Deux anniversaires explosifs viennent de passer, alors que se poursuit dans les sphères du Parti un débat crucial et idéologique, forçant ainsi Hu Jintao, Président et 1er Secrétaire, à imposer sa ligne.
Il s’agissait du 17ème anniversaire du massacre de la place Tian An Men (3/6/’89), et du 40ème de la Révolution Culturelle (16/5). Le débat opposait réformateurs (Hu Jintao – Wen Jiabao) et le cercle de l’ex-Président Jiang Zemin, renforcé par les «nouveaux gauchistes» retournés des US : faut-il interrompre la réforme, le temps de régler les dysfonctions du système néolibéral ?
Ce débat ultrasecret est nourri par l’exaspération des masses, face à l’enrichissement inégalitaire, et à la corruption qui en 2005 causa le détournement de 60% des 77MM² octroyés par l’Etat aux paysans à travers 20 provinces, tandis que dans le même temps, 64% des ventes foncières (pour 53% des surfaces) étaient constatées illégales.
Au coeur de cette tempête réapparut (4/06) une figure absente depuis janvier pour maladie officielle : Huang Ju, vice 1erMinistre, proche de Jiang. Son remplacement comme Secrétaire du Parti à Shanghai était un enjeu important, susceptible de donner à Hu plus de marge d’initiative réformatrice. A présent son retour suggère un renforcement inopiné des conservateurs !
Par contre le 5 juin, un éditorial du Quotidien du Peuple donne la tendance inverse : «Cap maintenu sur la réforme» ! Même s’il précise en compromis transparent, que « le socialisme doit rester associé à l’économie de marché », Hu Jintao semble avoir imposé sa ligne – pas de retour en arrière !
Un autre RV-phare intervenait le 5/06, jour mondial de la Terre. Il permit au pouvoir d’ avouer l’évidente dégradation de l’environnement. Zhu Guangyao, vice directeur de la SEPA (l’administration nationale de protection de l’environnement) dénonça pour 2005, 200MM$ perdus en pollution de l’air et de l’eau, 10% du PIB, prix à payer pour une politique qui ne se donne pas les moyens de ses objectifs, « parfois même battue en brèche par les niveaux intermédiaires » !
Et pour tant rien de ce battage de couple n’empêche le Conseil d’Etat, le même jour, d’autoriser le barrage de Baihetan (Yunnan), futur 3ème nat’l, pour une capacité de 12GW, supposant une forte pollution supplémentaire: le régime exprime ainsi en matière d’environnement les mêmes contradictions que dans son débat sur la réforme.
Sur le fond, il trahit la lassitude d’un pays après 20 ans de croissance à rythme forcené, et les difficultés des deux branches du pouvoir à trouver les compromis utiles pour faire tourner la maison-Chine !
Sommaire N° 21