Construite trop vite, la nouvelle architecture chinoise se limite trop souvent à un vague grand tout convexe, ou à l’orientation d’une fenêtre selon le Feng Shui (énergie «vent & eau »).
Quoiqu’en plein redéploiement, la ville chinoise fait donc vieux jeu, comme si ses architectes manquaient de personnalité—ou d’esprit pratique. Témoin ce projet-pilote d’innovation énergétique à l’université Tsinghua : flatteur, mais impraticable, vu le coût des matériaux et l’aspect expérimental des techniques. Et pourtant, Emmanuel Breffeil, architecte à Tsinghua est catégorique: ses collègues chinois sont aussi novateurs qu’ailleurs : « toutes les politiques et les techniques sont prêtes ». Le frein se trouve au niveau des groupes d’immobilier.
Ayant pris des risques élevés auprès des banques pour assurer leur propre ultrarapide montée en puissance (8 sur 10 des hommes les plus riches de Chine, sont dans la construction), ils ne peuvent prendre le moindre risque technique, et doivent s’astreindre à un retour d’investissement très court, au détriment des clients.
Mais le vent tourne, poussé par l’attente d’un client plus prospère, et l’appel de l’Etat aux économies d’énergie. Green Beijing, 3000 militants de tous bords (du patron à l’étudiant), se mobilise pour encourager des matériaux tels bois ou acier, plus «écolo» que le béton (non-recyclable et trop froid). Quoique tolérées par l’Etat, ses méthodes sont sulfureuses : pétitions, occupation de lieux publics, appels à la presse, pour influencer l’opinion, les promoteurs.
Ils trouvent à leurs côtés des cabinets d’architectes motivés, lassés de bétonner à tout va, qui se regroupent sur des projets défenseurs de l’environnement. Tel ceux de CBDC, le groupe chinois d’ingénierie et d’architecture, en charge des structures d’acier sur les chantiers de la piscine et du stade Olympiques.
Par de telles forces, le tableau bouge par petites touches, vers une construction plus confortable et environnementale. «Pour les économies d’énergie, conclut Breffeil, je n’ai aucun doute qu’on va y venir. Le vrai problème de demain, concernera les égouts, le tri sélectif des ordures : là, la population a désappris, et il y aura un tournant éducatif à assurer ! »
Sommaire N° 4