La farce qui suit ne se conçoit qu’en Chine, où le succès du couple s’é-value surtout à sa capa-cité de produire un héritier. Face à ce diktat confucéen, l’intelligence et l’éducation n’ont pas de prise – tant la réussite, ici, dépend avant tout de l’opinion des autres ! A Xi’an, Zhang et Liu Ye en donnent un bon exemple. Mariés depuis 13 ans, ces universitaires avaient osé 下海 xia hai (« descendre à la mer », passer au privé), quittant leurs emplois publics aux gras privilèges, pour monter leur usine textile de 300 salariés.
Après des années incer-taines, la fortune les avait rejoints. L’admiration que leur portait la ville n’était ternie que par la lenteur de Liu à enfanter – elle n’avait conçu qu’en 2002, à 30 ans, et encore, une fille ! Pire, comme un malheur n’arrive jamais seul, un cancer peu après la naissance, l’avait privée de toute 2de chance. C’est alors que sous la pression des siens, et la crainte de se voir abandonnée pour une jeune, sous prétexte de fécondité, Liu Ye ourdit ce plan bizarre, qui s’avéra calamiteux: elle convainquit Zhang tout d’abord très réticent, de recourir aux services d’une génitrice vénale.
Trois RV procréatifs furent pris par Liu Ye qui morte de jalousie, se morfondait à la porte de l’hôtel. La crise éclata neuf mois après: contre les 10.000² du contrat, la mère porteuse céda le bébé mâle, mais emporta l’époux. Impossible pour Liu Ye de risquer un scandale – elle aurait tout perdu! Quant à Zhang, après avoir goûté aux délices de Capoue, il n’en voulait plus démordre !
Depuis, déplorant un peu tard son incommensurable naïveté, l’épouse bernée se résigne au ménage à trois. Tout en sachant qu’elle ne doit s’en prendre qu’à elle-même, d’avoir scié la branche sur laquelle elle restait : « le vers à soie a lui-même tissé sa tombe» ( 作茧自缚,zuo jian zi fu) !
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