En rappelant sa revendication sur la province indienne de l’Arunachal (VdlC n°37), la Chine compromit, sans doute sciemment, la visite de son Président Hu Jintao à New Delhi les 20-23/11. Mis à part 13 accords techniques, cette visite resta sans fruits marquants – investissements, accord de libre échange : tout ce qui fut octroyé à l’étape suivante, au Pakistan (24-27/11) où Hu célébra le 55ème anniversaire de ces relations exceptionnelles. Le n°1 Chinois avait deux raisons de « soigner » son allié :
[1] Isolé dans et hors de son pays, son homologue Pervez Musharaf avait besoin d’un soutien spectaculaire, que Hu était seul à pouvoir lui offrir, et
[2] Suite au réchauffement sino-indien des dernières années, Islamabad devait être rassuré sur le sens et le contenu de son alliance avec Pékin.
En ce sens, Pékin a été aussi loin que possible.
Huit accords politiques ont été signés, prévoyant la réfection de l’autoroute frontalière du Karakorum, la reconstruction d’écoles et d’hôpitaux dans les zones touchées par le récent tremblement de terre, un centre culturel chinois à Islamabad, et l’ouverture de la 1ère phase du port de Gadwar, qui ouvre à la Chine l’accès à l’océan indien (épine au pied de l’Inde) ! Les pays signent un plan quinquennal commercial et économique doté d’ une société mixte d’investissements, cheville ouvrière d’une pénétration future de la république islamique par les groupes chinois.
Surtout, les deux pays signent le 1er accord bilatéral de libre échange de la Chine, en réalité une 1ère étape qui gomme ou allège des centaines de droits de douanes. Les pays en espèrent le triplement des échanges en 5 ans, de 4,26MM$ en 2005, à 15MM$ en 2010.
Au plan des affaires, pour 3MM$ de contrats ont été signés durant la visite, dans des domaines comme l’hôtellerie, l’immobilier, des parcs industriels, le ciment, l’engrais. En exploration pétrolière, Norinco, groupe militaire obtint les blocs de Baska et Bahâwalpur, tout en en revendiquant trois autres, et sa part dans des groupes pétroliers publics en cours de privatisation.
Islamabad et Pékin ambitionnent bien plus, comme la livraison au Pakistan de centrales nucléaires, de fermes solaires ou éoliennes, de technologies de transformation du charbon, d’extension du réseau local GSM, d’industries lourdes…
En conclusion, on constate que Hu Jintao a fait entre Inde et Pakistan un voyage « trait d’union », appelant discrètement les deux pays à une réconciliation plus rapide. Mais en même temps, les fruits des deux étapes ne peuvent laisser de doute : pour Pékin, pour des raisons qui lui sont propres, priorité va à la consolidation de la petite alliance ancienne, sur celle de la grande et récente !
Sommaire N° 38