux feux

Afrique : la Chine entre deux feux de brousse

Pour le pouvoir chinois en quête de pétrole et de minerais, les premières années africaines furent fraîches et joyeuses. Mais à présent viennent les difficultés, le vrai prix à payer.

Dès janvier au Nigeria, 14 de ses ressortissants avaient été enlevés, deux autres en mars. Au Kenya, un ingénieur était assassiné en février. Et voilà que le 24/04, arrive la vraie grosse « tuile » : à Abole (Ethiopie) sur un site de pompage de ZEPB (Zhonhyuan Exploration Petroleum Bureau, filiale de la compagnie chinoise Sinopec), 200 guérilleros s’infiltrent à l’aube, massacrent dans leur sommeil 74 employés dont 9 Chinois, avant de se replier avec 7 otages, également chinois.

Revendiquée par l’ONLF (militant pour l’autodétermination de l’Ogaden, d’ethnie somalie), l’attaque visait une milice rivale qui protégeait le site : le TPLF, de l’ethnie Tigray du 1er ministre éthiopien Meles Zenawi. Addis-Abeba a été prompte à accuser l’Érythrée, avec qui il était en guerre de 1998 à 2000. Pas plus que d’autres puissances, la Chine ni Sinopec ne vont remettre en cause leur présence suite à l’agression. Mais Pékin et ses pétroliers savent que pour eux, l’état de grâce en Afrique noire, est bien fini.

 

Au banc des accusés, une nouvelle venue : la milice

 Face à la délinquance, la Chine a vu apparaître veilleurs de nuit, gardes du corps et détectives privés. Mais le citadin normal qui ne peut s’offrir une telle protection, enrage de se faire dérober par les pickpockets toujours plus nombreux, du fait de l’exode rural massif et des 10% de chômage urbain au bas mot.

Aussi voit-on fleurir en Chine des milices de citoyens, qui s’arment de matraques et organisent leurs rondes. Très admirés, ces célestes Rambo se recrutent sur internet et ne se connaissent que par leur pseudo. Ils essaiment à travers le pays et seraient déjà 70 milices, voire bien plus, opérant sans mandat ni statut légal.

A Wuhan s’ouvre à présent un procès attendu : celui de Feng Weiyan, soupçonné d’avoir tué en octobre dernier un certain Yang, larron. Les amis de Yang l’accusent de l’avoir tapé à la tête. Ceux de Feng affirment qu’il n’a frappé qu’aux jambes et bras. La victime avait sauté d’un bus, puis d’un pont, chute suffisante pour envoyer ad patres même un solide gaillard. Mais avant toute chose, c’est le procès des milices qui va s’ouvrir, et du signe que donnera la justice, sur la légalité de cette activité se substituant à la police, souvent par esprit de vengeance. Les gendarmes en tout cas, sont loin de haïr cette concurrence d’amateurs : un commissariat de Haikou (Hainan) vient de reconnaître une milice, et veut l’entraîner et former à mieux attraper tire-laines et bandits !

L’étrange départ de Long Xinmin

Grand patron de la GAPP (General Administration of Press and Publication), la censure de la presse, de l’édition et de l’internet, Long Xinmin est congédié (24/04). Liu Binjie, son n°2 le remplace. Long passe n°2 d’un centre de recherche historique du Parti, organe potiche, contrairement au poste qu’il quitte. Pourquoi cette disgrâce ?

Une source le dit compromis dans l’affaire de corruption de Zhou Liangluo, ex-patron du quartier pékinois de Haidian. Une autre croit qu’il a été puni pour avoir censuré en janvier 2007, huit auteurs dont Mme Zhang Yihe. Une action impopulaire qui provoqua de vives protestations.

Détail insolite : trois semaines avant sa « promotion », Long reçut de l’ambassadeur de France M. Hervé Ladsous une croix de la légion d’honneur, inattendue pour un patron national de la police d’opinion. L’initiative peut se lire comme une tentative de coopération positive, avec appel discret à une « information plurielle » et une « réelle liberté d’expression dans un Etat de droit en construction » (citations du discours de l’ambassadeur). Si Long n’avait été démis, la décoration aurait aussi éventuellement pu servir, dit une source, à protéger un journaliste français en difficulté avec les autorités locales. Enfin, nous précise-t-on, ce processus de décoration est de longue haleine, du strict domaine décisionnel, voire d’initiative du Quai d’Orsay — dont acte.

 

 

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