Le Vent de la Chine Numéro 17
La SEPA, l’agence chinoise de la protection de l’environnement vit les mois les plus tendus de son existence. A l’heure où s’amoncellent les nuages jaunes (400.000 morts par an du fait de la pollution de l’air) et où les regards du monde se tournent vers elle, la Chine s’avère paralysée !
En mars, la SEPA aurait dû publier le « PIB vert », initiative donnant une vision plus exacte de la croissance en en ôtant les coûts de la pollution. La publication fut ajournée par la NDRC, sa maison-mère. Le 24/04, le Conseil d’Etat devait présenter son plan contre le réchauffement global : on s’attendait à ce qu’il renforce les efforts des usines en rendement énergétique, crée des plans de prévention des cataclysmes, mais refuse tout engagement national de réduction d’émission de gaz à effet de serre, type « Kyoto ». Or, ce plan vient lui aussi d’être repoussé sine die.
Mais le 22/04, apparaît son rapport sur les risques du changement climatique pour le pays. Le ton est clairement alarmiste. D’ici 2100, les 35.000 glaciers chinois fondront « aux 2/3 » – un autre rapport de l’ONU, publié en même temps, parle d’une fonte à 80%. Après 2050, croit ce texte, les récoltes baisseront de 37%, et une bande côtière de la surface du Portugal, berceau de 60% de la population et de l’essentiel de sa richesse disparaîtra sous 1m de remontée des mers. Il conclut donc à des «effets négatifs sévères » à attendre pour « l’environnement de survie ».
Et pourtant, malgré ces menaces, le rapport rejette toute suggestion d’effort de baisse d’émission de CO². Un certain Qin Dahe, membre de la China Meteorological Administration (CMA) et apparent « pape » de cette théorie, croit que « la croissance est la priorité urgente. C’est seulement après, pas à pas, que nous réglerons notre problème de climat ». Les choses sont claires: l’écologie est un luxe que la Chine ne peut accepter, que s’il est payé par l’étranger « bourgeois », et compatible avec une forte croissance. Face à cette exigence, les 2MM$ /an comptent pour peu de chose, que la Chine pourrait recevoir des pays signataires du protocole de Kyoto (selon la BAD), en leur vendant des droits d’émission. A ce rythme, il ne faudra à la Chine que 25 ans pour dépasser en émissions, la totalité des pays industrialisés. D’ici là, la température aura déjà monté de 1,1° à 2,1°-avec toutes les conséquences prévisibles pour ce pays, qui ne les prend pas encore en compte…
C’est à ce moment sombre, quand on ne l’attend plus, que réapparaît l’espoir —pas par hasard. Le 25/04, le 1er ministre Wen Jiabao crée un Bureau national de l’économie d’énergie dirigé par lui-même, et annonce un règlement de l’« information environnementale ouverte », imposant aux firmes la publication de leur pollution. Il rappelle l’objectif interne de réduction du taux d’émissions par rapport au PIB, de 20% d’ici 2010, et adjure « régions et ministères de réaliser l’importance de cette promesse solennelle au peuple ». Pan Yue lui, n°2 de la SEPA, va plus loin et veut mobiliser l’action citoyenne du public, « 1ère partie prenante de l’environnement ».
Ces remous contradictoires évoquent, au sommet, un furieux débat entre «anciens», adeptes aveugles de la discipline de Parti et de la puissance technocratique, et «modernes» éduqués, à la pensée plus autonome, déterminés à éviter une catastrophe à leurs petits enfants dans 50 ans. Ainsi derrière le rideau, se joue aujourd’hui même la bataille de la prise de conscience et de la responsabilité : lutte contre la montre, gagnable, entre autres, si les vieux rejoignent assez vite leurs ancêtres !
« Un des plus grands salons dans le monde » : ainsi décrit le Salon de l’auto de Shanghai (22-28/04), Kevin Wale, n°1 de General Motors-China.
Et de fait, visitant les 9 halles et 140.000m², parmi les 103.000 visiteurs du 1er jour, on voit le chemin parcouru en peu d’années par cette jeune industrie. Cet événement rivalise avec Francfort ou Genève, avec ses innombrables présentations, nouveaux modèles, simulateurs de conduite et jeux interactifs, « illustrés » par une foule de mannequins, court vêtus… Dans tous ses états, le luxe de Ferrari, Rolls-Royce, Lamborghini, Jaguar courtisait le nouveau riche. De GM à PSA, de BMW à Volkswagen (VW), de Hyundai à Toyota, 1.500 exposants de 20 pays briquaient leurs 868 modèles dont 100 importés, et une débauche de modèles pour occuper tous créneaux -52 à Ford, 50 à VW, 30 à Geely…
C’est clair : le pari de l’Etat d’imposer la Chine comme puissance automobile, est gagné. En 2006, elle est passée second constructeur avec 7,2M de ventes dont à l’export, 90.000 voitures et 252.000 camions, bus et fourgons (+100%, vers 4 continents). Seule ombre au tableau : la voiture chinoise ne perce pas en Europe et aux USA, faute de qualité et conformité aux standards. Sauf dans le marché des pièces, où 11,5MM$ de commandes furent enregistrées, contre 4MM$ à l’import.
Autre succès : les marques locales gagnent à pas de géant, et obtenaient 31% du marché (+28%) en 2006, avec des griffes telles Geely (200.000 voitures et 4,7% du marché, comme PSA), ou Chery (n°1 en mars, avec 44.568 ventes).
Odeur du temps : ce salon 2007 était placé sous le slogan politiquement correct de Technologie – nature – harmonie. Pollution et coût du carburant obligent, on va vers la voiture propre et moins gourmande, avec des moteurs au GPL, à l’éthanol de maïs, ou à l’hydrogène.
BMW présente son Hydrogen-7, hybride d’une autonomie de 200km sous ce carburant. VW investit 600M$ pour que tous ses modèles dont Octavia (1,8l) ou Polo-Blue Motion aient d’ici 2010 ses dernières boîtes et moteurs, pour réduire de 20% les émissions de gaz. Studieux élèves de l’école euro-nippone, les Chinois suivent, tels SAIC et Chery dévoilant leurs hybrides expérimentales. Chez GM, le flâneur chinois s’arrête devant la Chevrolet Volt à piles à combustible à l’hydrogène (made in Yantai), ou la Buick Riviera, et chez PSA, devant la Citroën Métisse, concept car sportif à diesel hybride, rêve d’avenir !
Fleuron français cherche avenir — en Chine ?
Sous procédure de sauvegarde depuis septembre 2006, après 4 ans de stagnation du chiffre d’affaires à 70M², les 240 employés de NFM Technologies France attendent : SHMG, de Shenyang (Liaoning), présentera-t-il d’ici le 24/05 les 20M² exigés en échange de 70% de la firme en difficulté, épongeant ses dettes au passage ?
Etablie à Lyon et au Creusot (Saône-et-Loire), NFM est une ex-filiale de Framatome, cédée en 2001 à la holding allemande Wirth, qui conserverait les 30% restants. En ses heures de gloire, en 1996, elle fournissait des tunneliers, pour le métro de Shanghai, puis en 2003, pour celui de Canton. Le souci de cette PME de pointe, est le spectre d’une délocalisation en Chine, une fois son savoir-faire digéré. Outre ses tunneliers, NFM est spécialiste des ponts roulants, des structures mécaniques de télescopes géants (tels Mauna Kea à Hawaii et Cerro Pachon au Chili), et d’équipements de pointe pour la défense, l’espace, l’aéronautique (Airbus) et le nucléaire (Areva).
NB : le problème vient peut-être des tunneliers, à la technique accessible à un savoir-faire chinois, et donc délocalisable. Alors que le marché est désormais d’avantage porteur dans des pays émergents comme la Chine, qu’en Europe déjà équipée !
Banques étrangères : à l’assaut des fortunes en Chine
Au 23/04, le paysage bancaire chinois mûrit, en laissant les groupes étrangers travailler dans la monnaie du pays.
A l’instar de la concurrence locale, Citigroup, HSBC (Hong Kong & Shanghai Bank Corp), Standard Chartered et BEA (Bank of East Asia) offrent désormais une palette complète de services en ¥ (Yuan) . Ils peuvent vendre sur ce 4e marché mondial aux 2000MM$ de bas de laine, leurs plans-épargnes, cartes de crédit, prêts hypothécaires et autres retraites par capitalisation.
Ensemble ces quatre banques totalisent une centaine d’agences, qui pourraient doubler cette année : trop peu pour toucher les grandes masses. Aussi visent-elles la tranche la plus rémunératrice, celle des riches et de la gestion de fortune. Chacune a fixé un solde minimum permettant le tri : 100.000¥ pour le pas-de-porte d’HSBC, 500.000¥ pour son Premier Wealth Management service ; 80.000¥ chez Citi et Standard Chartered, 800.000¥ pour leurs services luxe Citigold, et Priority Banking.
Avec un dépôt minimum de 5.000¥, et la gestion de fortune à 200.000¥, BEA est moins regardant— handicapée, il faut dire, par un nom moins emblématique. Pour les banques locales, le risque existe de voir partir les gros clients vers un meilleur service, sauf à relever le défi et à monter en qualité. Elles savent en tout cas que ces étrangères resteront toujours, parmi elles, une faible minorité.
Phénomène rare, et observé de près, en Chine : le déroulement, à travers 6 villes, du 1er tour des élections présidentielles françaises.
Pas moins de 6386 Français résidents vinrent déposer leur voix ce dimanche 22/04, entre Wuhan, Chengdu, Shanghai, Canton, Hong Kong et Pékin, sous les yeux lointains des médias et de l’Etat chinois, avides d’apprendre comment on vote au «pays de la loi» (法 国 Faguo)… L’Etat avait 2 bonnes raisons de s’y intéresser. Stratégiquement, tout ce qui touche à la France importe à Pékin, en tant qu’axe européen et allié ponctuel. Et la Chine avait été citée dans la campagne par deux candidats, Fr. Bayrou et S. Royal, qui avaient proposé de boycotter les Jeux Olympiques de Pékin, pour cause de livraisons d’armes au Soudan…
Après dépouillement, les résultats permirent un rare décryptage de l’opinion des Français, variable selon chaque centre de vote. La faveur à N. Sarkozy (UMP, droite) fut bien plus forte qu’en France avec ses 31% (41% à Pékin, 52% à Shanghai et 62% à Hong Kong). Selon le Quai d’Orsay, la France de Chine octroya 52,7% à N. Sarkozy, et 23,9% au centriste Fr. Bayrou. S’il ne tenait qu’à la Chine, c’est ce dernier qui eût été le rival de N. Sarkozy au 2d tour, et non la candidate socialiste qui en Chine, ne reçut que 17,3%. Ce raz-de-marée sarkoziste reflète aussi la chute de JM. Le Pen (Front National) avec 2%, les 8 autres « petits » candidats se partageant 4%. Révélation d’une détermination de cette population intellectuelle et pragmatique, de voter « utile ». Enfin, à l’instar de l’Hexagone, le record de participation fut battu partout, avec à Pékin, 72%, contre 42% en 2002.
NB : lors du scrutin français en Chine, les caméras durent rester à la porte, afin de préserver l’anonymat de certains ressortissants—la Chine ne reconnaissant pas la double nationalité. En effet un Ouighour sino-Canadien vient d’être condamné en Chine sans que sa nation d’accueil soit admise à l’assister (VdlC n°16).
La Chine avait une autre raison d’observer ce scrutin sur son sol : toujours plus de voix en son sein, réclament la démocratisation du système…
Or, un précédent fait fureur : le choix du Vietnam, en avril 2006 lors de son Xième Congrès, d’apporter un peu de transparence, en publiant à l’avance le rapport politique, et en tenant de vraies élections pour le 1er Secrétaire, le Politbureau… Pékin l’avait mal pris. En août 2006, le Président Hu aurait accusé le Parti-frère de « trahison des principes socialistes ».
Ce qui n’empêche bien des cadres à tous niveaux de l’appareil, de prendre en référence le précédent vietnamien pour contester la rigidité du leur système et en dénoncer le prix à payer par la nation, en terme d’immobilisme décisionnel et de transparence !
A Bo’ao, se poursuit l’aventure du microcrédit
Boao (Hainan) vient de tenir (20-22/04) son 6ème Forum pour l’Asie, concurrence chinoise du sommet de Davos, en présence de 1400 politiques (telle Gloria Aroyo Présidente des Philippines), industriels (Bill Gates fondateur de Microsoft) ou d’intellectuels tel Muhammad Yunus (Bengladesh), Prix Nobel 2006, expert en microcrédit.
Yunus y a annoncé le lancement de projets à Hainan et au Sichuan, et salué le changement de cadre législatif en Chine : ces mini banques n’ayant besoin que d’1M¥ de capital au village ou 3M¥ à la ville, d’un parrainage obligatoire de 20% par une grande banque, et pas plus de 10% à chaque actionnaire. Problème : jusqu’à présent, les banques chinoises n’ont pas suivi, doutant du remboursement de ces prêts sur l’honneur, pourtant honorés à 100% au Bengladesh. En fait, en Chine, 100 mini banques existent déjà sur le modèle de Grameen, celle de Yunus, et prêtent à 100.000 foyers, le marché potentiel étant de près de 60M. En 13 ans, la coopérative de crédit de Laishui (Hebei) a prêté 268M² à 18.000 familles, surtout aux femmes, et malgré 0,2M² perdus suite aux intempéries, n’a jamais cessé de faire des profits. Seul souci : trop de règlements freinant la croissance, et seules 6000 familles, suite à ses prêts, purent dire adieu à la pauvreté !
Coeur d’or à prendre, dans le Guangdong
Le 20/04 d’un coup en bourse, Melle Yang Huiyan devint la femme la plus riche d’Asie voire du monde, avec 9MM$, devançant des hommes tels G. Soros ou R. Murdoch.
A 25 ans, elle est aussi une des plus jeunes fortunes. Ce jour-là, Country Garden, la firme cantonaise créée par son père, ratissait 1,6MM$ d’épargne en vendant 2,4MM d’actions. Dès lors, ce groupe immobilier, valait 15MM$, dont 60% à Huiyan -suite à la session de ses parts en 2005 par Yang Guoqiang son père, 52 ans. Diplômée en marketing et logistique à l’université d’Etat de l’Ohio, elle dirige directement le groupe.
La trajectoire du père est aussi intéressante. Parti dans la vie comme fermier entre Shunde et Foshan, il faisait pousser son riz, élevait des vaches, avant de se faire maçon -d’épouser une maçonne. Avec trois sous de côté, au début des années ’90, il acheta une friche, une résidence faillie, et se lança dans l’immobilier à une époque où le marché était rien moins que sûr. En 1997, il fonda son groupe avec une idée simple : construire vite villas, maisons en ville et appartements à prix modeste pour la bourgeoisie de Canton—voire HK. Depuis, la société a accumulé environ 19M de m2 de réservations de terre, son patrimoine d’avenir !
Huiyan, sa fille, est-elle jolie ? Allez savoir, en l’absence de toute photo publiée. Elle a en tout cas « le coeur d’or », vouée à ce titre, à devenir la cible de tous les chasseurs de dot du continent !
« Libération » en bourse, par la porte de derrière
Dans l’attente d’une réforme de la presse qui ne vient jamais (loi, accès à la finance, rôle de contre pouvoir), les médias se voient barrés de la bourse et de sa manne.
Pour raison idéologique : depuis 1942 et le discours de Yan’an, la presse, comme l’art, est l’outil exclusif du Parti, et dépend financièrement du seul Etat. Mais cet ostracisme nuit à la création – en cours- de groupes nationaux multimédias.
Seul Beijing Media, filiale publicitaire de Beijing Youth Daily, put entrer (décembre 2004) en bourse de Hong Kong. Aujourd’hui (25/04), une seconde exception se profile : Jiefang Group (« Libération », constellation de titres autour du quotidien pékinois) va à Shanghai « par la porte de derrière ».
Avec son partenaire publicitaire Zhongrun, il reprend sans verser un sou, 52% de Xinhua Media, l’agence dominante dans la publicité et l’info financière, en bourse de Shanghai, voire au Nasdaq (cf VdlC n°9). Pour ce faire, Zhongrun cède à Xinhua Media une agence de pub. Jiefang cède les filiales « pub » et « distribution » de 6 titres de son groupe (sauf celles de « Libération »). Parmi ces titres, figure Shanghai Times (tirage à 350,000). En échange, XM émet 130M de nouvelles actions. Bilan : Jiefang en obtient le contrôle, et entre en bourse. XM (le groupe) en tire 2MM¥ de cash. Les deux sortent renforcés par cette fusion qui supprime leur concurrence.
Afrique : la Chine entre deux feux de brousse
Pour le pouvoir chinois en quête de pétrole et de minerais, les premières années africaines furent fraîches et joyeuses. Mais à présent viennent les difficultés, le vrai prix à payer.
Dès janvier au Nigeria, 14 de ses ressortissants avaient été enlevés, deux autres en mars. Au Kenya, un ingénieur était assassiné en février. Et voilà que le 24/04, arrive la vraie grosse « tuile » : à Abole (Ethiopie) sur un site de pompage de ZEPB (Zhonhyuan Exploration Petroleum Bureau, filiale de la compagnie chinoise Sinopec), 200 guérilleros s’infiltrent à l’aube, massacrent dans leur sommeil 74 employés dont 9 Chinois, avant de se replier avec 7 otages, également chinois.
Revendiquée par l’ONLF (militant pour l’autodétermination de l’Ogaden, d’ethnie somalie), l’attaque visait une milice rivale qui protégeait le site : le TPLF, de l’ethnie Tigray du 1er ministre éthiopien Meles Zenawi. Addis-Abeba a été prompte à accuser l’Érythrée, avec qui il était en guerre de 1998 à 2000. Pas plus que d’autres puissances, la Chine ni Sinopec ne vont remettre en cause leur présence suite à l’agression. Mais Pékin et ses pétroliers savent que pour eux, l’état de grâce en Afrique noire, est bien fini.
Au banc des accusés, une nouvelle venue : la milice
Face à la délinquance, la Chine a vu apparaître veilleurs de nuit, gardes du corps et détectives privés. Mais le citadin normal qui ne peut s’offrir une telle protection, enrage de se faire dérober par les pickpockets toujours plus nombreux, du fait de l’exode rural massif et des 10% de chômage urbain au bas mot.
Aussi voit-on fleurir en Chine des milices de citoyens, qui s’arment de matraques et organisent leurs rondes. Très admirés, ces célestes Rambo se recrutent sur internet et ne se connaissent que par leur pseudo. Ils essaiment à travers le pays et seraient déjà 70 milices, voire bien plus, opérant sans mandat ni statut légal.
A Wuhan s’ouvre à présent un procès attendu : celui de Feng Weiyan, soupçonné d’avoir tué en octobre dernier un certain Yang, larron. Les amis de Yang l’accusent de l’avoir tapé à la tête. Ceux de Feng affirment qu’il n’a frappé qu’aux jambes et bras. La victime avait sauté d’un bus, puis d’un pont, chute suffisante pour envoyer ad patres même un solide gaillard. Mais avant toute chose, c’est le procès des milices qui va s’ouvrir, et du signe que donnera la justice, sur la légalité de cette activité se substituant à la police, souvent par esprit de vengeance. Les gendarmes en tout cas, sont loin de haïr cette concurrence d’amateurs : un commissariat de Haikou (Hainan) vient de reconnaître une milice, et veut l’entraîner et former à mieux attraper tire-laines et bandits !
L’étrange départ de Long Xinmin
Grand patron de la GAPP (General Administration of Press and Publication), la censure de la presse, de l’édition et de l’internet, Long Xinmin est congédié (24/04). Liu Binjie, son n°2 le remplace. Long passe n°2 d’un centre de recherche historique du Parti, organe potiche, contrairement au poste qu’il quitte. Pourquoi cette disgrâce ?
Une source le dit compromis dans l’affaire de corruption de Zhou Liangluo, ex-patron du quartier pékinois de Haidian. Une autre croit qu’il a été puni pour avoir censuré en janvier 2007, huit auteurs dont Mme Zhang Yihe. Une action impopulaire qui provoqua de vives protestations.
Détail insolite : trois semaines avant sa « promotion », Long reçut de l’ambassadeur de France M. Hervé Ladsous une croix de la légion d’honneur, inattendue pour un patron national de la police d’opinion. L’initiative peut se lire comme une tentative de coopération positive, avec appel discret à une « information plurielle » et une « réelle liberté d’expression dans un Etat de droit en construction » (citations du discours de l’ambassadeur). Si Long n’avait été démis, la décoration aurait aussi éventuellement pu servir, dit une source, à protéger un journaliste français en difficulté avec les autorités locales. Enfin, nous précise-t-on, ce processus de décoration est de longue haleine, du strict domaine décisionnel, voire d’initiative du Quai d’Orsay — dont acte.
« Le nucléaire n’est pas la solution pour la Chine » : c’est Chen Mingde, n°2 à la National Development and Reform Commission (NDRC), sherpa de l’économie chinoise, qui le dit au Sommet de Bo’ao (Hainan), à un aréopage de leaders internationaux.
Ce verdict contredit frontalement la théorie officielle chinoise, qui prétend quadrupler sa production d’électricité atomique d’ici 2020, au prix de 3 nouvelles centrales de 1000MW par an. La raison du demi-tour : l’uranium, difficilement trouvable sur terre, avec en 2006, une offre globale en baisse et déficitaire, de 45M/kg face aux 81M/kg de la demande. Le prix a déjà quintuplé en 3 ans, à 42$/kg. Les réserves chinoises, à 70.000t, suffiraient pour 50 ans au plus, dit la CGNPH (China Guangdong Nuclear Power Holding). Si les chiffres sont justes, la filière nucléaire chinoise voit devant elle un obstacle majeur.
A l’égard du charbon, la NDRC se découvre un souci de même nature : depuis 2003, elle est importatrice structurelle, après avoir fermé des mines meurtrières ou resquilleuses des taxes. Jing Tianliang, Président de China Coal, croit cette dépendance nouvelle passagère, vouée à disparaître en 2011, une fois exploitées 0,8Mt de capacités supplémentaires, relevant la production à 3MMt… Mais c’est sans compter le fait qu’une partie de l’offre chinoise est plus chère (dure à extraire) et plus polluante que celle d’Australie et d’Indonésie.
Autre dossier « sulfureux », le cuivre. Le Bureau des Réserves Stratégiques (BRS), avec à peine 0,4 à 0,6Mt de stock, serait à marée basse, face à la fringale industrielle chinoise de 10.000t/j. Le problème est le protectionnisme d’Etat : comme le carburant, le cuivre est subventionné. Le BRS en aurait cédé ainsi 0,8Mt, en dessous du coût d’import… Un tel système ne lui a laissé aucune chance de se remettre du crash de 2005, où Liu Qibing, un de ses traders, pariant à la baisse, lui avait fait perdre 200M$… Selon les analystes, le BRS se retrouverait à présent entre le Charybde de ses obligations protectionnistes et le Scylla de l’impossibilité de réapprovisionner. A 5 à 6MM$, le prix serait irresponsable, et surtout, un tel tsunami d’achat achèverait de faire dérailler un cours mondial déjà déboussolé, passé de 2000$/t en 2002, à 9000$/t aujourd’hui…
C’est d’ailleurs pour cette même raison que finalement, la Chine se contentera d’une réserve stratégique de pétrole de 30 jours d’ici 2010, et non 60 voire 180 (norme de l’OCDE) comme espéré. Qu’on ne s’y trompe pas : ce n’est pas seulement ces trois cours qui s’envolent, mais tous, comme l’or (690$/oz), le platine (1317$) ou le palladium (382$/oz).
Il s’agit d’une tendance mondiale causée par la demande chinoise, traduisant la croissance non durable de la Chine, et les limites déjà visibles de sa fuite en avant !
Du 28 mars au 3 avril, à Kunshan (Jiangsu), dix patrons shanghaïens se soumirent à un grand oral inoubliable, sous la férule de l’Institut de psychologie de l’université Fudan.
Durant 7 jours, tous reclus en cellule nue de 5m², ils durent vivre seuls, sans TV, portable ni magazine ou livre.
Leurs 2 repas/jour étaient végétariens et sans alcool. Le lever était à 6 heures, le coucher à 20 h. Le seul être avec qui ils purent piper mot fut leur tuteur, une fois par heures et demie, pour lui donner leur réponse à trois questions simples posées la fois d’avant, concernant leurs proches, aux différents âges de leur vie, père, mère, épouse, enfants, amis, voisins, employés. Qu’avaient-ils fait pour eux? Qu’avaient-ils fait pour lui ? Que leur devaient-ils ? En 8 jours, ils durent ainsi faire 63 confessions, que le tuteur conclut toujours de ce mot digne du Sphinx : « merci d’avoir confié votre secret». L’exercice, on l’a deviné, venait du vipassana indien, discipline millénaire de méditation, destinée à faire retrouver par le « silence noble », le sens de la vie.
Le résultat dépassa toutes les espérances. Patron d’une JV allemande, Liu dut constater après le stage, que son usine s’était fort bien passée de lui. Il en tira les conséquences, et jeta aux orties l’anxieuse dictature de ses ordres ébouriffés.
Habitué des restaurants, Song, le nabab de l’immobilier ressortit allégé de 2kg et de son cholestérol, et garda en bouche, le goût du riz blanc.
La vie fut plus dure pour le professeur Su : il ne dut qu’à son exceptionnelle fierté, de ne pas tout planter là pour aller pérorer, faire au moins un jogging conjuratoire – activités bannies. Sans pouvoir réfléchir, ni dormir, toujours rebelle, au bord des larmes, il ne trouva un début de paix qu’au 3ème jour, avant de retrouver au 4ème le fil d’Ariane vers lui-même, sa vie antérieure, son école primaire, ses souvenirs d’enfance. Jusqu’ alors, il trouvait sa femme chichiteuse et trop protectrice. Mais découvrant chaque matin les vêtements par elle soigneusement empaquetés, il redécouvrit à quel point elle l’aimait et lui donnait, sans espérer en retour : c’était le视而不见 (shi er bu jian), ces beautés des jours que l’on voit passer, sans jamais les remarquer.
Le stage les réveillait à ces richesses de l’âme, venant relayer le matérialisme futile de Shanghai et du monde.
Après 55 ans de socialisme, on peut s’émerveiller de la facilité chinoise à retourner à cette sagesse védique, oubliant cette longue parenthèse de répression de toute vie spirituelle. Il est vrai que cette tradition chinoise du Voyage à l’Ouest vers la philosophie indienne ne date pas d’ hier : vers l’an -500, Confucius lui-même affirmait « se regarder et replier en lui-même tous les jours » (吾日三省吾身 wu ri san xing wu shen).
Cette capacité innée à retrouver de tels gestes, cette ascèse sortie toute fraîche des profondeurs le prouvent, s’il en était besoin : Mao, Deng, tous les ténors marxistes, dans la tombe ou non, sont bien enterrés !
n 9-10 mai, Beijing : Forum sur le développement de l’aviation civile
n 10-12-mai, Shanghai, SIAL Salon de l’alimentation, boissons, vins et spiritueux, et Packtech, Salon de l’emballage alimentaire
n 12-14 mai, Canton : Salon des glaciers, du café et Interbake—équipements de boulangerie