Au coeur du maelstrom qui les malmène, les Chinois ont une épave où se raccrocher : leur téléphone portable. C’est à travers lui que se poursuit l’éternel combat entre l’être et le pouvoir, 官逼民反guan bi min fan «le pouvoir opprime, le peuple se rebelle ». Un combat, moins contre l’empereur qu’entre employés/consommateurs, et firmes, tout à tour responsables du prétexte de la guerre!
L’entreprise abuse : à Shenzhen, Li Lanlian travaillait depuis 2 semaines aux assurances Sun, quand elles lui changèrent sa sonnerie sacrée (un air de l’idole Hongkongaise Jay Chou), pour une pub-maison.
Par ce viol d’intimité, la compagnie espérait empêcher l’employée d’exercer 2 métiers à la fois -pratique courante en Chine du Sud. Mais croyant à un faux numéro, les amis de Lanlian raccrochaient les uns après les autres et comme la direction refusait de lui rendre sa sonnerie, Li démissionna et porta plainte -l’affaire est en cours d’instruction.
L’individu abuse: à Canton, Chen Degui a découvert le plaisir de traîner les opérateurs en justice. Telle une drogue, c’est devenu sa raison d’être.
Victime en 2004 d’une pratique déloyale de China Motion et Shenzhen Mobile, il porta plainte contre eux, et perdit. Outré, il attaqua son nouvel hébergeur Guangdong Mobile au prochain prétexte :la surfacturation abusive de son nouveau numéro, qu’il avait choisi pour ses chiffres propices : il obtint cette fois 80¥. Depuis, il passe sa vie entre prétoire et avocat, affutant ses arguments!
Cette infllation des litiges dans la vie des gens, peut décevoir. Elle respecte pourtant la tradition antique.
Les assurances Sun suivent la thèse du roman historique « Les 3 Royaumes », pour qui l’armée doit faire corps avec son Général. Le combat de Chen est fidèle au roman épique « Au bord de l’eau », histoire de lutte entre un contre-pouvoir vertueux et une administration corrompue.
Vue ainsi, la Chine apparaît moins décadente ou teigneuse, qu’en marche sur son chemin de toujours, le GSM ayant remplacé l’épée !
Sommaire N° 19