Le retour des dettes triangulaires
Comme en 1997 sous Zhu Rongji, le fantôme des dettes triangulaires revient et menace d’une vague de faillites.
Xavier Farcot, n°2 de la Coface Greater China (l’assurance crédit-export), le déduit d’une étude de 419 firmes locales : 19% voient impayés de 0,5 à 2% de leurs ventes annuelles – elles étaient 13% l’année d’avant. Pour garder leurs clients, elles acceptent de repousser le paiement des dettes au risque de ne pas pouvoir repayer leur banque, qui finit par leur couper les vivres. Ce sont surtout les firmes d’État qui sont le plus vulnérables (leurs faibles marges les empêchant d’absorber ce déficit pourtant léger) : 23% d’entre elles se voient agonisantes, contre 19% l’an passé.
Trois causes peuvent expliquer la tempête qui s’annonce :
[1] le désaveu d’un consommateur plus exigent vis-à-vis des produits médiocres (qui restent légion) ;
[2] la surproduction et la guerre des prix, qui em-pêchent l’investissement et la R&D (d’où le refus absurde et désespéré des victimes de voir ces non paiements comme ce qu’ils sont, càd des mauvaises dettes) ;
[3] flèche du Parthe, la restriction du crédit imposée par l’État, qui fait ses choix : moins d’usines (moins de pollution et de gâchis d’énergie), et meilleure qualité pour un grand nettoyage du paysage industriel !
China QingQi, étoile filante motorisée
En décembre, les ex-salariés de China QingQi (CQQ), synonyme de moto en Chine, assiégeaient le siège de la firme de Jinan, dans l’espoir vain de rattraper une miette du fonds de pension de 630M¥ sombré dans le naufrage de la compagnie.
CQQ est l’archétype du groupe d’État ayant connu une ascension irrésistible durant les années d’or ’90 avant de chuter. Grâce à la demande insatiable en biens de consommation, au prospère marché du Shandong et au génie de Zhang Jialing, son patron brouillon et intrépide, CQQ ne cessa de s’agrandir, par rachats de firmes, sans rechercher la profitabilité. De 2M² d’actifs dans les années ’80, CQQ montait à 15MM² en 1997, son empire comprenant Jinan QQ (1er groupe de motos en bourses de Shanghai dès 1993, puis Shenzhen en 1994), Haiyao (pharmacie) et Sundiro (autre moto).
Le vent tourna en 1999. Mauvais placements, amendes pour fraude boursière, détournements et pertes massives ont laissé une « coquille vide » en 2005 (au moins 340M² de dettes), à l’exception de la JV CQQ-Suzuki, mystérieusement florissante (500.000 motos et 200M² de chiffre d’affaires). Auteur du crash pour n’avoir pas consolidé à temps, Zhang est en prison, puni par une tutelle qui ne pardonne plus l’incompétence : une époque s’achève !
Sommaire N° 13